Une fois de plus, la diplomatie algérienne a été amenée à réagir à une campagne politico-médiatique marocaine musclée. Celle-ci a pris le prétexte d'un prétendu tir, à l'arme à feu par l'armée nationale, qui aurait blessé un ressortissant marocain posté de l'autre coté de la frontière le 18 octobre dernier. Il n'en fallait pas plus pour que le makhzen dégaine et sorte sa grosse artillerie contre l'Algérie. Le ministère des Affaires étrangères a réagi en expliquant que «l'Algérie n'est pas responsable des blessures qui ont été infligées à une personne marocaine de l'autre côté de la frontière». Mais pour Rabat, l'occasion était trop belle pour ne pas l'exploiter dans sa stratégie de tension permanente. Et c'est parce que la propagande haineuse du makhzen a largement dépassé les mesures que le chef de la diplomatie algérienne — pourtant très diplomate — a réagi hier, histoire de remettre le royaume à sa place. Pour Ramtane Lamamra, il s'agit bien d'une «mauvaise stratégie de la tension». «Le point de vue de l'Algérie (sur cet incident) a été dit et nous nous en tenons à cela. Le reste est une mauvaise stratégie de l'escalade, une mauvaise stratégie de la tension, une fuite en avant qui ne servent ni les intérêts bien compris de voisinage ni les intérêts d'aucun autre pays», a-t-il précisé, hier, au terme de ses entretiens avec le ministre des Affaires étrangères sénégalais, Mankeur Ndiaye. M. Lamamra ne pouvait choisir un meilleur timing pour une telle mise au point en présence du MAE du Sénégal qui, faut-il le préciser, est un fidèle allié du Maroc notamment du temps des Wade père et fils. M. Lamamra semblait ne pas vouloir polémiquer avec un voisin décidément très turbulent ces dernières semaines, du fait qu'il a perdu la maîtrise du dossier sahraoui aux Nations unies. «Je dirais simplement que l'Algérie a dit son mot sur cette question et je réitère cette position. L'Algérie n'est pas responsable des blessures qui ont été infligées à une personne marocaine de l'autre côté de la frontière», a simplement concédé le ministre des Affaires étrangères, visiblement scandalisé par ces outrances marocaines. Une réaction «excessive et malvenue» M. Lamamra, qui a toujours fait preuve de pondération à l'égard du royaume même au plus fort de l'agression du consulat d'Algérie à Casablanca il y a une année jour pour jour, (1er novembre 2013), a tenu cette fois à dénoncer cette «intense escalade verbale des hautes autorités marocaines» contre l'Algérie. Il ne comprend pas cette réaction «excessive» à un incident «insignifiant». Il en veut pour preuve cette «avalanche» de commentaires «extrêmement négatifs», «parfois malvenus» à l'égard de l'Algérie. Sans doute que le MAE a tenu à faire cette déclaration à la veille de la célébration du 60e anniversaire du déclenchement de la Révolution, pour raviver le jeune monarque. Ce fut le summum de la provocation du makhzen depuis la guerre des Sables en 1963. La mise au point de Ramtane Lamamra sonne quelque part comme un avertissement aux autorités marocaines de ne pas tenter le diable et rééditer l'odieuse provocation qui avait choqué le monde entier. Il n'est pourtant pas sûr que le makhzen, rompu aux intrigues, ne se fasse pas remarquer par un comportement antialgérien ne serait-ce que par une déclaration inopportune de son MAE qui fait de la haine de l'Algérie sa seule leçon d'apprentissage diplomatique, au même titre que son collaborateur à New York, le fameux Omar Hilale. Il faut rappeler que cette énième polémique algéro-marocaine est née d'un incident survenu le 18 octobre dernier, à la frontière entre les deux pays, quand des gardes-frontière algériens ont tiré deux coups de sommation en l'air face aux jets de pierre de contrebandiers marocains. Le makhzen a alors mis en branle une formidable mise en scène pour transformer l'incident en acte de guerre inventant des blessés côté marocain. Alger a réagi en dénonçant une présentation «fallacieuse» et une son exploitation politico-médiatique «abusive».