Le tribunal correctionnel de Sidi M'hamed près la cour d'Alger a décidé, pour la seconde fois, de renvoyer, hier, le procès de l'avocat Mohcine Amara, poursuivi et placé sous mandat de dépôt pour «injure et menace» contre le bâtonnier d'Alger, Abdelmadjid Sellini. Lors de la première audience (tenue le 31 mars 2014), celui-ci avait demandé un délai pour permettre à son avocat de prendre connaissance du dossier et ce, après le refus de la présidente du tribunal d'entendre les témoins à charge. L'audience a été, faut-il le rappeler, électrique même si, à la fin, le prévenu a été mis en liberté après plus de deux semaines de détention. Entouré par les membres du conseil de l'Ordre, Me Sellini est revenu, hier, sur les circonstances de cette affaire : «Lorsque j'ai appris que le prévenu n'avait pas fait appel contre le mandat de dépôt, j'ai sollicité le procureur général dans le but d'une éventuelle libération, en lui expliquant que la présence du prévenu en prison ne profite à personne et qu'il est plus juste qu'il soit avec sa femme et ses enfants. Je ne veux pas être la cause du malheur de quelqu'un, mais son comportement a choqué plus d'un. Il m'a agressé physiquement, en me proférant des menaces devant de nombreux témoins, juste parce que je lui ai dit que je n'avais pas reçu la notification de sa réhabilitation par la commission de recours. En le voyant dans cet état, je me suis retiré, mais lui n'a pas cessé de me tenir des propos humiliants et vulgaires. Ce n'était pas son premier incident puisque de nombreux confrères se sont plaints de lui. C'est mon statut de bâtonnier qui m'a empêché d'aller loin avec lui. J'ai estimé que notre linge sale devait être lavé entre avocats. Je voulais même que le procès se tienne à huis clos pour éviter toute mauvaise publicité, mais j'ai été surpris, en cette journée du 31 mars, de la programmation de l'affaire sans que j'en sois informé.» Selon le bâtonnier, de nombreux avocats sont venus du barreau de Tizi Ouzou pour défendre le prévenu, alors qu'ils sont tenus par l'obligation d'informer le bâtonnat d'Alger : «Me Salhi m'a déclaré avoir informé (et non autorisé comme mentionné dans notre précédente édition) le bâtonnier de Tizi Ouzou. J'ai dit à la présidente que des témoins sont prêts à être entendus, mais elle a refusé de les inscrire. Je lui ai fait savoir qu'en tant que partie civile, j'avais le droit d'avoir une défense et du temps pour que celle-ci étudie le dossier.» Me Sellini note que la réaction du parquet était prévisible : «Il y a des fautes qui relèvent du cadre disciplinaire, mais d'autres relèvent du pénal. Le prévenu a outragé le bâtonnier, qui est une autorité de service public. Il fallait agir. Malgré cela, je voulais que l'affaire n'aille pas trop loin. Mais le parquet n'a pas tenu compte de mes doléances. Le prévenu a fait l'objet de douze plaintes et outragé sept confrères. Raison pour laquelle le conseil de l'Union nationale des barreaux a désigné trois de ses membres pour plaider contre lui.»