«L'homme résistait à toutes les formes de pression et refusait toutes les offres alléchantes destinées à lui faire abandonner son combat», témoigne son codétenu. C'est la clôture, la semaine dernière, de la fête de la citoyenneté de la ville d'Akbou, organisée en hommage à Mohamed Haroun, militant de la cause amazighe, dans les années 1970.Au programme des activités, qui se sont étalées sur deux jours, l'inauguration d'une stèle érigée à la mémoire du défunt, en présence de ses amis et d'une assistance nombreuse. La stèle, œuvre de l'artiste Hamid Aftis, diplômé de l'Ecole des beaux-arts, a été déposée temporairement devant le siège de l'APC, pour être transférée plus tard vers une place qui sera baptisée au nom du défunt. «La stèle sera déplacée vers une aire de stationnement située en face de l'hôpital, après l'avoir aménagée sur la place publique», affirme Salhi Mouloud, président de l'Etoile culturelle d'Akbou, association initiatrice de cet honorable hommage posthume. Les témoignages de ses codétenus à la prison de Lambèse, où ils avaient purgé onze ans de leur peine, initialement à perpétuité, étaient très émouvants et unanimes à saluer le courage exceptionnel du défunt. «L'homme résistait à toutes les formes de pression et refusait toutes les offres alléchantes destinées à lui faire abandonner son combat», ont-ils témoigné. M. Metref a évoqué les conditions de détention que Haroun n'a pas cessé de dénoncer, allant jusqu'à saisir les instances onusiennes des droits de l'homme. «Accusé par l'administration pénitentiaire d'être à l'origine de la lettre de dénonciation, sa réaction était de narguer ses geôliers et les impliquer», a témoigné son codétenu, en soulignant l'intelligence exceptionnelle de Haroun «qui aurait pu être un grand inventeur, s'il avait poursuivi ses études et mené sa vie paisiblement», a-t-il regretté. M. Cherifi, un autre compagnon du défunt, a souligné les sacrifices et le courage de l'homme intègre qu'il a connu dans les plus dures épreuves de sa vie avant que l'émotion ne lui coupe le souffle, les larmes aux yeux. Le recueil des témoignages était suivi d'une communication de Brahim Tazaghart, militant du Mouvement culturel berbère (MCB), auteur et éditeur, ayant pour thème «Mohamed Haroun, le pionnier visionnaire». Le conférencier a brièvement retracé l'histoire de la revendication berbère avant de rappeler le rôle de Haroun et ses recherches linguistiques. «Le regretté ne s'est pas contenté de la revendication culturelle et politique de la cause, mais il s'est engagé dans la recherche et la réflexion», a-t-il dit en vantant les recherches linguistiques et artistiques de Mohammed Haroun. En outre, une exposition d'associations activant dans différents domaines, culturel, social, médical…a été organisée à l'école Mouloud Feraoun. Mohamed Haroun, faut-il le rappeler, a été arrêté le 5 janvier 1976 et incarcéré à Lambèse, suite à l'affaire des poseurs de bombes, avec plusieurs de ses camarades, dont Smaïl Medjeber, Hocine Cheradi et Lounès Kaci. Ils étaient condamnés à perpétuité puis libérés et grâciés le 5 juillet 1987 à l'occasion du 25e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie. Il est décédé suite à un arrêt cardiaque survenu le 22 mai 1996 à Tifrit, son village natal, sis près de la ville d'Akbou.