Le FFS poursuit ses consultations avec des partis et des acteurs de la société civile pour mobiliser autour de sa conférence nationale de consensus. Le parti évaluera prochainement ses activités, selon son premier secrétaire. -Avez-vous un commentaire à faire sur le dernier message du président Bouteflika cette semaine, où il évoque la révision constitutionnelle et sur le fait que les autorités maintiennent leur propre agenda ? Nous n'avons pas de commentaire à faire pour le moment. Nous sommes inscrits dans une démarche de consensus dans laquelle on persévère, nous avons notre propre agenda. Nous avons un rôle de facilitateur et nous continuons à espérer pouvoir ramener tout le monde autour de notre initiative qui est la seule issue pour l'Algérie aujourd'hui. -Est-ce que l'idée du consensus a évolué suite à vos rencontres avec des partis et des personnalités politiques, lors de vos sorties sur le terrain à la rencontre des citoyens ? Oui, nous sommes à l'écoute de tout le monde, et je rappelle que le FFS n'a posé aucun préalable à sa démarche de dialogue. Notre stratégie et notre méthodologie sont d'intégrer toutes les idées intéressantes dans la démarche du consensus. Nous avons un agenda très chargé pour rencontrer le maximum de partis, d'associations, de syndicats, etc. Il y a des échos très favorables et nous pensons que nous avons déjà fait un pas vers le consensus. L'idée du consensus fait son chemin, que ce soit chez les états-majors politiques ou au sein de la population à travers notre campagne de vulgarisation et de proximité à l'échelle nationale menée par une quinzaine de fédérations du parti sur le terrain. D'ailleurs, très prochainement, il va y avoir une réunion du FFS pour évaluer nos activités, évaluation qui sera, bien sûr, rendue publique. -Le FFS insiste beaucoup sur la notion du changement pacifique, et c'est d'ailleurs ce que vous citez quand le parti évoque les avis émanant de la société. Cela ne cacherait-il pas une inquiétude chez les Algériens par rapport à une situation de crise politique ? Notre rôle, en tant que parti, est de donner espoir, sans mentir aux Algériens bien sûr. Je préfère ne pas parler de peur, même si la société garde des séquelles des années 1990 et personne ne veut retomber dans cette situation-là. Il ne faut pas utiliser ces traumatismes, il faut dégager ce qui est positif et convaincre d'abord les Algériens. Et sans la société, toute initiative est vouée à l'échec. Le diagnostic est connu par tout le monde, les Algériens ne veulent pas que leur pays reste dans la situation actuelle, il y a donc un consensus autour de la nécessité du changement, même s'il y a des divergences concernant les moyens d'y arriver. L'acquis le plus important que nous avons réalisé à travers nos consultations est de dialoguer avec tout le monde et de réhabiliter le politique. Nous avons tiré des leçons des expériences passées et nous savons que l'objectif est de construire un Etat de droit, avec séparation des pouvoirs et garantie des libertés et de la justice sociale. Nous en sommes à la première étape, et même la conférence nationale du consensus, dont la date et le lieu seront fixés conjointement avec tous nos partenaires, ne sera qu'une étape. Mais nous ne sommes pas pressés, ce n'est pas une course. Il faut d'abord convaincre nos partenaires et surtout la société du bien- fondé de notre démarche. On a vu ce que la précipitation a causé depuis au moins 1989. -Quand le FFS parle de la situation actuelle qui ne peut perdurer, est-ce que vous parlez du président de la République, du pouvoir, du système politique en général ? Notre démarche est de parler de l'état de l'Algérie en général, nous en avons fait le bilan… Notre démarche s'inscrit au-delà des personnes. Nous avons nos propres propositions qu'on ne peut dévoiler pour le moment en attendant la conférence nationale de consensus. -Comment pouvez-vous construire un consensus national alors qu'une partie de l'opposition, la CNTLD qui appelle à la présidentielle anticipée, s'oppose à votre démarche ? Au FFS, on ne perçoit pas cela comme une opposition à notre démarche. Ce n'est pas un rejet frontal de notre point de vue. Personne ne détient seul la vérité, chacun en a une partie. Nous devons garder les portes du dialogue ouvertes avec tout le monde, il y a parfois des incompréhensions, mais cela peut positivement évoluer. Car tout ce qui est frontal est improductif. S'ils disent qu'ils ne sont pas concernés par notre démarche, ce n'est pas grave, car cela peut évoluer et nos amis feront des efforts vu l'importance de l'enjeu et au regard de l'intérêt suprême de la nation. Nous sommes le principal parti de l'opposition, mais nous ne nous targuons pas d'être les seuls à trouver des solutions ou d'en imposer et nous ne faisons la morale à personne. Nous sommes à la recherche d'un dialogue permanent. Une fois qu'on entamera le travail politique dans le cadre de la conférence, tout sera possible dès lors. Notre différence avec les autres partis est que nous avons dit, et depuis le début, qu'il faut avancer avec le pouvoir, car il est impossible d'arriver à un changement graduel et apaisé sans le pouvoir. Les élections n'ont jamais rien réglé, hier comme aujourd'hui, il faudrait plutôt persévérer dans notre démarche de sensibilisation des Algériens, avec nos partenaires politiques, sur l'idée du consensus. Et les portes restent toujours ouvertes et on doit rester à l'écoute de tout le monde. Nous ne jugerons de la sincérité des uns et des autres que sur la base de leurs actions concrètes. Chaque parti et chaque personnalité politique ont des ambitions, c'est normal, mais il nous faut faire taire nos ego pour aboutir au consensus et éviter les surenchères. -Quand vous dites que toute solution ne peut se réaliser sans le pouvoir, où situez-vous l'armée dans cette vision ? A-t-elle un rôle à jouer comme le préconise par exemple Mouloud Hamrouche ? Chaque chose en son temps. Dans un premier temps, nous devons arriver à rassembler les acteurs politiques. Et éventuellement l'armée, car on souhaite qu'il y ait une armée républicaine qui adhère à ses missions constitutionnelles. Nous pensons que tout le monde doit jouer un rôle, mais la priorité aujourd'hui c'est de s'adresser à la société civile et aux partis pour se regrouper autour d'un projet qui sera porteur pour le pays. -Vous vous montrez souple même avec vos détracteurs. Comment contourner le fait que les partis du pouvoir, comme le FLN avec lequel vous avez discuté, établissent la légitimité du Président comme ligne rouge ? Il y a des préalables de part et d'autre, mais nous pensons faire évoluer les choses avec tous les acteurs politiques. Chaque parti a le droit de s'exprimer en tant que formation partisane, même s'il y a des incompréhensions. Notre démarche est claire : le jour J, chacun viendra à la conférence avec ses propositions et en dialoguant, les lignes peuvent bouger. Parce que, à un moment donné, chacun doit assumer ses responsabilités. -Le FFS dit : «Oubliez moi comme parti», car il veut apporter une solution avec tous les autres partenaires. Cela veut-il dire que vous avez mis entre parenthèses les grandes lignes du parti, comme par exemple la revendication d'une Assemblée constituante ? Nous n'allons pas rester dans ce rôle, nous redeviendrons nous-mêmes. Jamais les fondamentaux du FFS ne seront remis en cause. Nous ne renions rien. Mais nous ne soumettrons notre propre proposition en tant que parti FFS que le jour de la conférence nationale de consensus. Concernant la démarche consensuelle que nous prônons, nous nous en tenons à la retenue pour le moment. En parallèle, nous réagissons à ce qui se passe dans le pays en tant que parti. -Vous restez prudent sur les contours de vos propositions, mais peut-on savoir quels en sont l'essence, le profilage général ? La finalité de notre projet n'est pas de partager le gâteau, mais de revenir au peuple. Il faut mettre la démocratie à la disposition du peuple et non pas sous tutelle. C'est le plus important à nos yeux.