Le conflit entre la Chine et le Vietnam sur les archipels Spratleys et Paracels a récemment resurgi. Le 1er mai dernier, sous haute protection de la marine et de l'aviation chinoises, Pékin installe une plateforme d'exploration pétrolière à proximité des îles Paracels que le Vietnam considère comme faisant partie de sa zone économique exclusive. Hanoï qualifie une telle décision d'«illégale». Le 13 du même mois, se déclenchent des manifestations anti-chinoises dans plusieurs villes du Vietnam. Réveillant ainsi des ressentiments nourris par d'anciennes frictions ayant marqué les rapports entre les deux voisins. Situés en Chine méridionale, les deux archipels regroupent des îles, îlots, récifs et atolls. Outre la Chine et le Vietnam, d'autres pays limitrophes (voir ci-contre) se disputent ces zones qui renferment des gisements de gaz et de pétrole, ainsi que des richesses halieutiques. Aussi, ces territoires se situent sur les routes qui relient l'Asie orientale à l'océan Indien. D'où leur importance stratégique. Ces enjeux multidimensionnels suscitent la méfiance des voisins de la Chine quant à ses ambitions hégémoniques et expansionnistes dans la région. Des rapports belliqueux En 1974, soit un an avant la fin de la guerre du Vietnam en 1975, l'armée chinoise occupe l'archipel des Paracels. Les relations entre Pékin et Hanoï s'enveniment en 1978 avec la perspective d'une visite du leader chinois Deng Xiaoping aux Etats-Unis, laquelle a eu lieu en janvier 1979. Soumis aux attaques continues de l'armée de Pol Pot sur sa frontière avec le Cambodge, taraudés à l'idée d'un encerclement tissé par Washington, Tokyo, Pékin et Phnom Penh, les Vietnamiens optent pour une intervention militaire au Cambodge. Parallèlement, Hanoï lance une campagne contre les Hoa, les Chinois du Vietnam, qui débouche sur l'expulsion de centaines de milliers d'entre eux. Deng Xiaoping décide, en représailles, des attaques à la frontière vietnamienne, début 1979. En 1988, la Chine et le Vietnam entrent en guerre pour accaparer les récifs Johson. L'arrivée au pouvoir en Union soviétique de Mikhaïl Gorbatchev marque le début d'une nouvelle ère dans les relations internationales. De ce fait, le Vietnam est convaincu que la réduction de l'aide soviétique dont il bénéficie jusque-là l'oblige à prendre plusieurs mesures pour s'adapter aux contraintes des changements que connaît le monde. Hanoï retire son armée du Cambodge, ouvre le pays aux investissements occidentaux et normalise ses relations diplomatiques avec Pékin en 1991. Cette même année, intervient un accord international sur le Cambodge. En juin 2011, le Vietnam entame une série d'exercices militaires à tirs réels en mer de Chine méridionale. La porte-parole vietnamienne des Affaires étrangères, Nguyen Phuong Nga, parle d'un simple «entraînement annuel de routine». Or, un mois auparavant, Hanoï avait accusé Pékin d'avoir «violé» sa souveraineté lorsqu'un navire d'exploration du groupe public d'hydrocarbures PetroVietnam a été endommagé par des bateaux chinois dans une zone qu'il considère comme partie intégrante de son territoire. En juin 2012, le Vietnam initie de nouvelles règles de navigation relatives au territoire, intégrant les îles Spratleys et Paracels. L'œil bienveillant de Washington Passons la guerre du Pacifique de 1941 à 1945. Passons la guerre de Corée (1950-1953) et la guerre du Vietnam. Le Pacifique constitue pour les Etats-Unis une des régions où sa présence est indispensable pour défendre ses intérêts. D'où l'œil vigilant de Washington quant aux conflits territoriaux entre pays de la région où il compte, entre-temps, des alliés comme le Japon et les Philippines. Cependant, se déploie en face un concurrent économique puissant, la Chine, accusée par ses voisins d'ambitions expansionnistes. Dans cet échiquier-écheveau où les intérêts s'imbriquent, Washington se pose en arbitre tout en étant vigile. Un statut qui l'expose à des frictions avec Pékin. Le 1er avril 2001, un avion de reconnaissance de la marine américaine entre en collision avec un chasseur de la marine chinoise près de l'île de Hainan, une province de la Chine. D'où un grave incident diplomatique entre Washington et Pékin. En mars 2009, le Pentagone accuse la Chine d'avoir harcelé l'Impeccable, un bâtiment scientifique non armé opérant en toute légalité dans les eaux internationales, à environ 120 km au sud de l'île de Hainan. Il affirme que l'Impeccable menait une opération «de routine». En réaction, le ministère de la Défense chinois relève que le bâtiment américain a violé le droit chinois et international, dont la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982, ratifiée par la Chine mais pas par les Etats-Unis. Washington prône un règlement multilatéral et pacifique de ces conflits territoriaux entre la Chine et ses voisins. Ce qui est loin d'être la vision de Pékin, plutôt favorable à des négociations bilatérales. Le président Barack Obama a fait de la concrétisation la stratégie du «pivot» une de ses priorités majeures de sa politique étrangère. Basée sur les trois D — diplomatie, développement et défense —, cette stratégie consiste en le déploiement de plus de la moitié de la flotte américaine en Asie-Pacifique, le renforcement des partenariats dans le domaine militaire avec les alliés de la région et le rapprochement avec la Birmanie, l'Indonésie et le Vietnam. Lors de sa visite en Australie en novembre 2011, le président Obama a déclaré que «les Etats-Unis sont une puissance du Pacifique et nous sommes là pour rester». De son côté, Le président Hu Jintao a indiqué, dans son discours du 8 novembre 2012, que la Chine doit vite s'imposer comme une «puissance maritime» de rang mondial.