Le ministre des Affaires étrangères, Salaheddine Mezouar, a tenu un discours pour le moins radical, dimanche à Dakhla (territoire occupé) contre l'Algérie, redoutant l'examen annuel au Conseil de sécurité de l'ONU sur la question du Sahara occidental. Signe de cet emballement quasi guerrier, son ministre des Affaires étrangères, Salaheddine Mezouar, tirant décidemment plus vite que son ombre, a tenu un discours pour le moins radical dimanche à Dakhla. Profitant d'une réunion organique de son parti, le Rassemblement national des indépendants (RNI), Mezouar n'a pas hésité à enfiler le costume du diplomate (plutôt l'uniforme de guerrier) pour menacer les «voisins» et les «séparatistes de Tindouf». Les «voisins» ce sont évidemment les Algériens que le porte-voix du roi met en garde contre «l'absence de réactivité aux propositions marocaines visant à mettre fin au conflit du Sahara, via le plan d'autonomie». La croisade de Mezouar Le MAE marocain s'est appuyé, dans son discours, sur la «position ferme de Sa Majesté qui a récemment souligné que tout changement dans l'approche du règlement de ce dossier (sahraoui) trouvera en face une réaction marocaine de la même ampleur que la menace». Décodé, Rabat craint que l'examen annuel de la question sahraoui, qui interviendra en avril prochain, ne débouche sur une résolution contraignante qui s'écarte du fameux plan d'autonomie. En l'occurrence, et dans l'état actuel des négociations, il paraît presque logique que le Conseil de sécurité adopte le principe d'un élargissement du mandat de la Minurso à la surveillance des droits de l'homme, voire la fixation d'un nouvel agenda pour l'organisation d'un référendum d'autodétermination du peuple sahraoui. Une perspective cauchemardesque que le royaume ne veut même pas imaginer, quitte à tenter le diable comme le suggèrent le discours «hard» de Salaheddine Mezouar et d'autres déclarations haineuses du makhzen. Le fait est que le chef de la diplomatie marocaine a évoqué, à Dakhla, des «manigances» de l'Algérie et du Polisario. L'enjeu étant d'amener le Conseil de sécurité à adopter une position paramétrée sur les résolutions pertinentes des Nations unies et dans le respect de la légalité internationale, qui souligne expressément le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination. Mais le Maroc ne l'entend pas de cette oreille. Le grand déballage de documents officiels «confidentiels» par le «WikiLeaks marocain», sous le pseudonyme de Chris Coleman, montre et démontre la panique qui s'est emparée du makhzen. Le fait est que et qu'il accuse même l'envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU, Christopher Ross de «rouler» pour le Polisario. Dans un communiqué rendu public en avril dernier, Mohammed VI avait mis en garde l'ONU contre des «approches partiales» ainsi que des «options périlleuses». Il répondait à Ban Ki-moon qui, dans son rapport, avait souligné la nécessité de surveiller de manière «durable, indépendante et impartiale» le respect des droits de l'homme au Sahara occidental. Autrement dit, il s'agit d'une caution nette et précise pour un élargissement du mandat de la Minurso. Avril, le mois de tousles périls Depuis, c'est pratiquement l'impasse entre l'ONU et Rabat. Christopher Ross, devant rédiger un rapport à présenter devant le Conseil de sécurité en avril prochain, est déclaré persona non grata au Maroc et dans les territoires occupés. De même que la nouvelle responsable de la Minurso, la diplomate canadienne Kim Bolduc, qui devait prendre ses fonctions à El Ayoun en septembre dernier, est bloquée par Rabat. L'impasse diplomatique est donc intégrale, sur fond d'une vague de froid glacial entre Washington et Rabat tant les Américains ne goûtent pas l'attitude du makhzen vis-à-vis de leur diplomate, Christopher Ross. C'est dire, une fois n'est pas coutume, que le royaume se retrouve dans une posture bien délicate au regard de la communauté internationale, qui prend de plus en plus conscience des souffrances du peuple sahraoui. La tension permanente adoptée vis-à-vis de l'Algérie depuis plus d'une année, ponctuée par quelques piques jamais égalées depuis la guerre des sables et les attentats de Marrakech, participe de cette stratégie offensive visant à bilatéraliser le conflit. Le point d'orgue aura été l'arrachage du drapeau algérien au fronton du consulat, à Casablanca, par un nervi de la cour, le 1er novembre 2013. Sans trop de succès cependant, face à une diplomatie algérienne certes moins bruyante, mais terriblement percutante. Les dernières saillies de Salaheddine Mezouar et, avant elles, les prétentions territoriales (Béchar et Tindouf) du sulfureux Hamid Chebat visent le même objectif : s'acharner sur un voisin qui empêche le royaume de «coloniser en rond». Un journal électronique marocain ose même ce titre explosif : «Le Maroc et l'Algérie préparent-ils la guerre ?» C'est dire…