La France a été frappée de plein fouet, hier matin, par l'attentat terroriste le plus meurtrier de son histoire dont a été la cible le journal satirique Charlie Hebdo, décimant sa rédaction – au moins 12 morts, 10 journalistes et dessinateurs parmi lesquels Cabu, Wolinsky, Tignous et Charb, 2 policiers et 4 blessés en urgence absolue, selon un bilan provisoire. C'est un symbole fort de la démocratie et une valeur fondatrice de la République française qui ont été ciblés : la liberté d'expression. L'attentat sanglant – un véritable carnage – contre Charlie Hebdo «est un attentat terroriste, cela ne fait aucun doute», a affirmé le président Hollande, qui s'est rendu sur place aussitôt la nouvelle connue. Quelles que soient leur identité et leur appartenance, les auteurs de cet acte effroyable sont de véritables assassins de l'esprit et de la liberté de pensée. La journaliste et l'Algérienne que je suis et qui a perdu de nombreux collègues et amis assassinés par le terrorisme pendant la décennie noire parce qu'ils étaient journalistes, écrivains et artistes libres, ne peut que s'élever contre ce crime contre la liberté de penser, d'écrire, de dire. Des moyens légaux existent pour dénoncer et exprimer son mécontentement contre des écrits, des caricatures, des images jugés diffamants, insultants vis-à-vis d'une religion, d'une communauté. L'attentat n'a pas été revendiqué, mais les soupçons se portent sur des extrémistes islamistes. Il reste que ceux qui se revendiquent et assassinent au nom de l'islam, où qu'ils soient, font le plus grand mal aux véritables musulmans qui vivent et ne demandent qu'à vivre pacifiquement et paisiblement, que ce soit dans leur pays d'origine ou dans une société à laquelle ils ne demandent qu'à s'intégrer et à être acceptés, qu'à pratiquer leur religion dans la sérénité et la dignité. Comme c'est le cas des millions de musulmans en France. La crainte d'amalgame entre une poignée d'extrémistes fanatisés et la majorité d'une communauté stigmatisée par des discours xénophobes, malmenée dans sa croyance et sa pratique, est légitime et justifiée. L'islamophobie, de plus en plus exacerbée, fait mal et est dommageable au vivre-ensemble et à la cohésion sociale. Quand François Hollande en appelle à l'unité nationale, c'est pour mettre en garde contre les risques de déchirure de la société française en prise avec un malaise identitaire certain et un rejet avéré de l'islam et des musulmans par une partie de la société. «Devant les menaces qui montent et qui inquiètent, qui s'appellent terrorisme, communautarisme, fondamentalisme, ce n'est pas en nous divisant, en stigmatisant une religion, en cédant à la peur que nous nous protégerons, c'est en défendant fermement nos règles communes : la laïcité, l'ordre républicain, la sécurité des personnes, la dignité de la femme», déclarait-il dans son message de vœux aux Français le 31 décembre dernier.