Implantée dans vingt-huit (28) wilayas et représentant près de 4000 adhérents, l'association professionnelle solidarité des pharmaciens (ASPO) menace de recourir à la grève pour contester l'arrêté du ministère de la santé portant sur les modalités de garde mais obligeant par la même occasion les officines à fermer à 19 heures. Chronologie des faits: le 20 août dernier, un arrêté a été promulgué pour fixer les modalités d'organisation de la garde au niveau des officines pharmaceutiques. Le 7 décembre, le syndicat national des pharmaciens d'officines (SNAPO) a appelé au gel de l'arrêté en invoquant prioritairement les conditions de sécurité qui ne sont pas réunies partout. Le 13 décembre, fait spécifique à Oran, une rencontre regroupant près de 200 pharmaciens avec la direction de la Santé, la section locale du syndicat ainsi que le conseil de l'ordre a approuvé le contenu de la décision ministérielle. Hier, samedi 27 décembre, face à l'urgence car les délais d'application sont proches (1er janvier 2015), l'association a convoqué une conférence de presse pour réitérer sa position de protestation. Selon Dr Houda Maaziz, présidente de l'ASPO, un courrier a été envoyé, de manière informative, à toutes les instances concernées pour expliquer les raisons qui rendent difficile l'application de ces dispositions. «Nous sommes avec la loi et c'est pour cela que nous opposons à cet arrêté une véritable loi du ministère du travail (90-11 du 21 avril 1990 relative aux relations de travail modifiée et complétée le 11 janvier 1997) qui stipule, dans son article 29, qu'il est interdit à l'employeur de recourir au personnel féminin pendant les travaux de nuit». «Or, rappelle-t-elle, selon les statistiques officielles, 80% du personnel pharmaceutique est féminin». En dehors de cet aspect lié au genre, le facteur sécuritaire est l'un des arguments sur lequel se base l'association mais aussi le syndicat pour dénoncer le contenu de l'arrêté ministériel. Installés dans des zones ou quartiers à risques, les pharmaciens redoutent l'ouverture de nuit à cause de la caisse mais aussi des psychotropes qui peuvent attirer les délinquants ou les drogués. «Je gère ma pharmacie située à Saint Pierre avec mon épouse et je vous le dis tout de suite : je ne vais jamais ouvrir le soir quelles que soient les conséquences prévues par cet arrêté», s'insurge un protestataire présent à la Conférence. Le concept de garde existe déjà à Oran avec des pharmacies connues qui travaillent h/24 car ayant plus de moyens (en finances ou en personnel pour assurer eux-mêmes la sécurité) ou situées dans des zones moins risquées. «Les installations sont couteuses et il ne faut pas nous comparer avec les médecins de garde qui eux travaillent dans des structures d'Etat», disent les pharmaciens mécontents qui estiment que les malades seront les premiers à souffrir de l'application de ces dispositions car, passé 19 heures, ils ne trouveront plus de pharmacies proches de leur lieu de résidence. Mais ce qui les inquiète également, c'est l'obligation de mettre au chômage les employés recrutés pour assurer le service de nuit. Le secteur enregistre 9827 pharmacies à l'échelle nationale et 628 à Oran. «A supposer que chacune n'emploie que 2 personnes en moyenne le soir, ce sont près de 20 000 employés qui se retrouveront au chômage du jour au lendemain», ajoute la présidente de l'ASPO qui estime que la priorité pour le ministère devrait être de faire en sorte que, tout en renforçant la production sur le territoire national, toute la gamme des médicaments soit disponible en Algérie où on enregistre malheureusement encore des ruptures de stocks.