La plus grande nouvelle de la semaine nous vient de Hamid Temmar, le ministre des Participations publiques et de l'Investissement. Il a annoncé - urbi et orbi - une stratégie industrielle de l'Etat pour cet été. Une étude - nécessairement d'un bureau conseil étranger - devrait donc être prête au mois de juillet pour enfin décider de priorités « d'actions publiques » dans le secteur industriel. Une question fuse « incompressible » : pourquoi seulement maintenant ? Il est clair depuis la reprise économique de 2001 que le parent pauvre de la croissance demeure l'industrie publique, dont M. Temmar nous rappelle qu'elle participe encore pour 70% dans la production industrielle du pays en 2006. La privatisation seule n'allait pas suffire à renverser l'orientation du secteur. Des économistes connus, des conseillers du CNES, le Forum des chefs d'entreprise, l'UGTA, des partis de l'assemblée nationale, des spécialistes étrangers de l'Algérie ont tous à un moment ou un autre insisté sur la nécessité pour l'Etat algérien de remettre en œuvre « une politique industrielle ». Une expression « horrifiante » qui, pour le très « anglo-saxon » MPPI, sent dangereusement l'époque « risible » de la planification centralisée. Pas d'intervention de l'Etat dans les priorités que se donne le libre marché. Telle aura été pendant cinq ans la table d'écriture des pouvoirs publics dominés par les Bouteflika boys de l'économie. C'est une habitude chez M. Temmar de prendre le temps de changer de conviction. Il faut tout d'abord lui reconnaître ce premier mérite ; il a le courage de changer d'opinion ; avant de l'accabler pour les délais qu'il mobilise pour lire le bon cap et manœuvrer à la barre. Il s'était déjà fondu en 2003 d'un touchant « je me suis trompé » à propos de sa charge éléphantesque contre le secteur public, ses managers et ses travailleurs, qui n'a abouti - comme il l'admet lui-même - en tout et pour tout qu'à la privatisation de 9 entreprises. Il a trouvé du bon à la relance par la dépense publique, qu'il dénonçait à son retour frais de l'étranger en 1999, et s'est acquitté avec brio de la tâche de « l'annonceur des réjouissances publiques » en se chargeant de la précampagne électorale de Bouteflika dès la fin de l'été 2003. Hamid Temmar s'est donc converti cette fois à la nécessité d'agir de manière quelque peu « volontariste » pour orienter les flux d'investissements dans l'industrie algérienne. Il est toujours bon de rallier l'évidence. Mais que va donc nous apprendre de subtil cette étude annoncée au monde par le pétillant ministre algérien ? Peut-être que les avantages concurrentiels existent dans les filières fortement utilisatrices d'intrants énergétiques... comme la pétrochimie. Ou sinon que la branche lourde des ISMM (industries sidérurgiques, métallurgiques, mécaniques) qui plombent les comptes du secteur depuis de longues années peut redevenir dynamique - comme Sider-Mittal à Annaba, si l'Etat arrive à y drainer les bons partenaires repreneurs. Les anciens investissements de l'industrie industrialisante redeviennent compétitifs dans une nouvelle distribution des spécialisations. Ou encore que les filières de haute technologie sont un territoire « possible », car l'Algérie peut profiter, in situ, d'une ressource humaine de recherche et développement, jeune, abondante, plutôt encore bien formée et pas chère. En fait, rien de vraiment neuf. Tout cela est contenu à la nuance près dans plus d'une thèse de magistère ou de doctorat d'Etat de la faculté des sciences économiques d'Alger. Temmar a pris le temps de la réflexion et de la consultation d'un bureau d'études de « haut niveau ».