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Le retard dans l'exploitation accentue les souffrances des malades
Centre anticancer de Annaba
Publié dans El Watan le 05 - 05 - 2014

En l'absence de simples commodités au service d'oncologie, les patients, venus de très loin,
attendent leur tour dans les escaliers.
La fin du calvaire que subissent les malades atteints de cancer au service d'oncologie de l'hôpital Dorban relevant du CHU Ibn Rochd n'est pas pour demain. Au long, très long retard accusé dans la réalisation du centre anticancer (CAC), soit plus de huit années d'attente et de report, il faut ajouter l'absence d'humanisme dans ce service d'oncologie de la part de ceux qui ont la charge d'accueillir et de traiter cette catégorie de malades particulièrement vulnérable.
Concernant l'infrastructure, les responsables en haut lieu continuent toujours de chercher des raisons pour justifier le retard mis dans l'exploitation du CAC et commencer enfin à recevoir les cancéreux de la région Est. Lancé en grande pompe en 2006, ce CAC implanté dans l'enceinte de l'hôpital Ibn Rochd de Annaba se fait, à ce jour, désirer. Depuis, l'on annonce l'achèvement des travaux chaque année, mais à la grande déception des malades, -qui, en majorité, quittent ce monde sans avoir accédé aux soins-, rien ne se fait. Parallèlement, les malades souffrent au service d'oncologie de l'hôpital Dorban. En l'absence d'une salle d'attente, ils attendent leur tour dans les escaliers; physiquement diminués par la maladie, les patients gravissent difficilement les marches.
Ils viennent de Tébessa, Guelma, El Tarf, Souk Ahras et Annaba. Rencontrée dans ce service, une quinquagénaire, atteinte d'un cancer, nous raconte ses déboires : «Je regrette d'avoir transféré mon dossier de Constantine à Annaba où j'ai été mieux prise en charge. Je suis venue de Souk Ahras en croyant bien faire. Ici nous sommes mal pris en charge par le personnel paramédical et médical. Si nous essayons de frapper à la porte du médecin pour s'enquérir de notre tour, nous ne recevons aucune réponse.» Interrogé, un autre malade venu de Tébessa et dont la souffrance est perceptible sur le visage, n'a pas pu nous réponde. C'est sa femme qui l'accompagne, tout en l'aidant à accéder au service pour y subir sa cure de chimiothérapie, qui nous répond: «J'ai pris la route de Tébessa vers Annaba à 4 h du matin pour arriver tôt et assurer la cure pour mon mari parmi les premiers patients du service d'oncologie. Je suis ici depuis 8 h du matin. Il est midi et je n'ai reçu aucune réponse, le médecin traitant n'est pas encore venu. C'est la troisième fois consécutive que je me rends avec mon époux à Annaba pour ses cures. Malheureusement, son médecin traitant est toujours absent. Nous avons raté plusieurs fois le transport à cause du retard des médecins qui commencent les cures pour les malades à 11 h. Les déplacements nous coûtent cher et les médecins n'on aucune considération pour effort tant physique que financier.» Il est 14h au service d'oncologie.
Un personnel débordé
Un jeune malade semble souffrir d'une complication post cure. Personne ne vient à son secours. Interpellé sur l'état de ce patient, une jeune infirmière en rejette la responsabilité sur les médecins, disant : «Les médecins sont pressés de rentrer avant la fin des cures de leurs malades. C'est nous les paramédicaux qui terminons leur travail, mais nous ne sommes pas des spécialistes en la matière pour les prendre en charge en cas de problème.» Des cancéreux des deux sexes et différents âges sont nombreux dans cette inconfortable infrastructure de santé. Les uns sont plus souffrants que d'autres, mais chacun, à sa manière, traîne derrière lui un supplice indescriptible.
Abdelmadjid, un autre malade du cancer, de Annaba, trop fatigué et même désespéré, nous confie : «J'ai un cancer du poumon, et cela fait deux ans que j'ai commencé à faire des cures dans ce service. Mes séances n'ont jamais été respectées. La veille de chaque séance, je reçois un coup de fil du service, qui m'informe d'une pénurie de médicament m'invitant à ne pas me présenter jusqu'à la disponibilité du traitement. Cela m'est arrivé d'interrompre le traitement durant deux mois de suite. En l'absence de thérapie ma maladie s'est développée. Il a fallu faire intervenir des connaissances pour m'en procurer. Aujourd'hui, j'ai présenté mon scanner à mon médecin, et le constat est l'absence de toute amélioration ; il me propose alors un changement de protocole de traitement. A qui la faute ? Mon médecin traitant aurait pourtant bien choisi le bon protocole dès le début pour que mon état de santé ne se dégrade pas, mais que voulez-vous ? J'ai voulu aller me plaindre auprès du chef de service, mais il n'est jamais dans son bureau.» Contacté, le chef de service d'oncologie, Pr. Djedi, nous a déclaré : «Il se peut que les patients aient essayé de me contacter au moment de mon congé. Les médecins dans ce service sont dépassés. Ils assurent 70 cures par jour, 40% des cures sont pour les cancéreux de la wilaya de Annaba et 60% pour ceux des autres wilayas de l'Est. Les infirmières travaillent sans moyens de protection.
Des centres d'oncologie ont été créés à Azzaba (Skikda) et Guelma. Eux aussi doivent assumer leurs responsabilités et prendre en charge leurs malades ; de plus, ils ne font qu'une dizaine de cures par jour. Peut être que leurs malades ne leur font pas confiance car se sont de nouveaux centres et ils préfèrent venir à Annaba. Ce qui se répercute sur la qualité et la disponibilité du traitement. Il faut savoir que pour cette année, notre service à Annaba a eu 1200 nouveaux malades.» En attendant la fin de 2014 pour la réception du CAC de Annaba, tel que annoncé dernièrement par le ministre de la Santé lors de sa visite dans la wilaya, plusieurs malades atteints du cancer sont morts, alors que d'autres vivent leurs dernières heures et autant viennent d'entamer leur itinéraire vers cette horrible fin réservée aux cancéreux algériens.


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