Les moins de 20 ans ne connaissent pas achewiq, chant ancestral des femmes kabyles. Pourtant, ce sont des jeunes, dont l'âge n'excède pas la trentaine, qui ont décidé d'organiser un hommage aux femmes qui ont pu résister à la société sclérosée de leur temps, en faisant entendre leur voix. Dans tous les sens du terme. Des étudiants de l'Ecole de journalisme et des sciences de l'information (ENSJSI) ont, en effet, organisé un après-midi festif où furent évoqués ce genre musical et ses adeptes. Parmi les invités venus parler de leurs parcours, figuraient Djida Tamechtouht, qui a côtoyé les plus grandes voix de ce genre musical, telles que Cherifa et Hnifa, mais aussi des artistes plus jeunes, Djamel Kaloun et Amel Zen. La spécialiste du genre, Khadidja Djama, voix très appréciée des auditeurs de la radio Chaîne II, était aussi de la partie. Elle a évoqué doctement le parcours de ces femmes kabyles qui ont perpétué, sans trop se soucier des qu'en-dira-t-on, ce chant traditionnel. Sous la houlette de leur enseignant, Khaled Lalaoui, lui-même féru de musiques du terroir, Yacine Bellik, Kamylia Harouni, Ferka Ouardia et Yagoub Meriem, inscrits au Master 2 dans le cadre d'un module intitulé Socio-culturel, ont projeté au début de la rencontre un court reportage où il est dit en substance que achewiq (littéralement prélude) est l'«apanage» des femmes kabyles qui exprimaient par des textes simples, quelquefois sans accompagnement musical, leurs joies et leurs peines. Les temps n'étaient pas faciles pour ces femmes qui ont décidé d'affronter les leurs, mais pas seulement. Parmi les figures qui ont su «universaliser» ce genre, il est impossible de ne pas citer Taous Amrouche, dont la voix a empli l'auditorium de l'école. La cantatrice, écrivaine issue d'une famille de lettrés (Fadhma sa mère, mais aussi Jean El Mouhoub), n'a pas seulement affronté le milieu où elle vivait, mais aussi les institutions qui voulaient réduire au silence une voix contestataire. Elle était interdite de scène lors du Panaf de 1969. Le mode d'expression des femmes kabyles est identique à celui interprété à Ghardaïa (Izlem), à Tamanrasset (Ahellil), à Sétif (Sraoui) ou encore à Tipasa et le mont Chenoua (Daynen). Intervenant à la fin pour remettre des trophées aux participants, le professeur M. Benzaoui, directeur de l'ENSJSI, rappelle les valeurs que s'efforce d'ancrer son établissement, à savoir partage et altérité. L'école de l'ex-ITFC organisera, demain, une rencontre sur le texte humoristique engagé. Un hommage sera rendu à Mahieddine Bachtarzi, né un 15 décembre 1897.