L'acharnement politico-thérapeutique tarde à imposer un «boulevard» électoral en faveur du Président sortant, qui se représente à sa propre succession. Les Algériens ne semblent pas convaincus par la possibilité de mettre un pays sur pilotage automatique. Si les soutiens invétérés du 4e mandat ont toujours justifié leur démarche par l'argument surprenant selon lequel le «peuple aime Bouteflika», il faut se rendre à l'évidence que le charme ne peut pas opérer en l'absence de l'homme investi du supposé pouvoir de séduction. Les observateurs étrangers sont les premiers à s'étonner de la tournure que prend cette phase de «renouvellement» au sommet de l'Etat en gardant les deux pieds dans la gérontocratie, aggravée par de sombres tableaux cliniques. Les plus grandes agences événementielles ne peuvent pas enclencher la machine à gagner comme au temps de la splendeur médiatique des précédents scrutins présidentiels, si elles ne disposent pas d'un «animal politique» capable de faire quelques pas sur scène et de lever les bras devant une foule chauffée à blanc. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a créé l'événement, la semaine dernière, en annonçant la candidature de l'actuel locataire du palais d'El Mouradia, avouant finalement que les sorties à travers les wilayas étaient conçues pour susciter et capter l'appel à un 4e mandat. Mais depuis, le dispositif de reconduction présidentielle a du mal à se mettre en place. L'opinion publique suit, avec un sentiment de consternation, les informations annonçant l'admission dans le staff de campagne d'anciennes figures politiques que l'on croyait expédiées par le système dans le cimetière des éléphants. Le recyclage sans fin du personnel politique, se proposant en alternative au régime dont ils sont issus ou se mettant à la disposition de l'équipe au pouvoir, est en train de cristalliser la colère sourde de la population. Les autorités ne l'ignorent pas et, du coup, tout devient prétexte pour un déploiement brutal des services de sécurité. La moindre manifestation de lycéens, d'opposants au 4e mandat ou de chômeurs tombe sous une charge policière disproportionnée. N'ayant jamais été déployé pour chasser les bandes de kidnappeurs toujours en activité dans la région, un dispositif tentaculaire de police et de gendarmerie a été mis en place, mercredi dernier, dans la wilaya de Tizi Ouzou pour sécuriser l'itinéraire d'une visite ministérielle qui a servi à annoncer à la population locale l'arrivée de la 4G, au moment où le signal de la 3G se fait toujours attendre. Les citoyens comprennent bien que l'Etat montre ses muscles pour imposer le silence et sécuriser l'avènement du 4e mandat. Loin du triomphalisme, la nervosité domine l'état d'esprit au sein du sérail, où les porte-voix du Président ne connaissent même pas le rôle qui leur est assigné dans l'improbable campagne électorale dont le lancement officiel est prévu en ce mois de mars. En face, la société civile prend conscience, chaque jour un peu plus, que le pouvoir embarque le pays dans une galère intenable dans un monde qui donne la chance aux jeunes, consacre les libertés et réserve des fins tumultueuses aux régimes qui se maintiennent par la force.