J moins zéro, J moins rien, la boucle est-elle vraiment bouclée ? Deux années se sont écoulées à l'ombre de la société frénétique et toujours en course. A l'ombre du soleil algérois et des rayons de la presse. A l'ombre mais pas en marge de la vie. Aujourd'hui, les portes de la prison d'El Harrach s'ouvriront sur l'homme qui a défrayé la chronique de la presse algérienne mais également étrangère : Mohamed Benchicou. A l'ombre du cachot mais à la lumière des projecteurs, le journaliste et ancien directeur du quotidien Le Matin se propose, dès sa sortie, de saluer Alger par un ricochet commémoratif à la place de la Liberté de la presse vers 11h. Cette même place qui a fait peau neuve depuis plus d'une année et s'offrira aujourd'hui pour accueillir Mohamed Benchicou mais également le comité qui porte son nom et la corporation des journalistes. Ce même comité Benchicou pour les libertés qui s'est formé lors de son incarcération informe qu'« après 730 jours d'enfermement dans une cellule à la prison d'El Harrach où il a purgé la totalité de sa peine, le journaliste Mohamed Benchicou, directeur du quotidien Le Matin, recouvrera sa liberté qu'on lui a injustement spoliée pour des motifs spécieux ». Il y a deux années tout juste, le journaliste et directeur du Matin passait devant le tribunal d'El Harrach suite aux poursuites intentées par le ministère des Finances pour « transfert illégal de capitaux et infraction à la réglementation des changes ». C'était le 15 juin 2004. Une année à peine après l'élection présidentielle qui a porté Abdelaziz Bouteflika vainqueur. Une année tout juste après la parution du livre satirique de M. Benchicou sur le chef d'Etat, intitulé Bouteflika, une imposture algérienne. Les uns supputeront que la condamnation du journaliste vise en réalité à le punir d'une telle liberté dans ses écrits sur le président de la République. Les autres s'attacheront à la lettre de la loi qui stipule qu'aucun transfert de capitaux ne peut être accompli de manière frauduleuse. Au lendemain de la condamnation du directeur du Matin, son avocat Khaled Bourayou déclare : « La justice est totalement instrumentalisée. On a tenu compte plus de la qualité de Benchicou, parce que c'est un journaliste d'abord. Il exprime des opinions et des idées. » C'était il y a deux ans. Aujourd'hui, « Mohamed Benchicou se rendra immédiatement après sa sortie de prison à 11 h à la place de la Liberté de la presse pour se recueillir à la mémoire des journalistes algériens assassinés par des terroristes. A 11h30 devant l'ETUSA (rue Hassiba Ben Bouali), endroit où sont tombés deux journalistes, victimes du devoir lors de la marche citoyenne du 14 juin 2001 et à partir de 12h30 à la maison de la presse Tahar Djaout où il remettra en personne le prix Benchicou de la plume libre aux deux lauréats, le Marocain Ali Lemrabet et Bachir Laârabi », poursuit le communiqué du comité. Un périple ou un pèlerinage au sanctuaire des martyrs. Hassiba Ben Bouali fut en son temps l'héroïne d'une liberté dont Tahar Djaout a, l'esprit combatif, ravivé la flamme. Autre temps, autre mœurs. Entre le Mondial du football et sous l'ère d'un nouveau gouvernement, Benchicou sort de prison. Au même moment, d'autres journalistes comparaissent devant le tribunal d'Alger pour diffamation. La boucle est-elle bouclée ?