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Entre nuages et muezzin
Avant-première du film Les Terrasses de Merzak Allouache à Alger
Publié dans El Watan le 10 - 06 - 2014

Les Terrasses, dernier film de Merzak Allouache, en compétition au 2e Festival d'Alger du cinéma maghrébin, évoque les drames d'Alger dans un univers clos et ouvert à la fois.
Merzak Allouache regarde Alger d'en haut. Dans Es Soutouh (Les Terrasses), projeté en avant-première dimanche soir à la salle El Mouggar, à la faveur du 2e Festival d'Alger du cinéma maghrébin, le cinéaste évite de poser pied à terre. Toutes les «histoires» de la fiction se déroulent en haut des immeubles de la ville blanche. Blanche ? Les murs, dans le film de Allouache, sont sales, décrépis, lacérés, tombant presque en ruine. «Ville déglinguée», estime le réalisateur lors du débat hier à la Cinémathèque d'Alger. Allouache porte le même regard sur Alger depuis son premier film, Omar Gatlato, en 1975. Rien n'a donc changé depuis ? Ou c'est plutôt le cinéaste qui tourne en rond ?
La démarche artistique des Terrasses est, à première vue, intéressante. Il s'agit de raconter à la manière d'un film mosaïque cinq histoires qui se déroulent dans cinq quartiers différents d'Alger. Il n'y a d'abord l'inévitable Bab El Oued, quartier natal du cinéaste, toujours présent dans les fictions de Allouache. Ensuite Belcourt, Alger-Centre, Notre-Dame d'Afrique et La Casbah. La journée est rythmée par les appels à la prière. L'adhan est presque un fil conducteur dans le film. Dès l'aube, la couleur est annoncée : un homme sorti d'on ne sait où vocifère, insulte, élève la voix. Mais pourquoi donc ? Vise-t-il le muezzin ? Ceux qui partent à la prière d'el fadjr ? L'homme prie, lui aussi, sur ce qui ressemble à une terrasse. Donc trêve de questions.
Au lever du jour, sur une autre terrasse, un jeune barbu donne à manger à un homme enchaîné. Aâmi Larbi (Rachid Benallal) est emprisonné dans une cage, comme un chien. Larbi évoque les souvenirs de la lutte contre le colonialisme à La Casbah d'Alger et parle de trahison. L'histoire confisquée ? On peut le penser. Comme on peut s'intéresser au prénom, Larbi, de celui qui est en cage. Toutes les lectures sont permises, même si cela répond par une autre question : pourquoi Aâmi Larbi est-il enchaîné ? L'homme qui ne voit pas le soleil parle avec la petite Leïla (Myriam Aït El Hadj). Elle l'écoute, mais l'énerve aussi.
La rupture
La tête dans une bassine d'eau, un autre homme se fait torturer sur une autre terrasse. Un chef mafiosi (Mourad Khen) veut que le torturé lui signe un papier d'héritage. Le bourreau semble recevoir des ordres par téléphone de Minoucha (il le faut bien !), son épouse. Mourad Khen, qui n'arrive toujours pas à sortir «la télévision» de son jeu au cinéma, fait presque pitié dans ce film. Maintenant, la torture ?
On peut penser à une petite provocation dans l'univers déjà alourdi du film. «La torture s'est poursuivie après l'indépendance de l'Algérie. Tout le monde le sait. En 1989, j'ai eu à réaliser un documentaire basé sur des témoignages de gens qui ont été torturés en Algérie avant les émeutes d'Octobre 1988. C'était la première fois que l'on évoquait publiquement la torture en Algérie. Les torturés étaient tous du PAGS (communistes) dont j'étais moi-même militant», déclare Merzak Allouache. Oui, peut-on torturer un homme pour un héritage ? «Je découvre quelque chose de nouveau en Algérie à chaque fois que je viens. C'est la rupture au sein des familles. On se déteste à cause de l'héritage. La famille est éclatée», précise le cinéaste.
Sur une autre terrasse, une femme squatte les lieux. Elle vit avec sa fille (Amel Kateb), violée par les terroristes, et un neveu drogué. Le propriétaire (Hamid Remas) veut la chasser des lieux. Son sort sera scellé plus tard. Une musicienne (Adila Bendimerad) vit sur une terrasse, épiée par une mystérieuse jeune femme qui lui envoie des messages d'amour. L'effet Abdelatif Kechiche, qui a décroché la Palme d'or à Cannes en 2013 pour un film traitant de l'homosexualité féminine, est bien là. La joueuse de gumbri «discute» avec les musiciens (les frères Ghouli du groupe Djmawi Africa) de tout et de presque rien. La discussion est d'une affligeante banalité. Les dialogues du film ont-ils été réellement écrits ?
Plus loin, un sportif décharge sa colère contre un habitant squatteur d'une terrasse. Le personnage n'apparaît qu'une ou deux fois, pour donner des couleurs «locales» au récit. Une équipe de télévision, menée par une journaliste qui ne veut pas filmer les lieux non musulmans, formée d'un caméraman (Nadjib Oulbesir) qui trouve que le Festival du film arabe d'Oran est «bidon» et que la presse est «merdique», connaîtra un terrible drame. L'équipe télé a eu «la malchance» ou «la drôle» de coïncidence de se retrouver avec «la mafia» des tortionnaires presque au même endroit. Les barbus, tout aussi méchants que dans Bab El Oued City, font la prière sur une terrasse à la tombée de la nuit. Avant cela, l'amoureuse de la musicienne a choisi une autre voie...
Bien que Les Terrasses ne soit pas un thriller, un policier ou un film d'épouvante, les cadavres sont partout présents. La violence est une des thématiques préférées de Merzak Allouache. La scène du taleb (Hacène Benzerari) portant un keffieh rouge, qui maltraite une jeune femme pour en faire «sortir» le djinn tout aussi rouge est plus qu'expressive dans ce film.
Plaire ailleurs
Les clichés débordent de cette nouvelle fiction. Alger est sale, les bruits sont collants, les méchants sont toujours les mêmes, la toxicomanie, la violence contre les femmes, l'islam, la lâcheté des hommes (les musiciens qui refusent d'aider la jeune amoureuse agressée sur une terrasse), l'absence d'espoir, la crise du logement, la rapine sont encore et toujours là. Merzak Allouache pioche dans le même territoire, quitte à multiplier les trous dans le jardin. On retrouve dans Les Terrasses, les traces de Normaal, de Bab El Oued City, de Omar Gatlato, Bab El web… Faut-il alors continuer à prendre encore au sérieux Merzak Allouache, lui qui persiste à faire des films pour plaire ailleurs ? Des films marqués par un réalisme excessif et par un surdosage à mi-chemin entre l'idéologie de l'exclusion et le mépris culturel.
L'adhan dans le film n'est pas qu'un arrière-fond sonore ou un fil conducteur. Il semble suggérer la prise en otage d'une ville par une croyance qui provoque les violences ou les haines puisqu'après chaque appel à la prière, le sang coule quelque part. Les personnages sont entre ciel et terre, désarticulés. Ils se détestent parfois, se rejettent, se déchirent. Adila Bendimerad, qui a fortement besoin de cours de chant, interprète une chanson où «le rejet et la haine» sont évoqués. Pourtant, Les Terrasses ne défend presqu'aucune cause, même pas celle de l'amour ou du vivre-ensemble. Ce n'est qu'une fiction, dira-t-on. La scène du commissaire communiste qui ferme les yeux sur un meurtre est toutefois assez réussie, comme ces belles images d'Alger au crépuscule.
L'interprétation chaâbi de Abderrahmane Kobi, lors d'une fête de mariage, n'a malheureusement pas donné la petite dose poétique que le cinéaste aurait voulu. Enfin, le chaâbi, c'est Alger, pour ceux qui ne le savent pas encore ! C'est un film où il y a beaucoup de clins d'œil. Peut-être trop ! Idem pour les caricatures. Rien qu'avec la voix, Rachid Benallal s'est détaché dans ce long métrage par son interprétation, comme la petite Myriam Aït El Hadj dont le jeu a rafraîchi quelque peu la fiction. «Je me suis aperçu qu'il y a beaucoup de vie sur les terrasses. J'ai décidé de tourner ce film à Alger. Une ville où il est devenu impossible de tourner dans la rue. Il y a trop de monde, trop d'embouteillages.
C'est très compliqué», soutient Merzak Allouache, qui a choisi l'intérieur-extérieur des terrasses pour raconter ses histoires selon la règle des cinq (cinq appels à la prière, cinq quartiers, cinq vécus). «Je me suis retrouvé sur des terrasses où, pendant le tournage, on continuait à vendre de la drogue en hors-champ. Pendant les repérages, j'ai vu Alger d'une autre manière, Alger saccagée. J'ai vu toutefois des terrasses où restent des parcelles de l'Alger ancien, où l'on vient moudre le café ou sécher la viande salée. Mais, les terrasses sont devenues des lieux de confrontation», note-t-il. Merzak Allouache dit qu'il n'est pas le cinéaste du ministère du Tourisme pour donner «une belle image» de l'Algérie. «Je suis à la retraite. Je n'ai plus rien à perdre ou à gagner. Beaucoup de choses ne m'intéressent plus. Seul le cinéma m'intéresse», confie-t-il.


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