- Aboubaker Djebril vient du Niger. Il a bien voulu nous raconter son histoire. «Je suis venu il y a deux ans. Nous étions un groupe de 15 personnes. Avant d'arriver à In Guezzam, le passeur nous a demandé de descendre et de nous disperser pour ne pas attirer l'attention des gardes frontières. Quand je suis arrivé à la ville d'In Guezzam (450 km au sud de Tam), un autre passeur nous a ramenés jusqu'à Amsel (à 45 km de Tam). Et là, j'ai pris un taxi jusqu'à la ville. Nous étions sept seulement à arriver à Tam», raconte l'homme de 35 ans. Pour lui, il n'y a aucun doute sur le sort des huit autres migrants disparus. «On s'est renseigné auprès de leurs cousins ici et au Niger. Personne ne les a revus. Ils sont sûrement morts en route.» La disparition de 46 migrants nigériens la semaine dernière près d'In Guezzam ne semble pas l'étonner. «Ça a toujours été comme ça. Avant de venir en Algérie, je savais que je risquais de mourir en route. Tout le monde le savait. Chaque jour que Dieu fait, il y a des migrants africains qui périssent dans le désert.» Boubaker se plaît à Tam : «Je suis cordonnier. Je gagne ma vie honnêtement ici. Là où je trouve mon pain, c'est mon Europe.» - Kouinda Jisolée, par contre, ne compte pas rester en Algérie où il est arrivé il y a à peine six mois. Il vient du Cameroun et compte poursuivre sa longue route vers l'«eldorado» européen. «J'ai quitté le Cameroun pour le Nigeria il y a 10 ans. Je suis monté ensuite au Niger et je me retrouve aujourd'hui à Tamanrasset. Si Dieu le veut, je vais partir d'ici dans deux semaines pour aller au Maroc. J'espère ensuite aller en Espagne. J'ai ma petite sœur qui vit là-bas.» Le jeune Camerounais se présente comme étant un «artiste chanteur» qui a «trois albums» à son actif. Les circonstances l'ont obligé à devenir maçon. Un métier qui lui permet de vivre et de mettre de côté un peu d'argent pour financer son long périple. - Sandrine vient également du Cameroun. Elle vit à Tam depuis presque deux ans. «Je suis Camerounaise. J'ai eu des difficultés au pays. Tout allait mal pour moi. Je suis partie au Nigeria, puis au Niger. J'ai dépensé plus de 500 000 francs CFA (environ 150 000 DA) pour arriver ici. Je suis tombée sur des arnaqueurs qui m'ont volé mon argent», raconte la jeune femme. A l'instar de son compatriote chanteur, elle ne compte pas s'établir en Algérie. Son objectif est d'aller en France. En attendant, elle a ouvert un petit restaurant à Guetaa El Oued. L'affaire «marche chwya chwya (un peu)». Sandrine a une fille d'environ un an qui s'appelle Maïza. «C'est une Algérienne. Elle est née ici», dit la jeune mère en riant.