Rabah Sayad n'est plus à présenter à Skikda, encore moins ailleurs, à travers le pays. Son nom, comme ceux d'autres sportifs, reste lié à l'épopée glorieuse de l'EN de handball des années 1970-80. D'habitude, il est très réservé et n'a jamais cherché à se mettre sous les feux de la rampe car l'homme n'a rien à prouver. Son passé et ses exploits parlent pour lui, mais c'est un autre homme qui est venu nous voir, non pour parler de sa personne, mais plutôt de l'école de handball et des 60 bambins dont il s'occupe au sein de l'association sportive, la JSES, depuis deux ans déjà. En plus d'une amertume évidente, Rabah laissait aussi apparaître un profond sentiment d'incompréhension et de colère «Depuis deux ans que je m'occupe de cette école, je ne fais que constater la tristesse sur les visages des enfants lorsque, malgré moi et la mort dans l'âme, je, leur dis qu'on ne peut pas s'entrainer et qu'ilsdoivent rentrer chez eux parce que la salle où on devait s'entrainer est occupée soit par une rencontre, soitpar un autre évènement. Vous ne pouvez pas supporter la tristesse des gosses à ce moment-là. Moi, cela me tue». Cette triste réalité, on l'a d'ailleurs constaté, in situ, en accompagnant, un vendredi, Rabah Sayad à la salle des Frères Bouchache. Dès 10h, des bambins, accompagnés de leurs parents, commencent à affluer tout contents en exhibant, avec joie, leurs tenues sportives comme un jour de l'Aïd. Et quand le Cheikh leur apprend la mauvaise nouvelle, les visages des bambins se crispent. Tout comme le visage de Rabah d'ailleurs. «Sur six séances programmées, les enfants n'ont en fait que trois. Comment voulez-vous qu'on apprenne à ces gosses l'amour du sport. Il ne faut pas se mentir et il est temps de réveiller les autorités de Skikda en leur disant clairement qu'on n'a pas d'infrastructures sportives dignes de ce nom. C'est malheureux de le dire mais lors du dernier jubilé organisé à la salle Frères Bouchache, on n'avait pas osé inviter beaucoup de monde car la salle ne dispose pas de gradins conséquents. On n'a pas invité les autorités locales car on n'avait pas de tribune digne de ce nom pour les accueillir convenablement. Pourtant Skikda a toujours été connue pour être une ville de Handball. En 1971, on était déjà 13 skikdis dans l'EN. En 1974, lors du championnat du monde en Allemagne, on était 05 skikdis sur le terrain lors du match contre l'ex Yougoslavie, autant dire Skikda contre la Yougoslavie. Skikda a donné à ce sport et on ne lui a même pas donné une salle à la mesure de son potentiel et de ses ambitions». INTERPELLER LE MINISTRE TAHMI Rabah pouvait court-circuiter tout le monde et s'adresser directement au Ministre des sports, M. Tahmi, ancien handballeur qu'il connaît personnellement pour l'avoir eu comme coéquipier. Mais c'est un gentleman. Un sportif qui refuse de voir les subventions attribuées aux clubs servir uniquement les équipes d'élite au dépend des écoles. De voir aussi des jeunes entrainés par des formateurs sans compétences.Il dit aussi ne pas comprendre le fait que les terrains de sport des CEM et des Lycées, et les salles de l'université ne puissent pas servir les week-ends. «Pourtant il suffirait aux ministres concernés de se réunir pour convenir d'un accord et permettre à des milliers, voire des millions de jeunes et d'enfants de pratiquer un sport». Pour revenir à la situation locale, Rabah juge que «le handball a survécu à Skikda grâce à la JSES et à Yacine Aliout. Grace aussi au CRS, à l'USS et à d'autres clubs qui survivent à Skikda, à El Harrouche, Sidi Mezghiche, Bouchaour et Azzaba.Moi je ne fais pas de politique….le Handball est un sport de salle et Skikda n'en dispose pas. Ce que font ces clubs-là relève à mon sens du miracle».