Alors qu'aujourd'hui la France commémore l'Armistice de la fin de la Première Guerre mondiale, il convient de rappeler que de cette victoire contre l'armée allemande, la France est redevable à ses colonies. C'est cette participation des coloniaux – dont le contingent le plus important était constitué d'Algériens – à une guerre meurtrière, lourde en pertes humaines que rappelle le réalisateur et président de l'association Au nom de la Mémoire, dans un film documentaire, un livre et une exposition itinérante sous le titre Les Poilus d'ailleurs*. En août 1914, les premiers contingents de troupes coloniales arrivèrent massivement en France. Ils participèrent à toutes les batailles et offensives décisives, comme celle de la Marne en 1914, en Artois et en Champagne en 1915, sur la Somme en 1916, dans l'Aisne en 1917, dans la prise du fort de Douaumont qui marqua un tournant dans la bataille de Verdun, ainsi que dans la défense de Reims en mai-juin 1918». «Dans cette énumération, on oublie souvent l'armée d'Orient, majoritairement constituée de coloniaux qui combattirent, entre 1915 et 1918, aux Dardanelles et à Gallipoli», souligne Mehdi Lallaoui. Et de rappeler que dans ce premier conflit mondial, l'Afrique du Nord a fourni 300 000 soldats, dont la moitié d'Algériens. Au total, ce sont près de 600 000 à 700 000 hommes des colonies que la France fit venir des quatre coins de son empire. «Cent ans après la fin de la Grande Guerre, que reste-t-il dans notre mémoire collective de ces centaines de milliers d'hommes d'au-delà des mers, soumis pour la plupart au Code de l'indigénat qui en faisait des sujets et non des citoyens venus contribuer à la libération de la patrie ?» indique l'auteur. Non sans ajouter que les multiples initiatives, dans le cadre du centenaire de cette guerre, ont réservé une part infime aux ex-colonisés. «C'est pour que le temps n'occulte pas l'histoire de ces centaines de milliers de jeunes hommes que l'on fit venir de tous les continents et dont beaucoup, foudroyés dans leurs belles années, ont irrigué de leur sang les champs de bataille de notre pays», que Mehdi Lallaoui justifie ce travail de mémoire. Et de signaler que son propos vise «les valeurs de justice et de reconnaissance de la République dont n'ont pas bénéficié ces poilus d'ailleurs, morts pour la France. Cette France oublieuse des valeurs d'égalité promise aux combattants d'hier, cette France qui joua le temps pour ne pas indemniser comme il se devait les anciens combattants et les veuves de guerre. Cette France qui attendit le centenaire de la Grande Guerre pour enfin se souvenir, avec parcimonie, de la participation des indigènes…de son vaste empire colonial»... «‘‘La plus grande France'', pour reprendre une expression d'avant-guerre, est celle de tous ceux qui y vivent , mais à égalité de mémoire et d'histoire». Aussi, à ces hommes longtemps oubliés de la Grande Guerre… «nous, citoyens du XXIe siècle, construits et élevés sur la mémoire de nos anciens, nous leur devons, non pas des guirlandes de médailles et de citations posthumes, mais le respect. Simplement le respect».