L'ancien chef de la diplomatie française sous Chirac, Dominique de Villepin se révolte contre la position de son pays, jugée pro-israélienne, et vilipende la communauté internationale qui, jusque-là, reste impuissante face à l'escalade de la violence que subit la population palestinienne. Dans une tribune publiée hier par le journal de droite Le Figaro, il appelle la France à «élever la voix face au massacre perpétré à Ghaza». Devenu célèbre sur le plan international après son fameux discours à l'ONU contre la guerre en Irak en 2003, M. de Villepin interpelle l'Etat français et critique, en termes forts, une position alignée. «Il est temps de mesurer l'impasse d'une France alignée et si sûre du recours à la force. Pour lever le voile des mensonges, des omissions et des demi-vérités. Pour porter un espoir de changement. Par mauvaise conscience, par intérêt mal compris, par soumission à la loi du plus fort, la voix de la France s'est tue, celle qui faisait parler le général de Gaulle au lendemain de la guerre des Six-Jours, celle qui faisait parler Jacques Chirac après la deuxième Intifadha», écrit l'ancien bras droit de Jacques Chirac, qui incarne l'une des rares voix politiques françaises qui attaquent de front la politique du gouvernement israélien. Il assène ses vérités : «Ayons le courage de dire une première vérité : il n'y a pas, en droit international, de droit à la sécurité qui implique en retour un droit à l'occupation et encore moins un droit au massacre. Il y a un droit à la paix, qui est le même pour tous les peuples. La sécurité, telle que la recherche aujourd'hui Israël, se fait contre la paix et contre le peuple palestinien.» Pour lui, l'Etat d'Israël, par sa politique guerrière, se condamne à devenir un Etat «ségrégationniste». Ce dernier refuse de présenter ce qui se passe à Ghaza comme un conflit qui oppose deux Etats. «Il ne saurait y avoir de responsabilité collective d'un peuple pour les agissements de certains. Comment oublier le profond déséquilibre de la situation qui oppose non deux Etats, mais un peuple sans terre et sans espoir à un Etat poussé par la peur ?», s'est-il indigné. Pourfendeur de la politique internationale à l'égard du conflit au Proche-Orient, M. de Villepin dresse un sévère réquisitoire contre la communauté internationale, incapable de résoudre un conflit qui dure : «Il n'y a pas non plus de partenaire sur la scène internationale, à force de lassitude et de résignation, à force de plans de paix enterrés. On s'interroge sur l'utilité du quartette. On désespère de la diplomatie du carnet de chèques de l'Europe qui se borne à payer pour reconstruire les bâtiments palestiniens qui ont été bombardés hier et le seront à nouveau demain, quand les Etats-Unis dépensent deux milliards de dollars par an pour financer les bombes qui détruisent ces bâtiments.» En l'absence d'un plan de paix viable, Dominique de Villepin appelle à des «mesures» capables de «changer la donne, susceptibles de réveiller les partenaires de leur torpeur et au premier chef la responsabilité de la France». Il propose entre autres, pour «réveiller la société israélienne», «les sanctions». Cela passe par un vote par le Conseil de sécurité de l'ONU d' «une résolution condamnant l'action d'Israël, son non-respect des résolutions antérieures, son non-respect du droit humanitaire et du droit de la guerre. Cela signifie concrètement d'assumer des sanctions économiques ciblées et graduées, notamment pour des activités directement liées aux opérations à Ghaza ou aux activités économiques dans les colonies».