Hier soir à In Salah. La mobilisation est restée la même. La détermination n'a pas baissé. Le sit-in permanent est maintenu devant la daïra. Les tentes se sont multipliées, les manifestants aussi. Aucun émissaire de la Présidence n'est arrivé, l'annonce d'un talk-show télévisé de Sellal est reçue avec tiédeur. «La population sait exactement où elle en est. Le stade du gouvernement a été dépassé le jour où la Présidence a envoyé le général-major Hamel à In Salah. Nous savons que Sellal ne nous dira rien de nouveau et que la décision positive, favorable à notre combat, à notre revendication unique, ne sera que présidentielle», indique Taleb Ali, membre du comité de coordination du mouvement anti-gaz de schiste. Et au moment où In Salah reste dans l'expectative d'une décision imminente de la présidence de la République, avec une population campant sur sa position et qui attend non pas un message télévisé du Premier ministre, mais un envoyé spécial de la Présidence, «Abdelgahni Hamel en chair et en os, comme il l'a promis il y a trois jours», affirme un autre délégué du comité de pilotage. Manifs non-stop Quelle que soit la décision qui sera annoncée par les autorités du pays, de nouvelles marches sont simultanément programmées aujourd'hui à Ouargla, Adrar et Batna. Tindouf a rejoint, hier, les villes du Sud solidaires du mouvement anti-gaz de schiste. A In Salah, le grand ârch des M'rabtine a convié, demain soir, toute la population de la ville à une «sadga», un grand repas collectif qui signera à jamais le pacte de l'unité d'In Salah au ksar des M'rabtine. Les autorités ont demandé un apaisement de la population dans l'expectative de l'annonce officielle de cette décision qui se fait désirer. L'ambiance est encore à l'attente. «On espère que cela se fera vite, notre conviction est faite, le Président tranchera en notre faveur.» Pendant ce temps, Ouargla est en effervescence. Les chômeurs ont bloqué quelques axes à Hassi Messaoud, ils ont réclamé le départ du chef d'agence de l'ANEM de l'APW, avant de comprendre que l'heure est grave, que la mobilisation a outrepassé l'emploi vers un autre échelon, celui de la préservation de l'eau, de l'air et du sol, de la santé, de l'environnement, de l'avenir du Sahara et des générations futures. La marche annoncée la semaine dernière aura bien lieu. C'est le troisième rassemblement populaire depuis le début de la protestation anti-gaz de schiste à In Salah. Le collectif du front populaire s'opposant à l'exploitation du gaz de schiste dans le Sahara algérien a donc maintenu son plan d'action malgré l'annonce d'une décision imminente de la Présidence en faveur de la population d'In Salah. Les animateurs du mouvement ont lancé une quête pour financer la journée de protestation qui se tiendra sur la place Rose des sables. Ce nouveau rassemblement aura pour principal slogan «Non au gel de l'extraction du gaz de schiste, Oui pour l'annulation définitive des forages». Le collectif a, par ailleurs, rendu public un communiqué dénonçant les accusations de certains chefs de parti envers les opposants au projet du gaz de schiste. «Comme d'habitude, certains se sont tapis pendant trois semaines avant de nous qualifier de traîtres. Nous visons le personnel politique aux mains sales, ceux qui ont dilapidé les biens publics», accuse à son tour le communiqué cosigné par huit délégués d'associations de la société civile de Ouargla, qui décrient «une diabolisation du mouvement citoyen émanant du sud du pays par ceux qui profitent de la conjoncture politique et économique du pays et de la vacance du pouvoir pour mieux instaurer celui de la corruption et de la cupidité». Les signataires considèrent que «le front social et la solidarité de la société civile sont l'ultime recours de la nation algérienne», ils estiment que la vraie leçon à retenir de cette détermination d'In Salah devant les dangers écologiques et sanitaires du gaz de schiste est qu'«une frange du peuple nous a ouvert les yeux sur le pouvoir d'une société civile organisée et déterminée, unie contre le chaos brandi par les uns, parce qu'elle a compris qu'elle se devait de dépasser les inepties des politiques, des administratifs et des charognards à la fois».