En quelques jours, la délégation de l'Union européenne, venue «écouter» les différents partis politiques en Algérie, a suscité des réactions controversées. Entre le FLN qui crie à l'ingérence et les partis de l'opposition qui transmettent leurs doléances, les membres de la délégation tentent de trouver les mots qu'il faut. «Nous sommes venus écouter», disent-ils publiquement. Mais qu'en est-il au juste ? «Nous sommes ici essentiellement pour écouter nos interlocuteurs politiques légitimes, qui prônent l'activité politique pacifique. Nous n'avons pas de parti pris, des solutions à donner, des alternatives ou des revendications à présenter», s'est en effet défendu Marek Skolil, ambassadeur de l'Union européenne à Alger, lorsque la question de l'ingérence dans les affaires intérieures du pays s'est posée. Du côté des partis politiques qui ont rencontré la délégation, les émissaires de l'Union européenne n'ont transmis aucun discours particulier. «Ils disent qu'ils sont venus écouter. Ils n'ont rien dit de particulier», explique Soufiane Djilali, président de Jil Jadid, qui a assisté à la rencontre entre la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD). Mais selon l'homme politique, les représentants de l'Union européenne sont obligés de se défendre, à propos notamment de l'observation de la dernière élection présidentielle. Aux partis algériens qui ont fait remarquer que l'UE avait justifié l'absence d'observateurs européens par le manque de temps, les Européens ont répliqué : «C'est juste une manière diplomatique qui consiste à faire comprendre aux autorités algériennes qu'elles n'ont pas suivi les recommandations contenues dans le rapport portant sur les élections législatives de 2012.» Pour Soufiane Djilali, l'ingérence dans les affaires intérieures de l'Algérie existe depuis que les Européens «soutiennent le régime» et Abdelaziz Bouteflika. «C'est une forme d'ingérence que nous refusons», dit-il. Le même témoignage est fait par Noureddine Bahbouh. Le président de l'Union démocratique et sociale (UDS), qui était aux côtés de Ali Benflis lors de la rencontre avec la délégation de l'UE, indique que celle-ci «est venue juste pour écouter». Mais derrière cette visite, qui entre dans le cadre de l'évaluation de l'accord d'association, l'Union européenne veut «transmettre un message qui signifie au pouvoir que l'Algérie n'est pas que Bouteflika», explique M. Djilali. Tout comme Noureddine Bahbouh, le président de Jil Jadid pense que les Européens commencent à s'inquiéter de «la situation du pays». «Ils (les Européens) se sont rendu compte qu'ils n'ont plus de vis-à-vis depuis qu'il y a vacance de pouvoir dans le pays», ajoute Soufiane Djilali. L'agenda de la délégation de l'Union européenne n'est pas achevé. En plus des partis politiques, l'équipe que dirige Bernard Savage, chef de la division Maghreb du service européen pour l'action extérieure, rencontrera dès dimanche d'autres partis et personnalités. Juste pour «écouter» ?