Pas de randonnées autorisées pour le moment dans la région de Tikjda. Les agences de voyages et les associations, qui ont l'habitude d'organiser des excursions, s'étonnent de la décision administrative prise après l'assassinat d'Hervé Gourdel. Sur instruction du wali de Bouira, il serait interdit, jusqu'à nouvel ordre, d'organiser des randonnées dans la station de Tikjda et ses environs. Même si l'information n'est pas encore officielle, plusieurs associations et agences de voyages sont inquiètes quant à l'organisation de leur activité dans la région après l'enlèvement dimanche puis l'assassinat mercredi d'un touriste français. «Suite à l'enlèvement du ressortissant français, j'ai appris aujourd'hui (mardi, ndlr) au niveau des collectivités locales, que le wali aurait pris la décision d'interdire les randonnées jusqu'à nouvel ordre», affirme le patron de l'agence de voyages Civisme et Tourisme, à Bouira. L'agence, qui en est à sa cinquième randonnée depuis quelques mois déjà et a l'habitude de rassembler plus de 200 personnes, dit avoir «suspendu ses activités» jusqu'au printemps prochain après l'événement de Tamgout survenu samedi dernier, quand un groupe terroriste s'est attaqué à des randonneurs sur les hauteurs de Bouira. Ils ont été fouillés avant d'être délestés de leur argent, de leurs téléphones portables et de leurs chaussures. «Je continuerai» Ce groupe de jeunes avait l'habitude d'organiser des parcours, chaque semaine, de Saharidj à Tizi Ouzou à travers la montagne du Djurdjura. Les terroristes avaient pris la fuite quand ils se sont aperçus que ces jeunes étaient divisés en groupes et tentaient de contacter les services de sécurité. Une opération qui a enregistré quelques blessés ayant chuté dans la rivière, en tentant de fuir. «Toujours selon les témoignages, les terroristes sont descendus sur le lieu où les excursionnistes étaient de passage pour manger et se promener. Sans aucune décision officielle des autorités locales, l'agence a décidé de suspendre les excursions pendant l'autonome et l'hiver. Nous n'avons pas le choix, nous devons seulement être vigilants», affirme encore le même responsable, qui a l'habitude d'organiser des randonnées jusqu'à atteindre le sommet de Lala Khedidja en passant par Saharidj. Selon lui, en trois mois, 300 personnes y ont fait des balades et y ont même passé la nuit sans qu'aucun incident n'ait été enregistré. Même son de cloche de la part du patron de l'agence les Compagnons du Djurdjura, qui affirme qu'il ne compte pas arrêter ses activités dans la mesure où elles sont organisées dans le but de protéger l'environnement. «Je continuerai sans même la permission des autorités militaires habilitées à délivrer des autorisations pour des randonnées dans la région.» D'ailleurs, nos deux interlocuteurs, étonnés par cet acte dans la mesure où les sites ouverts aux randonnées étaient sécurisés, affirment que même si la Gendarmerie nationale refuse de délivrer les autorisations ou temporise, les groupes de randonneurs n'attendront pas. Autorisation Une seule exception : lorsqu'il y a un visiteur de nationalité étrangère dans le groupe. «A ce moment-là, nous ne pouvons pas bouger sans l'autorisation et l'escorte des autorités militaires», affirment les responsables des agences de voyages. «Une fois, pour une urgence que je devais régler à l'hôtel de Tikjda, j'ai dû abandonner un groupe de Chinois pendant quelques minutes. Avant même que j'y arrive, les militaires, qui n'étaient pourtant pas visibles, m'ont interpellé, me donnant l'ordre de rebrousser chemin et ne pas laisser les randonneurs seuls», témoigne le patron de l'agence Assamar Tour. «Personnellement, ces derniers temps, je refuse d'inscrire des étrangers sur mes listes, en raison de l'insécurité. Nous devons accomplir plusieurs procédures.» Ne voulant pas sombrer dans la peur, le responsable d'Assamar Tour a décidé de continuer son activité sans les étrangers pour éviter «tout risque d'enlèvement». Il entamera, dès cette semaine, des négociations avec les autorités locales et militaires pour étudier la situation. «De toute façon, lorsqu'il s'agit d'un groupe d'Algériens, nous avons l'habitude d'organiser des randonnées sans les déclarer aux autorités militaires. Nous maintenons notre parcours la semaine prochaine, à Tikdjda, au lac Ighoulmène ; il faut 6 heures de marche pour y accéder.»