Un moment joie pour rompre avec un quotidien pas toujours facile. Le foyer pour orphelins de Mohammadia, à Alger, a été arraché à sa routine par une rencontre organisée par l'association Enfance abandonnée, qui œuvre pour une meilleure insertion sociale des enfants nés sous X. Une troupe d'animation et un clown ont passé l'après-midi dans le centre, lundi dernier. Accompagnés de quelques membres de l'association, de l'actrice Baya Rachedi et des moudjahidate Zoulikha Bekaddour, Fadila Mesli et Hafsa Bisker, la troupe a fait chanter et danser ces enfants. Le tout, à l'initiative de Wahiba, 47 ans, présidente de l'association, première Algérienne née sous X à avoir osé revendiquer, haut et fort, un statut pour les enfants abandonnés. «C'était un moment merveilleux et très chaleureux. Des moudjahidate ont fait le déplacement malgré leur âge avancé pour soutenir le combat de l'association», confie-t-elle. Wahiba a créé l'association en décembre 2013. Depuis, elle multiplie les déplacements pour organiser des rencontres, aider les enfants abandonnés et «faire bouger les mentalités». «Il y a beaucoup de stigmatisation, nous essayons de casser les tabous et faire parler de ces enfants de l'Algérie», souligne-t-elle. Avant cette rencontre au foyer des orphelins de Mohammadia, l'association avait organisé d'autres rendez-vous pour distribuer des cadeaux aux enfants. «Il a fallu faire des démarches administratives pour organiser cette rencontre, mais le directeur du centre, M. Chouguer, a été coopératif et très accueillant. Nous avons organisé d'autres rencontres à la pouponnière de Aïn Taya et dans des maternités de plusieurs hôpitaux». Et d'ajouter : «Pour les autres visites, nous avons eu l'honneur d'avoir d'autres moudjahidate avec nous, Zahia Khalfallah et Ghania Belgaid.» En Algérie, 3000 à 5000 enfants naissent chaque année hors mariage, selon les bilans de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem). D'autres associations estiment leur nombre à plus de 42 000 chaque année. Des chiffres en hausse. Sans statut, ces petits grandissent dans l'isolement ou dans le mensonge. A l'âge adulte, ils subissent la marginalisation et un conservatisme qui leur refuse le droit d'exister. Wahiba veut que sa vie «brisée», dit-elle, soit à présent mise au profit de tous ces enfants dérobés aux regards.