Pas moins de 14 militants des brigades Ezzeddine Al Qassam, la branche militaire du mouvement palestinien, Hamas, ont été tués hier à Ghaza. Plus de 30 personnes ont, en outre, été blessées lors du même raid, contre ce qui parait être un terrain d'entraînement du mouvement radical palestinien, non loin du quartier Alchedjaâyia à l'est de la ville. Le secteur ciblé est situé à moins de deux kilomètres de la ligne verte, frontière entre les territoires palestiniens et Israël. Au moins cinq missiles air-sol ont été lancés par des avions de combat israélien contre ce rassemblement, laissant peu de chances de survie à toute personne qui se trouvait dans le secteur lors de l'attaque. Les victimes ont été acheminées vers l'hôpital El Chifa. Des dizaines de citoyens ont participé aux efforts de sauvetage des blessés. Certains étaient tellement maculés de sang qu'ils donnaient l'impression de sortir d'un abattoir. Juste après l'arrivée dans son service, des morts et des blessés, le Dr Bakr Abou Safia, chef du service des urgences, où de grandes flaques de sang étaient encore visibles sur le sol, nous a déclaré : « Juste après minuit, les forces israéliennes ont, comme à leur habitude, commis un horrible massacre. Nous avons reçu des cadavres déchiquetés de 14 jeunes palestiniens, atteints par des éclats qui ont transpercé leurs corps, en différents endroits. Certains étaient même mutilés. Leur identification était difficile. Nous avons reçu par ailleurs plus de 30 blessés. 12 d'entre eux sont dans un état grave et nous essayons actuellement d'en sauver le maximum, dans les différents blocs opératoires de l'hôpital, où nos chirurgiens sont en train de les opérer. Notre hôpital est pourvu de moyens matériels et humains qui nous permettent de bien accomplir notre mission. L'expérience acquise durant les quatre années de cette intifadha nous permet d'agir vite et avec efficacité. Nous n'avons pas de problème avec la banque de sang, car nous nous attendons à être confronté à ce genre de situation, à toute heure. » Par la voix de son porte-parole, Mouchir El Masri, le Hamas a promis de venger ses morts. Ce raid est intervenu quelques jours après le double attentat suicide contre deux autobus dans la ville de Beersheva au sud d'Israël. Cette double attaque, revendiquée par le Hamas, avait causé la mort de 16 Israéliens. L'opération militaire israélienne de Ghaza, particulièrement sanglante, constitue en fait un message très clair du Premier ministre israelien, Ariel Sharon, aux Palestiniens en premier lieu et ensuite, à toute la communauté internationale. Il entend signifier qu'il n'y aura de solution à ce conflit que celle de la droite et de l'extrême droite sioniste qui n'a jamais reconnu l'existence du peuple palestinien et son droit à l'indépendance. Pour réaliser sa vision du règlement de la question palestinienne, Sharon poursuit une guerre totale contre le peuple palestinien, entamée depuis près de quatre ans déjà. 3300 Palestiniens ont été tués dont plus de 75% sont des civils (des femmes, des enfants et des personnes âgées). Des dizaines de milliers ont été atteints de blessures plus ou moins graves. Des milliers de maisons ont été démolies, des milliers d'hectares de terres agricoles ont été dévastés, spoliés et annexés, des dizaines de milliers d'arbres fruitiers et d'oliviers ont été déracinés et des centaines de kilomètres de routes ont été défoncées. Les usines, les ateliers, les écoles, les mosquées et les églises n'ont pas été épargnées aussi. La communaute internationale, qui multiplie actuellement les interventions comme au Darfour, est au contraire frappée de paralysie devant les atrocités que les Israéliens font subir aux Palestiniens depuis des dizaines d'années. D'ailleurs, ce dernier carnage a été perpétré quelques heures après le départ d'une delégation égyptienne conduite par le ministre des Affaires étrangères Ahmad Aboul Gheit en visite dans les territoires occupés. A l'issue d'une rencontre avec le président Arafat, le ministre égyptien avait annoncé la prochaine mise en œuvre d'une série de mesures en vue du retrait israélien de la bande de Ghaza. « Nous avons entendu les idées du président Arafat et des frères palestiniens et leur avons transmis l'appréciation du Caire sur le contexte régional et international et les moyens de mettre en œuvre une série de mesures dans un proche avenir », a déclaré Aboul Gheit. « Ces mesures font l'objet d'une coordination égypto-palestinienne et nous souhaitons que l'action palestinienne fasse l'objet d'une concertation entre les différents mouvements palestiniens », a ajouté le ministre égyptien. Des actions, tel le dernier massacre de Ghaza, qui visent à pousser les Palestiniens à accepter ce que Sharon et autres dirigeants israéliens veulent bien leur accorder, ne leur laissent au contraire qu'un seul choix, celui de la résistance, en espérant qu'un jour, la communauté internationale décidera enfin de mettre un terme à une injustice qui n'a que trop duré.