Après des études de chimie, Maurice Roucel entre chez Chanel en tant que chimiste. Six ans plus tard, il rejoint l'International Flavors and Fragrance en tant que chimiste en parfums. Il y reste également six ans et, ensuite, rejoint Quest Paris pour une durée de douze ans. Aujourd'hui, il vit à New York et travaille pour la société Symrise. Créateur de la nouvelle fragrance Insolence, il se plaît à signaler que la vie a toujours fait en sorte que chacune de ses nouvelles carrières débute dans chacune des maisons qu'il a dû rejoindre un, 1er juillet. Dans cet entretien, il nous introduit dans son univers de parfumeur. Qu'est-ce qu'un « nez » ? Un parfumeur créateur est quelqu'un qui crée avec sa tête. Le nez ne sert qu'à sentir, qu'à apprécier et évaluer ce qu'on a créé. Pour moi, un nez est quelqu'un qui est une bête à concours, c'est-à-dire qu'on lui présente 50 000 matières premières différentes, il faut qu'il les retrouve dans le dixième de seconde qui vient. Cela est le côté technique qui reste artisanal. La différence qui existe entre l'artisan et le technicien, c'est que le créateur maîtrise sa technique et l'oublie pour pouvoir se libérer dans sa création. Existe-t-il des écoles pour apprendre l'art de la parfumerie ? Il y a une école qui se trouve à Versailles, où un cursus de deux ou trois ans est à faire. mais je dirai que c'est seulement une initiation au monde de la parfumerie. en aucun cas on ne peut prétendre en trois ans devenir un parfumeur.On ne le devient qu'au bout de quinze ans d'expérience. Comment identifie-t-on des odeurs ? Il faut d'abord sentir l'odeur, la mémoriser. puis lorsque vous la ressentez, vous êtes capable de l'identifier si vous avez une mémoire olfactive et un appareil sensoriel développé. Vous ne pouvez identifier une chose qu'à partir du moment où vous l'avez apprise et mémorisée. Il faut que physiologiquement votre appareil olfactif se mette en marche mais, en même temps, que vous ayez la capacité de mémoire olfactive. C'est totalement à dissocier de l'acte créatif qui vient en plus. Si vous n'avez pas cette capacité, il est évident que vous ne pourrez pas créer en parfumerie. Comment lance-t-on une marque de parfum ? Il faut qu'il y ait un concept et une idée forte que tout soit cohérent. Il faut raconter une histoire avec une idée olfactive. Pour le parfum Insolence, on était assez libre. On savait qu'on ne voulait pas travailler sur le même territoire que Instinct qui était une « guirlinadée » fraîche. On voulait un parfum plus extraverti. On savait qu'on voulait un floral, on connaissait le nom insolence, donc cela nous a donné beaucoup d'inspiration. On a travaillé sur des notes à contre-emploi, comme la violette qui, normalement, est timide et là, on l'a triomphante, électrique, surdosée. Où cherchez-vous les essences ? Les essences seront sélectionnées en fonction de l'idée. Une fois qu'on a l'idée, on la met en forme. Par la suite, c'est un processus d'écriture. En fonction des besoins que l'on a, on recherche les essences adéquates. Après plusieurs années d'expérience dans ce métier, quels enseignements tirez-vous ? J'apprends tous les jours depuis 33 ans. C'est une recherche constante, avec des hauts et des bas. C'est un métier très passionnant. Je suis assez entier et je ne peux pas faire les choses en les survolant à moitié. Mes principales créations sont entres autres Tocade, Rochas, Hermès, Gucci, Lolita Lempika, 24 Faubourg, voyage.