Le vol AH 5017, en partance de Ouagadougou et à destination d'Alger, s'est écrasé, hier matin, aux abords de la ville de Gao, au Mali. Les conditions du crash de l'avion affrété par Air Algérie à la compagnie espagnole Swiftair restent inconnues. Il est 1h17 quand le MD-83 de la compagnie espagnole de leasing aérien, Swiftair, affrété par Air Algérie, se positionne pour son décollage sur la piste 22 de l'aéroport international de Ouagadougou au Burkina Faso. Le vol régulier AH5017 avec à son bord 116 passagers, dont 6 Algériens et 50 Français, décolle à destination d'Alger avec une météo compliquée, annonçant la possibilité d'orages électriques épars dans toute la région du Sahel. Le vol se déroule normalement, à 1h55, selon le communiqué officiel d'Air Algérie, le dernier contact radar a eu lieu dans la région de Gao au nord du Mali, il devait atterrir à Alger à 5h11. Les informations officielles données auparavant avaient annoncé une perte de contact 50 minutes après le décollage et un ordre de changement de cap donné par la tour de contrôle de Niamey pour éviter des formations orageuses. L'appareil n'arrivera jamais à destination. Air Algérie annonce officiellement le crash à 11h à travers un communiqué et met à la disposition des familles un numéro de téléphone. Une cellule de crise est immédiatement installée à Alger ; regroupant plusieurs départements, elle se charge de coordonner les recherches et de distiller l'information, le ministère des Affaires étrangères est aux commandes. Le Quai d'Orsay et l'ambassade de France à Alger aussi installent des cellules de crise, vu le nombre de Français à bord du vol AH5017. D'ailleurs, sur place, ce sont les forces françaises des différents dispositifs (Barkhane et Epervier) qui entament les premières recherches. Deux Mirages 2000 de reconnaissance décollent de N'Djamena en début d'après-midi et se dirigent vers Gao. L'armée de l'air algérienne, qui dispose d'énormes moyens aériens dans la région, envoie immédiatement un Hercule C-130 pour balayer la zone et chercher des traces du crash, trois avions Beech 1900 HISAR prennent le relais. Ils sont dotés d'équipements d'observation de pointe et de radars pouvant détecter les gros objets sur des dizaines de kilomètres. A Alger, en fin de matinée, on en sait un peu plus sur l'identité des victimes algériennes. Détection Lotfi Debaili, jeune commandant de bord d'Air Algérie, passager sur ce vol, en fait partie. Ses collègues sont sous le choc et décrivent cet ancien pilote formé par Khalifa Airways comme l'un des plus compétents du groupe. Très vite des hypothèses sont émises. Certains médias font même le parallèle avec la tragédie du vol MH17 de la Malaisyan Airlines qui a été abattu une semaine auparavant, jour pour jour, au-dessus d'une zone de conflit, assez similaire à ce qu'est devenu le Sahel. Mais sur ce point, il est très difficile d'imaginer une piste criminelle ; trois possibilités existent. Le détournement : depuis l'obligation faite aux compagnies aériennes d'installer des portes blindées dans les cockpits d'avion, le nombre de détournements a connu une chute vertigineuse. Le dernier en date, l'hiver dernier en Suisse, a été le fait d'un copilote qui se trouvait donc déjà dans la cabine de pilotage et qui a profité de l'absence du commandant de bord pour s'enfermer et prendre le contrôle de l'appareil. La bombe : il n'y a plus eu d'attentat à la bombe à bord d'avions civils depuis plus d'une dizaine d'années, ceci étant le fait de l'application stricte des règles de sécurité de l'Organisation internationale de l'aviation civile qui veille à l'homologation des différents aéroports internationaux, qui doivent obligatoirement être équipés de scanners et de moyens de détection. De plus, depuis quelque temps les bagages enregistrés dont le propriétaire n'a pas embarqué sont systématiquement débarqués. Le tir de missile : cette hypothèse implique qu'une armée se trouvant sur place ait pu traquer par radar, la nuit rendant l'identification visuelle impossible, puis acquérir la cible et l'engager sur une altitude de 31 000 pieds. Si, sur le papier c'est possible, il se trouve que les armées maliennes, nigériennes et burkinabaises sont très loin de disposer de tels équipements. Les supposés missiles anti-aériens provenant des arsenaux de l'armée libyenne, dont disposeraient les différentes factions terroristes qui pullulent dans la région, en supposant que leurs batteries extrêmement fragiles aient pu tenir deux ans dans les conditions extrêmes du Sahara, leurs capacités ne permettent d'engager des cibles qu'à basse altitude avec un plafond maximum de 12 000 pieds. Technique Reste la possibilité d'un souci technique. Bien que le modèle de l'avion soit totalement dépassé et n'est plus en production, le MD83 immatriculé EC LTV, affrété par Air Algérie, est de fabrication récente. Il est sorti des usines de Mc Donnel Douglass en 1996, a été surtout loué à des compagnies aériennes et à des institutions, comme l'ONU et même le Real de Madrid entre 2007 et 2009, il aurait subi un contrôle poussé il y a un mois en France et un plus superficiel trois jours auparavant à Marseille. Ce même appareil effectuait, la veille, un aller-retour Batna-Orly sans difficulté. Il reste que ce modèle d'avion a connu une série de crashs, dont celui du AH5017 sera le huitième de la liste, le plus impressionnant aura été celui de Spanair en 2008 à Madrid. Il reste que des voix s'élèvent à Alger pour dénoncer l'opacité avec laquelle se font les affrètements d'avion lors des saisons hautes (hadj et été) et qui voient chaque année défiler sur les tarmacs nationaux une pléiade d'appareils hétéroclites. Un pilote d'Air Algérie, contacté par nos soins, a trouvé complètement absurde de louer un appareil ne figurant pas dans le parc du pavillon national et dont nous ne disposons ni de pilotes ni de techniciens qualifiés pour effectuer la moindre intervention. «Ce n'est pas comme s'il y avait pénurie mondiale de Boeing 737 ou d'Airbus A320 en leasing. Le fait de louer un MD83 avec son équipage est non seulement louche, mais c'est aussi une insulte aux équipages algériens auxquels on préfère leurs homologues étrangers», poursuit-il. Météo Dernière piste sérieuse, celle des mauvaises conditions météorologiques dans la région. De très violents orages se sont déclarés dans la soirée d'hier dans le nord du Mali, des images satellites radar ont montré une concentration nuageuse dans les alentours de Gao sur un cercle 500 kilomètres de diamètre. En juillet, le Sahel se trouve en pleine zone de convergence intertropicale, communément appelée par les marins «Pot au noir» et qui a causé le crash du vol Rio-Paris. Ce type d'orages que craignent plus que tout les pilotes car il crée des cumulonimbus, nuages verticaux à l'origine de trois phénomènes dangereux que sont le foudroiement, qui peut affecter les instruments et l'électronique de bord, le givrage, qui affecte l'aérodynamique de l'appareil et bloque les volets ou gaine les pitots et différents détecteurs et enfin les turbulences ou vents cisaillants qui peuvent dans des cas extrêmes endommager les ailes et le fuselage de l'appareil. Il reste que jusqu'à ce que les débris soient retrouvés et analysés, les boîtes noires décryptées, toutes les hypothèses sont à prendre en considération. Cet accident remet sur le devant de l'actualité le crash du C-130 de l'armée de l'air algérienne dont l'enquête semble avoir été mise aux oubliettes et dont étrangement son unique survivant a pu rejoindre sa famille aujourd'hui.