Le front anti-gaz de schiste s'élargit. Une manifestation d'un million de personnes se prépare dans six wilayas du Sud et du Grand-Sud, dont trois concernées directement par le projet gouvernemental d'extraction du gaz de schiste, prévoyant le forage de 200 puits par an pour produire 20 milliards de mètres cubes de gaz annuellement pour les 20 prochaines années, ainsi que confirmé dimanche par Saïd Sahnoune, PDG par intérim de Sonatrach. Les déclarations de M. Sahnoune ont eu l'effet d'une bombe auprès des populations du Sud. Au moment où les protestataires d'In Salah dénoncent le fait que les forages sont maintenus à l'heure où la protestation prend de l'ampleur, que les rangs du camp anti-gaz de schiste grossissent, que de nouveaux villages, villes et wilayas se joignent à la protestation, Sonatrach continue à appliquer son programme à Dar Lahmar, non pas à 200 km d'In Salah mais à seulement 28 km de cette ville de 40 000 âmes et à 25 km d'El Barka, dont une habitante s'étonne que l'on dise que «les puits de gaz de schiste sont dans le bassin d'Ahnet, une zone déserte, inhabitée, alors que je vois les sondes de ma fenêtre» ! Pendant qu'une «milyounia» – en fait une série de rassemblements simultanés programmés demain à Ouargla, Tamanrasset, Adrar, Ghardaïa, Laghouat et Biskra – se prépare, In Salah restructure ses rangs. Entre ceux qui ont opté pour la reprise de l'école et ceux qui prônent la paralysie générale, la voix des sages a tranché en faveur de la démocratie, à savoir la souplesse et la libre décision. Sitôt connue, cette règle de conduite a donné lieu à une manifestation des écoliers, hier matin, dans les rues d'In Salah. La population exige l'arrêt de l'exploitation du puits Une centaine de véhicules sont arrivés lundi soir de Foggaret Ezzoua (40 km d'In Salah) dont les habitants en avaient assez de manifester seuls chez eux ; ils ont donc dressé leurs tentes sur l'esplanade de la daïra d'In Salah où la foule était plus nombreuse, hier, au sit-in quotidien. Annoncée par Abdelkader Zizah, le médecin de la ville, via les réseaux sociaux, l'information concernant une décision du président Bouteflika d'arrêter les forages a secoué l'assistance pendant une bonne heure. C'est d'ailleurs pour cette raison que les manifestants ont convoqué un conseil extraordinaire vers 17h, pour informer les autorités du maintien de la protestation jusqu'à l'officialisation d'une éventuelle décision de la Présidence. Entre-temps, la société civile d'In Salah a confié à une délégation de six personnes la mission de rencontrer l'émissaire du président Bouteflika, attendu dans les prochaines heures. Parmi eux un cardiologue, un médecin généraliste, un financier, un géologue, un chimiste et un spécialiste de l'environnement. Ces délégués sont chargés d'une seule prérogative : convaincre l'envoyé spécial du point de vue de la population, à savoir l'arrêt de l'exploration et le nettoyage du site de Dar Lahmar, en attendant une concertation nationale.