La véritable paralysie qui caractérise le processus de paix au Proche-Orient ne peut avoir comme conséquences que des événements sanglants, tel le double attentat suicide, perpétré mardi par deux militants du Hamas, dans deux bus à Beersheva dans le sud d'Israël. L'attaque a causé la mort de 16 Israéliens et la blessure de près de 80 autres. Au moins sept des blessés sont dans un état grave. C'est l'attentat le plus sanglant enregistré en territoire israélien depuis l'assassinat du cheikh Ahmad Yassine et de son successeur à la tête du mouvement Hamas, Abdelaziz Al Rantissi. Dans un communiqué des Brigades Ezzeddine Al Qassam, la branche armée du Hamas, distribué dans la ville d'El Khalil au sud de la Cisjordanie, le mouvement radical palestinien a indiqué que cette attaque est venue en riposte à l'assassinat de ses deux chefs. L'armée israélienne a bloqué l'accès à cette ville d'où sont originaires les deux kamikazes. Selon la police israélienne, les deux bus ont explosé et pris feu à 15 secondes d'intervalle près d'un des principaux carrefours du centre de Beersheva. Située aux portes du désert du Néguev, cette ville se trouve à seulement 15 km de la Cisjordanie et à 40 km de la bande de Ghaza. Le dernier attentat d'ampleur en Israël remonte au 14 mars, dans la gare maritime d'Ashdod où 11 Israéliens avaient trouvé la mort, lorsque deux kamikazes, dissimulés dans un conteneur, ont réussi à s'y introduire. La communauté internationale, qui reste sourde et muette devant les atrocités israéliennes quasiment quotidiennes commises à l'encontre des Palestiniens de tout bord, a, comme prévu, fortement réagi. Par la voix du ministre néerlandais des Affaires étrangères, Ben Bot, l'Union européenne a appelé l'Autorité palestinienne à « non seulement condamner ces attentats mais aussi à prendre des mesures fermes contre les commanditaires de ces atrocités ». Le quai d'Orsay et la Maison-Blanche ont aussi vivement condamné cette attaque. Par la voix de son Premier ministre, Ahmad Qoreï, en visite en Egypte, l'Autorité palestinienne a aussi condamné l'attaque de Beersheva. « Tuer des civils, que ce soit côté palestinien ou israélien, ne mènera à rien si ce n'est à la haine et à plus d'hostilité. Voilà pourquoi nous condamnons fermement (ces attentats) », a déclaré Qoreï. Cet attentat risque de compliquer une situation déjà confuse. La riposte israélienne ne tardera sûrement pas à venir avec son lot de victimes parmi les innocents. Des maisons seront démolies et des terres seront dévastées, jusqu'au jour où un autre attentat viendra rappeler à l'occupant que l'oppression ne conduit qu'à des bains de sang et à plus de haine. Le Premier ministre israélien Ariel Sharon, qui tient plus que jamais à son plan de retrait unilatéral des colonies de peuplement juif de la bande de Ghaza et de quelques colonies isolées en Cisjordanie, risque de rencontrer plus de difficultés à le faire admettre au sein de son parti le Likoud et de son gouvernement. Peu avant les attentats, il avait présenté à son parti un plan détaillé de retrait de 21 colonies de la bande de Ghaza et de 4 colonies isolées de Cisjordanie dès le début 2005, soit huit mois avant la date initialement prévue, pour éviter d'éventuels affrontements avec les colons qui refusent catégoriquement de quitter les lieux. Sharon a expliqué qu'il demanderait le 14 septembre à son cabinet d'approuver les principes d'évacuation et de compensation des colons. Il a précisé qu'il soumettra le 16 septembre à ses ministres un projet de loi d'application du retrait, qui sera approuvé le 24 octobre. Enfin, la loi sera présentée au Parlement le 3 novembre pour l'un des trois votes nécessaires à son entrée en vigueur. Lors de cette présentation, le Premier ministre israélien a fait part de sa détermination aux membres de Likoud. « Vous connaissez mon point de vue sur la question », a-t-il déclaré. « Le plan de désengagement sera appliqué, un point c'est tout. » Sur un autre plan, les prisonniers palestiniens poursuivent avec détermination leur grève de la faim entamée depuis 19 jours. Les conditions inhumaines dans lesquelles ils vivent depuis de longues années n'ont jamais suscité l'indignation de quiconque... Et l'on parlera après de désespoir.