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«Nous sommes déjà un eldorado pour les exportateurs du monde»
Mouloud Hédir. économiste, spécialiste du commerce international
Publié dans El Watan le 02 - 06 - 2014

-Le ministre du Commerce a fait de la finalisation du dossier de l'OMC une priorité. Y a-t-il réellement urgence en la matière ?
Le dossier de l'accession au GATT, puis à l'OMC est ouvert depuis 1987. La négociation formelle est engagée depuis 1996 avec, à chaque fois, des cycles d'ouverture de discussions plus ou moins avancées, suivies de périodes plus ou moins longues de totale aphasie. Alors, depuis le temps que cela dure, on peut se dire légitimement que c'est le même cycle qui recommence, auquel cas il est difficile de parler d'une urgence quelconque. Maintenant, on peut considérer votre question sous un autre angle. Vis-à-vis des partenaires au sein de l'OMC, l'image que nous renvoyons est totalement dégradée, c'est celle d'un pays en mal de gouvernance économique, qui ne sait pas ce qu'il veut et encore moins où il va.
Après 27 années de «négociations», nous en sommes toujours à évoquer la question de leur opportunité. Alors, bien sûr, pour tous ceux que blesse cette image peu digne de notre pays, il y a une urgence brûlante à sortir de cette ornière. Cela étant dit, le dossier de l'accession à l'OMC est une priorité évidente pour le ministre du Commerce et le dossier le plus lourd qu'il a sur sa table. J'ose espérer que cette priorité vaut également pour l'ensemble du gouvernement, dans la mesure où il est question de, rien moins que de décider de l'architecture qui va façonner, sur une longue période, les relations économiques et commerciales de notre pays avec le reste du monde.
L'objet n'est pas seulement, comme d'aucuns le pensent, de fixer les procédures applicables à l'importation de marchandises ; cela, ce n'est qu'une partie du problème. Le cœur du débat, ce sont les réformes qui, plus en amont, devront toucher aux conditions d'organisation de tous les secteurs d'activité au sein de notre économie. La libéralisation commerciale sans les réformes structurelles qui vont avec, c'est ce que nous faisons depuis vingt ans et qui nous conduisent à perdre sur tous les tableaux : nous perdons nos propres marchés ; nous pénalisons nos entreprises, nous ne créons pas suffisamment d'emplois durables ; et nous ne produisons pas assez, nous ne sommes pas en état d'exporter. Et le paradoxe, c'est que le statut de membre de l'OMC nous reste inaccessible, alors que dans la pratique nous sommes l'un des marchés au monde parmi les plus ouverts aux fabrications étrangères.
-Comment expliquer cela ?
La vérité est que si nos marchés sont ouverts et libéralisés, notre organisation économique est restée fermée, bureaucratique et incohérente. La vérité, c'est aussi que nos désordres internes ne sont pas solubles dans les règles du commerce mondial. Nous n'arrivons pas à admettre que rentrer dans l'OMC, c'est connecter l'ensemble de l'économie algérienne à l'économie mondiale et pas seulement quelques marchés d'importation. Notre position actuelle a quelque chose de pathétique : celle d'un pays qui frappe à la porte d'une organisation internationale mais qui ne se décide pas réellement à la franchir, réduit presque à saigner son économie plutôt que de faire l'effort de quelques réformes que le simple bon sens lui dicte depuis si longtemps. Alors, pour répondre vraiment à votre question, oui il y a une urgence : celle d'ouvrir les yeux et commencer à regarder ce dossier de l'OMC avec toute l'attention qu'il mérite.
-L'économie nationale est peu diversifiée et exporte très peu. Dans ces conditions, qu'avons-nous à gagner de cette adhésion ?
Cette manière de poser le problème rend bien compte d'une forme de léthargie qui imprègne profondément le regard que nous portons sur l'économie de notre pays. D'une certaine façon, cela suggère que nous sommes presque résignés devant l'idée que notre pays est condamné à ne vivre que des ressources de son sous-sol et à n'exporter que de l'énergie fossile. C'est une perspective qui est tout simplement suicidaire ; dans un tel cas de figure, notre relation à l'OMC devient effectivement une hypothèse absurde.
Une entrée de l'Algérie à l'OMC n'a de sens que si elle est couplée à des changements structurels de politique économique. Sur le contenu de ces changements, il y a beaucoup de propositions qui sont déjà sur la table et qui émanent de sources diverses. Il faudra probablement passer par un débat interne sérieux, mais il me semble que les principaux acteurs économiques et sociaux ne sont pas loin de s'accorder sur des questions aussi fondamentales que l'accélération des réformes de notre système financier et bancaire, la réorientation de la politique d'investissements, la simplification de l'environnement des producteurs et des investisseurs et même sur la politique des subventions.
Tous ces thèmes sont une partie intégrante de la négociation d'adhésion et je voudrais faire remarquer à ce titre qu'une partie de ce qu'attendent de nous les membres de l'OMC correspond à des réajustements que nous aurions dû réaliser nous-mêmes depuis longtemps. Cela concerne notamment la politique en matière d'investissements, l'industrie aval de l'énergie, l'organisation des grands secteurs de services, la réforme du contrôle des changes et jusqu'au dossier des subventions implicites ou explicites.
J'estime que si nous engageons ces réformes nécessaires, sur un registre volontaire, en dehors de toute pression externe, en associant les grands acteurs économiques et sociaux et en ne prenant en compte que le seul intérêt national, nous aurions alors franchi le pas le plus difficile pour aborder une négociation comme celle de l'accession à l'OMC. En d'autres termes, pour se mettre en condition d'aborder les défis externes auxquels est confronté notre pays, il faut commencer par évacuer nos fausses querelles internes et mettre notre économie en ordre de bataille. Pour imager cela, comment peut-on demander à un producteur algérien de faire face à la concurrence mondiale quand il est en butte à autant de tracasseries sur son propre sol ?
Je n'oublie pas, bien sûr, que le processus qui conduit à rejoindre une organisation comme l'OMC est un processus exigeant et redoutable. Mais, si la perception des enjeux qu'il implique nous aide collectivement à faire ce saut qualitatif dans l'organisation de notre économie, alors ce serait un bénéfice considérable pour notre pays.
-Que risquons-nous véritablement de perdre si nous ne le faisons pas ?
Aujourd'hui, il faut le rappeler, notre pays n'est pas dans l'OMC. Et ce qu'il faut souligner, c'est qu'au regard des pays membres de cette organisation, une rentrée éventuelle de l'Algérie ne leur apportera absolument rien de nouveau en termes d'avantages commerciaux. Après tout, nous sommes déjà, en l'état actuel, une sorte d'eldorado pour les exportateurs du monde entier et nous ne constituons absolument aucune menace sur les marchés internes de chacun de nos partenaires. C'est d'ailleurs là l'une des raisons de l'étirement à l'infini du calendrier de notre négociation et, contrairement à ce qui se dit ici ou là, il n'y aucune pression extérieure pour la finaliser. Nous pourrions ainsi continuer indéfiniment à gaspiller nos ressources les plus rares, tant qu'elles seront là et tant que nous ne prenons pas conscience du piège dans lequel nous nous sommes enfermés. Essayons donc d'ouvrir nos yeux et regardons le monde tel qu'il est autour de nous.
D'abord, ce rapport au commerce qui consiste à exporter des ressources naturelles pour importer des biens manufacturés date du XIXe siècle et est complètement dépassé à l'ère des échanges mondialisés. Le Maroc, la Tunisie ou l'Egypte exportent chacun 20 fois plus de produits industriels manufacturés que nous. Serions-nous donc «des bras cassés» ? On nous dit que c'est le lot des pays pétroliers. Savons-nous que même parmi les pays exportateurs de pétrole et de gaz nous figurons en toute dernière position (avec la Libye et l'Irak, des pays en guerre) pour la diversification de nos exportations ? L'Arabie saoudite elle-même, qui concentre pourtant les plus grosses réserves mondiales de pétrole, a commencé à se diversifier, les hydrocarbures ne représentant plus que 80% de ses exportations (alors qu'elles étaient au même niveau que nous il y a trente ans). Ce même indicateur est estimé à 39% pour l'Indonésie, 35% pour les Emirats arabes unis et 17% dans le cas du Mexique.
A condition d'y travailler sérieusement, la diversification n'est pas une voie fermée. Ensuite, il ne faut pas oublier qu'avec l'entrée à l'OMC de l'Arabie saoudite et de la Russie, les intérêts du monde pétrolier sont à l'intérieur du système commercial multilatéral : ceux parmi eux qui restent en dehors sont soit des pays en guerre (Libye et Irak), soit, dans le cas de l'Iran, en liaison avec une opposition expresse, d'essence politique, des grands pays occidentaux. Et hors ces pays pétroliers, il faut dire qu'il ne reste plus en marge de l'OMC que quelques micro-Etats ou des pays ravagés par les guerres, la corruption ou la mal-gouvenance. Enfin, peut-être faudrait-il se souvenir qu'il fut un temps où l'Algérie assumait un rôle de leader dans la défense des intérêts économiques du monde en développement. Alors que tous les pays d'Amérique latine sans exception et quasiment toute l'Asie et toute l'Afrique sont à l'intérieur de l'OMC, il est vain d'espérer renouer avec cette tradition tant que notre pays n'y prendra pas sa place.


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