Le lieutenant-colonel Isaac Zida, le n°2 de la garde présidentielle, a néanmoins fini par obtenir, hier, le soutien de l'armée burkinabée. Les hauts gradés, réunis à l'état-major, ont en effet rapidement tranché en sa faveur. Il se disputait le pouvoir avec le chef d'état-major des armées, le général Nabéré Honoré Traoré, ce qui créait des dissensions dans l'armée. Le lieutenant-colonel Isaac Zida, le numéro 2 de la garde présidentielle du Burkina Faso, a annoncé hier avoir pris le pouvoir et promis une «transition démocratique apaisée». «J'assume à compter d'aujourd'hui (hier, ndlr) les fonctions de dirigeant de la transition et de chef d'Etat», a-t-il déclaré à la télévision burkinabée. Les principaux commandants de l'armée du Burkina Faso avaient déclaré pour leur part quelques heures auparavant qu'ils l'avaient désigné pour présider cette transition politique, dissipant ainsi l'incertitude qui régnait depuis la démission de Blaise Compaoré. Dans les faits, il n'est pas faux de dire que Isaac Zida a organisé un putsch contre le général Traoré, chef d'état-major de l'armée, qui avait pris le pouvoir au lendemain de la démission du président Blaise Compaoré. Vendredi après-midi, le chef d'état-major des armées, le général Nabéré Honoré Traoré, avait fait savoir dans un premier temps qu'il assumerait les «responsabilités de chef de l'Etat», alors que l'intérim aurait dû revenir au président de l'Assemblée nationale en cas de «vacance» du pouvoir. Cette annonce a néanmoins provoqué la colère dans les rues de Ougadougou, le général étant considéré comme un fidèle de Compaoré. Elle a eu aussi pour effet de diviser les militaires. Le colonel Isaac Zida, à la tête d'un groupe de jeunes officiers, se serait d'ailleurs opposé par la force au général Traoré. Une fois «plébiscité» par l'armée, le n°2 de la garde présidentielle a donc décidé dans un premier temps de suspendre la Constitution avant d'annoncer la fermeture des frontières terrestres et aériennes. Fort, dit-on, du «soutien d'importantes composantes de la société civile», dont le Balai citoyen, fer de lance de la contestation anti-Compaoré, Zida a également déclaré qu'il mettrait prochainement en place un nouvel «organe de transition» favorisant un «retour rapide» à l'ordre constitutionnel. Ces deux militaires qui prétendent à la succession de Compaoré ont supplanté un troisième homme, le général à la retraite Kouamé Lougué, pourtant favori de la population. A signaler que le calme est revenu à Ouagadougou hier, après les pillages de la semaine dernière. A l'appel du Mouvement citoyen, organisation de la société civile également opposée à Compaoré, des groupes de jeunes ont nettoyé les rues de la ville. Bobo Dioulasso, la deuxième ville du pays, également théâtre de pillages, a connu également un retour à la normale. La chute brutale de Compaoré a provoqué une onde de choc en Afrique qui a fait trembler de nombreux autres régimes autocrates. Le sort réservé au président burkinabé représente en bien des cas un avertissement pour les présidents de l'Afrique subsaharienne qui sont tentés, comme lui, de retoucher leur Constitution. Quatre pays (RDC, Burundi, CongoBrazzaville, Bénin) envisagent des révisions similaires. Feront-ils marche arrière ?