Daoudi Slimane, alias Hamlaoui, était insaisissable pour la police coloniale. Sur la place du commandant Hocine Rouibah, en allant vers la Casbah de Constantine, juste en face du fameux Café Riche, un immeuble de trois étages abrite de nombreux bureaux d'avocats. Au premier étage de cette bâtisse, un appartement, dont les persiennes des balcons sont toujours fermées, a été le théâtre d'un évènement marquant dans l'histoire de la ville. Un fait que de nombreux Constantinois, notamment parmi la jeune génération ignorent toujours. Dans la nuit de mardi 7 juin au mercredi 8 juin 1960, soit quatre jours après l'Aïd El Adha, une attaque spectaculaire a eu lieu dans ce quartier de la ville, situé entre la place de la Brèche, la Casbah et l'ex-rue Caraman. Au premier étage de l'immeuble en question, un appartement servait de refuge pour quatre membres de la zone 5 (zone autonome de Constantine) dépendant de la wilaya historique II, selon l'organisation du FLN durant la guerre de libération. Il s'agit de Daoudi Slimane, plus connu sous le nom de Hamlaoui, Meriem Bouattoura, surnommée Yasmina, Bachir Bourghoud et Mohamed Kechoud. Ces deux derniers étaient membres respectivement des régions de Bab El Kantara et Sidi Mabrouk de la zone 5. Selon les archives de la Dépêche de Constantine, le mardi 7 juin, un renseignement puisé à bonne source révélait la présence d'un petit groupe de membres du FLN, parmi lesquels se trouvait une femme, au premier étage d'un immeuble à l'intersection des rues Cahoreau et Colbert, à quelques mètres de la rue Caraman. Dans la nuit, un important contingent de l'armée coloniale a été déployé. Dès 4h du matin, toute la zone située entre la place de la Brèche et la Casbah a été bouclée. On a même eu recours à une coupure de l'alimentation en gaz de ville, au vu des armes à utiliser. Repéré, le groupe de Hamlaoui, armé de deux pistolets mitrailleurs, quatre pistolets automatiques et quelques grenades, avait tenté de desserrer l'étau. Selon certains témoignages, le refuge sera attaqué au canon d'un blindé, alors que d'autres sources évoquaient des tirs de bazooka suivis d'un lancer de grenades. Lorsque l'ordre fut donné de lancer l'assaut vers 7h15 de la journée de mercredi 8 juin, un violent accrochage fut entendu. Les murs de l'appartement ont été défoncés avant l'assaut final. On devait découvrir les corps de Daoudi Slimane et de Meriem Bouattoura, alors que Bachir Bourghoud et Mohamed Kechoud, tous deux gravement blessés, avait été capturés, selon la Dépêche de Constantine. Mais selon les révélations faites par ses compagnons d'armes, Meriem Bouatoura était encore vivante lors de l'assaut final. Elle criait «Vive l'Algérie indépendante». Selon certains témoignages, grièvement blessée, elle sera achevée avant son évacuation vers l'hôpital de la ville. Du maquis au combat des rues Née le 17 janvier 1938 à N'gaoues, Meriem Bouattoura est issue d'une famille aisée et cultivée de propriétaires terriens de mechta des Béni Ifren. Sa famille s'installe à Sétif où son père ouvre un commerce. Elève au collège de jeunes filles de Sétif (actuellement lycée Malika Gaïd), l'enfant des Aurès rejoint les rangs de l'ALN après la grève des étudiants le 19 mai 1956. Infirmière dans les maquis de la wilaya II, où elle aidera le Dr Lamine Khene, elle sera chargée de la responsabilité d'un hôpital. Elle intègre en 1960 une cellule de fidai'yin, installée dans la ville de Constantine, où elle a fait preuve de bravoure et de témérité. Elle a pris part avec courage à de nombreuses opérations, alors qu'elle n'avait que 22 ans. Pour Daoudi Slimane, dit Hamlaoui, son histoire a souvent pris les allures d'une légende, tant l'homme, qui avait été l'instigateur ou l'auteur de plusieurs opérations perpétrées dans la ville de Constantine, était qualifié d'insaisissable par les services de sécurité coloniaux. Hamlaoui avait été déjà capturé le 7 janvier de la même année à Sidi Mabrouk, après avoir été blessé lors d'un accrochage à l'ex-rue Clemenceau (actuelle rue Larbi Ben M'hidi), mais il réussira à s'échapper aux forces françaises le 11 février. Son nom était lié à plusieurs attentats, ayant fait plusieurs morts parmi la police coloniale, dont les plus spectaculaires ont été la fusillade de la cité Bel Air qui avait fait deux morts, dont l'inspecteur de police Salles, ainsi que l'attentat commis le 4 mars 1959 à Sidi Mabrouk où le commissaire Cayol et son épouse furent tués d'une rafale de mitraillette tirée par Hamlaoui.