Après un début d'année en fanfare avec l'organisation d'une multitude d'activités culturelles, le Centre culturel français (CCF) de Annaba devrait poursuivre son programme d'animation tout au long de ce dernier trimestre. Marcel Tavet son directeur a gardé en réserve quelques bonnes surprises. Avant la fin de l'année, il y aura beaucoup de soirées artistiques telles que la communion des chœurs basques et diwan de Biskra pour nous chanter l'Algérie le 9 décembre ou des rencontres littéraires avec des débats sur la civilisation arabo-musulmane. Dans le programme qu'il a présenté aux représentants de la presse ce dimanche, le directeur du CCF a montré sa volonté de donner un plus à l'institution qu'il gère « pour mieux rapprocher les deux peuples », dira t-il. Dans son approche des actions qu'il compte entreprendre, on a l'impression que trois années après sa réouverture, l'ancien uniforme du CCF s'effiloche pour céder la place à de nouvelles idées. Toute une génération d'hommes et de femmes de culture pour border les motifs du rajeunissement à l'image de Brigide Bladou, écrivaine et sociétaire adjointe des auteurs et compositeurs dramatiques de France. Elle est l'hôte de Annaba hier et aujourd'hui pour animer une conférence sur la vie, l'œuvre et les engagements politiques de George Sand. Au-delà de la traditionnelle courtoisie, rencontrer les responsables du CCF surprend par la décontraction des rapports. De la langue de bois qui caractérisait les relations dans la communication, il ne reste que quelques échardes. Mieux, sans ambages, les responsables et les agents de cette institution française à Annaba font part de leur volonté de bien faire. Ils ne parlent pas de projets à réaliser, mais de concrétisations. Ils y mettent les moyens. Le grand chambardement du siège du CCF pour créer d'autres espaces à même d'accueillir plus que les 3000 adhérents, le grand centre informatique, les 120 revues spécialisées et autres auxquelles le CCF est abonné ainsi que l'ouverture de tout un étage expriment le regard de la France sur l'Algérie et le monde. Dans sa recherche du toujours plus, Marcel Tavet est allé plus loin. Il a créé un centre de ressources historiques, un autre pour l'apprentissage de la langue française à destination des universitaires à partir de la 1re année et réceptionnera prochainement plusieurs exemplaires des 1600 ouvrages édités à l'occasion de la rentrée littéraire. Dans son programme d'activités, sur la base d'une coopération entre les historiens et archéologues des deux pays, il a également prévu de créer un CD permettant une reconstitution virtuelle de toute l'histoire de l'antique Hippone. Avec les 9000 ouvrages déjà en rayonnage au CCF, le Festival sur le théâtre poétique arabe, français et autres langues, le concours de la francophonie, les projets d'échanges et de contacts entre les animateurs de la culture des deux rives de la Méditerranée, Marcel Tavet met en relief l'enjeu politique de sa démarche. Elle sera certainement celle de son homologue de Constantine. Ce dernier est déjà en poste dans cette ville pour préparer l'ouverture de l'institution culturelle française annoncée pour le début de l'année 2005. Comment ne pas parler d'enjeu politique au regard du choix porté sur le thème de la conférence d'hier et d'aujourd'hui. George Sand n'est-elle pas la première femme à avoir cassé les tabous qui imposaient à la femme le seul droit de se taire. Par ses écrits politiques et ses articles en faveur des droits des femmes et des libertés, cette écrivaine du XIXe siècle n'avait-elle pas mis en cause la suprématie de l'homme sur la femme ? C'est dans ce contexte que doit être interprétée l'organisation de cette conférence qui coïncide avec les débats qui se déroulent actuellement dans notre pays sur le code de la famille. D'où une certaine mobilité des animateurs français et leurs collaborateurs algériens au gré des meilleures possibilités et surtout d'une plus grande attention au public et aux journalistes. Avec la nouba de Rachid Guerbas, le musicologue algérien, dans le Fou d'Elza de Louis Aragon programmée pour avril 2005, les dithyrambes bien-pensants, bien-pensum, n'ont plus la cote ou du moins doivent-ils être pimentés de condiments attractifs. Marcel Tavet s'est aperçu qu'il lui était possible de prévenir les errements dans l'organisation des manifestations culturelles. Des soirées de musique anodine, des rencontres sans lendemain étaient en quelque sorte une forme de voyeurisme qui consolidait l'attentisme. En s'imprégnant de la mentalité annabie, qui ne livre d'elle-même qu'une caricature d'un éternel cliché, le directeur du CCF de Annaba a mis un terme à cet attentisme. En étroite collaboration avec son homologue algérien Driss Boudiba, directeur de la culture de la wilaya, pour beaucoup dans la création d'une école des beaux-arts, d'un conservatoire de musique et d'une bibliothèque, Marcel Tavet compte faire beaucoup de choses pour les adhérents du CCF.