L'usage de la dynamite en haute mer par certains pêcheurs indélicats provoque un véritable massacre écologique. Les spécialistes parlent carrément de la destruction d'un écosystème déjà fortement en danger à cause de l'érosion sous-marine. La côte de Tipaza est particulièrement ravagée et des milliers de poissons pélagiques ont été massacrés. Selon les professionnels de cette région, certains sites sont systématiquement appauvris. Les physiciens ont expliqué depuis longtemps que la propagation des sons sous l'eau est 5 fois plus intense qu'en surface et les explosions sous-marines peuvent être entendues jusqu'a 50 km. Les détonations et les vibrations produites par la pêche à l'explosif endommagent le système auditif de nombreux poissons, notamment les dauphins. « Les mouvements des dauphins dans l'eau sont contrôlés par un système d'équilibre situé dans l'oreille interne. Les dauphins dont le système auditif est endommagé perdent toute autonomie et ne peuvent plus se nourrir ni s'orienter », explique un spécialiste. Mais qui sont ces bourreaux qui, pour quelques sous de plus, n'hésitent pas à décimer les fonds marins ? « Ce sont souvent des gens nouvellement débarqués dans la profession », affirment des pêcheurs rencontrés au port de Cherchell. Malgré les multiples dénonciations et les campagnes de sensibilisation, cette pêche nocive se pratique toujours dans l'impunité la plus totale. Le résultat de cette pratique irrationnelle est évident : le déclin du stock de poisson. Même le ministre de la Pêche et des Ressources halieutiques, Smaïl Mimoun, a reconnu que l'Algérie fait face à une pêche destructrice. Pour lui, les côtes algériennes sont les plus surveillées en Méditerranée. Cependant, il se contredit juste après en affirmant que l'Algérie ne dispose pas encore d'un équipement qui lui permet de contrôler les navires en mer et de détecter la présence de la dynamite. Qu'avez-vous fait pour le pêcheur ? Savez-vous comment paye-t-on le personnel marin ? Les pêcheurs ne perçoivent pas une rémunération mensuelle comme tout le monde. Ils peuvent rentrer chez eux le matin, après avoir passé une nuit en haute mer, sans contrepartie parce que leur filet n'a rien pris. Leur gagne-pain dépend, en effet, de leurs efforts, de leur expérience et accessoirement du hasard. Une tempête peut, par exemple, rendre leur fin de mois aléatoire parce que leur travail est payé proportionnellement à leur prise. Disons que l'équipage a réussi une récolte de 30 caisses toutes espèces confondues. On soustrait du coût global de ces 30 caisses, les frais d'exploitation (gasoil, graisse, huile, matériel, frais de réparation et d'entretien, en plus des autres charges). Cette opération étant faite, les gains sont partagés en deux parts égales dont l'une revient de droit au propriétaire du chalutier. L'autre part est partagée entre les différents membres de l'équipage, selon leurs grades, leur expérience et leur ancienneté. Le pêcheur n'a ni jour férié ni repos hebdomadaire, encore moins un congé annuel. Il travaille sans interruption, sauf pendant la période des grands vents et des fortes tempêtes où la mer est agitée. Généralement, les pêcheurs ne sont pas déclarés à l'assurance, malgré les risques qu'ils encourent. Les hommes de la mer prennent rarement la retraite. Il arrive de croiser en mer un pêcheur de 70 ans. Quand il décide de ranger son filet, on lui octroie une pension qui ne dépasserait pas les 8000 DA.