A l'occasion de l'ouverture, aujourd'hui, de la session parlementaire de printemps, le président de l'APN, le Dr Mohamed Larbi Ould Khelifa, livre à El Watan sa conception du rôle du Parlement, évoque ses insuffisances et révèle quelques détails sur l'amendement de la Constitution qui passera par les deux Chambres. - Le bureau de l'Assemblée s'est réuni et a programmé les travaux de la session de printemps qui s'ouvre aujourd'hui. Avez-vous une vision globale et définitive des projets de loi à présenter ? Est-ce que l'amendement constitutionnel est prévu ? Ce n'est pas le bureau de l'Assemblée qui s'est réuni, mais plutôt ses présidents, pour débattre des questions nécessitant des consultations et un dialogue, et pour étudier ce qui nous attend durant les prochains quatre mois et demi de cette session. Il y a, par exemple, un certain nombre de projets de loi présentés lors de la dernière session qui n'ont pas abouti faute de temps. Il y a aussi de nouveaux projets de loi. Au total, nous aurons donc dix projets de loi à débattre. Ces textes sont d'abord étudiés par le bureau de l'Assemblée avant d'être transmis, selon la thématique, aux commissions parlementaires qui peuvent y apporter des modifications, indépendamment des amendements que peut apporter l'opposition ensuite. Le bureau de l'APN, qui est une sorte d'exécutif, est ensuite destinataire de ces textes, parfois modifiés donc, avant d'arriver à l'étape de la plénière. Les discussions autour des projets de loi en commissions (il en existe douze) sont très ouvertes, démocratiques, parfois même avec des dépassements… D'ailleurs, je me demande pourquoi ne pas faire assister les médias à ces débats ? Nous avons déjà essayé, mais ça n'a malheureusement pas réussi. Sur cette question des débats au sein des commissions ou lors des plénières, je suis satisfait de leur déroulement démocratique, franc, parfois tendu. Je donne parfois même plus de temps de parole à l'opposition, minoritaire dans l'Assemblée, afin de créer un peu d'équilibre dans les débats. D'ailleurs, si nous nous comparons à d'autres pays qui ont une histoire récente qui ressemble dans une certaine mesure à la nôtre, nous remarquons qu'il y a une appréhension face aux discussions démocratiques au sein de leur Parlement. Notre histoire récente, l'expérience douloureuse des années 1990, ont créé aussi de l'ouverture, du débat, de la franchise. Concernant la réforme constitutionnelle, nous n'avons pas d'indicateur clair de la part du gouvernement sur son agenda. Mais ce couronnement des réformes politiques engagées depuis 2001, qui est l'amendement constitutionnel, sera très certainement proposé au vote aux deux Chambres du Parlement, comme en 2008. - Quelles seront les grandes lignes de l'amendement de la Constitution ? Il y a des indicateurs qui renseignent sur le renforcement de la démocratie, c'est la tendance générale de cette réforme. Il sera question aussi d'une plus grande séparation des pouvoirs et d'un renforcement de la justice pour que tous les citoyens soient égaux devant la loi. C'est la volonté du président de la République et de nombreuses personnes dans les institutions de l'Etat : plus de démocratie, plus de citoyenneté et une renaissance de la société civile et de la vie politique. Les premiers indices de la réforme constitutionnelle montrent aussi que le Parlement aura plus de prérogatives pour améliorer son fonctionnement et lui donner sa véritable place dans la pyramide du pouvoir. - La rareté des Conseils des ministres n'a-t-elle pas restreint le travail législatif, avec moins de lois à voter, par exemple ? En termes d'importance ou de qualité ? Je ne le pense pas. Car les lois qui ont été discutées et adoptées sont d'une importance capitale. Par exemple la loi de finances, colonne vertébrale de toutes les structures de l'Etat, et ce, même si elle a pris du temps pour arriver au Parlement. Mais le plus pertinent, à mes yeux, reste l'importance des lois, pas leur nombre. On ne va pas s'amuser à faire du chiffre ! Je donne un autre exemple : la réforme de la justice, un sujet qui intéresse l'opinion. Ou encore la loi sur la signature et la certification électronique, sujet d'une grande polémique, car des arguments parlent de la difficulté de changer les mentalités – les échanges par chèque ne sont pas dans les mœurs ! Pis, les échanges d'argent liquide par sac noir aussi est un phénomène. Mais il est important d'avancer, pas à pas. L'adaptation au e-gouvernement ne peut pas être décrétée, il faut changer les mentalités, créer des traditions. Rendre les échanges financiers électroniques naturels a pris beaucoup de temps en Occident ! Pour revenir à votre question, je répète que le bilan devrait être fait sur la base de la qualité des lois, non pas sur leur nombre. La qualité mais aussi l'intensité des débats autour des projets de loi, à l'image de la loi sur le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme dont le caractère d'urgence a fait débat. Là, on s'est retrouvés confrontés à un problème important. A mon avis, tout en respectant les opinions des autres, face à des engagements internationaux et sur ces questions spécifiques de terrorisme, il fallait trancher rapidement. L'urgence de traitement des projets de loi existe dans les statuts de l'APN. Ceux qui sont opposés à cette procédure d'urgence ont le droit de s'y opposer. Mais ce texte a été discuté et finalement adopté. Je pense aussi aux modifications du code pénal pour mieux protéger la femme contre les violences : il est important, pour faire face à la banalisation de ces violences, de les qualifier en quasi-crimes. Ces amendements seront votés entre le 3 et le 5 mars. - Des partis de l'opposition ont souligné que les tensions au sein du FLN ont handicapé, un mois durant, l'activité de l'APN. Les divisions à l'intérieur du groupe parlementaire FLN ont parasité son bon déroulement… Le FLN a une majorité, que ce soit dans les structures de l'APN ou numériquement parlant, dans l'hémicycle, mais le FLN ne gère pas l'Assemblée. Il détient même une majorité quasi absolue avec ses alliés, le RND et des indépendants. Quand un parti est dans l'opposition, mais avec des députés qui le représentent, c'est à ce parti d'assumer les conséquences de cette position. Car personne n'a exigé de lui de se retirer des structures du Parlement. Il y a des partis qui, en quittant le gouvernement, ont décidé de quitter aussi des structures de l'APN, ce qui est une position acquise légalement. Je parle ici de la Coalition de l'Algérie verte. Le FFS a refusé et refuse toujours de participer aux structures de l'APN, tout comme le PT. Ils peuvent être absents des structures de l'APN, mais pas des commissions où tous les partis sont représentés. Je fais partie du FLN depuis très longtemps et je ne crois pas que le parti ait gêné le bon déroulement du travail de l'APN. L'Assemblée se réunit à la demande de son président – pas d'une autre personne – et quand elle se réunit, ses prérogatives sont claires et précises. Les problèmes dont vous parlez sont strictement liés au parti lui-même et je n'ai rien à voir avec cela. Si un parti veut garder ou exclure un de ses membres, ce n'est pas dans mes prérogatives, que ce soit pour le FLN ou pour un autre parti. Cela est arrivé au FFS avec Tazaghart et je ne m'en suis jamais mêlé. Tazaghart était militant du FFS, député mais sans poste dans les structures de l'APN. Ces questions-là se règlent au niveau du parti. Je considère que le FLN, par rapport à son implantation, à son cumul historique, est un parti important : 99% des partis actuels sont issus de la matrice FLN (je ne veux pas utiliser le mot «père»), même le FFS d'avant 1963. Aït Ahmed, que Dieu lui accorde la santé, était un grand dirigeant du FLN, pas seulement un militant. Tous les Algériens patriotes ont la Déclaration du 1er Novembre comme référence première. C'est la synthèse absolue du patriotisme. Mais parfois, des détails prennent des proportions démesurées et cela crée une situation de crise qui, en fait, n'existe pas. Le FLN a une direction, il y a des avis divergents ; mais bon, depuis une décennie, il a connu plusieurs secrétaires généraux. C'est un parti qui a connu beaucoup de mutations, de changements de direction, comme cela se passe dans beaucoup de partis… N'oublions qu'on appartient au Tiers-Monde !
- «Si on avait une véritable Assemblée, on aurait ouvert un débat, mais dans cette APN, le débat général n'existe pas, y compris sur les questions fondamentales», déclarait Louisa Hanoune à El Watan récemment. Que répondez-vous à cela ? Madame Hanoune a le droit de dire ce qu'elle pense, mais ce n'est pas vrai. Son parti est représenté dans le Parlement et il a une voix. La plupart des débats et même les plus vifs sont menés par les députés du PT. Personne ne peut empêcher le PT d'exprimer son opinion en toute liberté. Ses députés, son chef du groupe parlementaire prennent le temps qu'il faut pour s'exprimer et je les reçois personnellement sans aucun problème. Maintenant, on ne peut pas imposer un sujet à la discussion, car on est dans le multipartisme qui réclame qu'on exprime une opinion et qu'on la contredise. Ce débat contradictoire débouche sur un vote. La majorité, quantitative ou qualitative, tranche. Dans n'importe quel pays au monde, si la majorité est gouvernementale, eh bien cette majorité soutient l'action de l'Exécutif. En France, en Grande-Bretagne, quel député voterait contre son propre parti en faveur de l'opposition ? C'est impossible. Et vice-versa. En fait, nous manquons de culture parlementaire. Qu'est-ce que la majorité ? Pourquoi vote-t-elle pour le gouvernement ? Qu'est-ce que l'opposition ? C'est aussi à vous, médias, d'expliquer cette culture. Il nous faut une adaptation, une évolution, car aucun système politique n'est parfait, il y a toujours des choses à parfaire, avec la pratique. Surtout quand on sait que c'est la classe politique qui fait évoluer la démocratie, c'est la responsabilité des élites, des élites dirigeantes. Dans cette culture, il faut aussi avoir l'idée de l'Etat. C'est l'acquis le plus important depuis trois ou quatre siècles en Algérie. L'Etat est là, les responsables et les politiques menées sont, au contraire, perfectibles et critiquables. - L'Algérie est dans une situation économique particulière. Les députés, les partis ont demandé à ouvrir un débat sur cette situation relative à la chute des prix du pétrole. Mais le gouvernement a décidé, seul, de rectifier sa politique sans que le Parlement ne soit associé à ce débat sur les répercussions de la crise pétrolière ou sur le gaz de schiste. Pourquoi ne pas absorber les débats au niveau de l'APN avant que cela ne déborde dans la rue ? C'est pour cela que je parle de déficit en culture parlementaire. Pour revenir au gaz de schiste, ce sujet a été l'objet de débats à l'APN, à l'occasion de l'amendement de la loi sur les hydrocarbures. Et ce sont les députés eux-mêmes qui ont adopté ces amendements. Je ne crois pas que les oppositions au gaz de schiste, au nord ou au sud du pays, soient la conséquence de l'absence de l'APN de ce débat. Le débat a eu lieu ici, avec des experts, en présence du ministre de l'Energie et aussi avec les députés dont certains, aujourd'hui, contestent l'exploitation du gaz de schiste ! Le vote s'est quasiment fait à l'unanimité pour ces amendements ! Nous avons aussi des parlementaires qui se sont déplacés à In Salah… Cette peur du gaz de schiste est aussi nourrie par la mémoire, les séquelles des essais nucléaires à Reggane et ailleurs. Maintenant, on a un potentiel nouveau, il faut les technologies de pointe pour exploiter ces richesses en protégeant l'environnement et en préservant la santé de nos concitoyens. Leur santé et l'environnement sont plus importants que n'importe quelle richesse. C'est d'ailleurs l'avis du président de la République. Mais la question du Sud ne concerne pas seulement le gaz de schiste, il faut aller vers plus de décentralisation : traverser des centaines de kilomètres pour un acte de naissance, c'est beaucoup. Et ce projet d'aller vers plus de décentralisation est en cours. Le Sud reste notre plus grande priorité, en tout cas. Nous avons une seule appartenance, la citoyenneté, il n'y a pas de racisme entre Algériens et personne n'a le droit de juger qui est plus musulman qu'un autre. On a déjà vécu ce genre de dérives à la fin des années 1980. - Oui, mais ne croyez-vous pas qu'il aurait fallu impliquer davantage les députés dans le débat sur le gaz de schiste au lieu que l'Exécutif agisse unilatéralement ? C'est un peu dur que de dire que le gouvernement a agi ainsi. Ce n'est pas la première fois que l'Algérie connaît cette situation. Rappelez-vous, au milieu des années 1980, avec la chute des prix du pétrole, la situation était difficile. Il y a des pays, même au sein de l'OPEP, capables de noyer le marché par la surproduction et nous avons appris à ne pas affronter le monde entier d'un coup. Aujourd'hui, il y a des équilibres : dans certaines configurations, nous avons nos cartes à jouer et pas dans d'autres. Maintenant, le défi pour l'Algérie est de gérer ses propres ressources ; à mon avis, il y a beaucoup de gaspillage, tous secteurs confondus. Des pays plus riches ne gaspillent pas autant que nous. Il faut commencer par cela : la bonne gouvernance, la rationalisation, peu importe le nom de ce qu'on doit faire, mais il nous faut d'abord bien gérer nos propres ressources pour mieux asseoir la justice sociale. Il est possible que certaines parties voient, à travers cette question du gaz de schiste, l'occasion de lancer des critiques plus générales. Franchement, on voit bien que l'opposition veut s'investir dans cette question. Mais focaliser ainsi sur le gaz de schiste et prétendre qu'il s'agit de décisions contre le peuple, c'est un peu trop. Personne n'a intérêt à prendre une décision en défaveur de notre peuple, ni aux différents niveaux des autorités ni chez les pro-gaz de schiste.
- Ne croyez-vous pas que la méfiance vis-à-vis des élus (locaux ou nationaux) ainsi que la baisse de la participation électorale sont un indicateur que la politique se déroule hors des cadres formels (partis, institutions, assemblées élues), par exemple la mobilisation contre le gaz de schiste, le combat des syndicats autonomes ou le mouvement des chômeurs ? Cela pose aussi la question de la crise de représentativité… Ce n'est pas faux et ceux qui prétendent que la société algérienne n'est pas politisée se trompent. Au contraire, c'est une société très politisée et il y a un background historique à cette situation, depuis la naissance des partis algériens, avant la Révolution. Même si le mot boulitik devait à l'époque caricaturer les vains efforts politiques pour négocier une solution avec la France coloniale avant le déclenchement de la Révolution. Il y a deux raisons à cette méfiance : le manque de communication entre nous et la peur du dialogue. «Celui-là est contre moi ? Donc je ne lui parle pas. L'autre est un opposant ? Alors je lui parle pas», etc. Mais il y a toujours un juste milieu, la possibilité de rapprocher les points de vue. Il suffit de se parler pour absorber les malentendus. Dire «non» tout de suite à l'invitation aux consultations sur la réforme constitutionnelle, c'est contreproductif. Car ces parties pouvaient au moins dire : «Je ne suis pas d'accord avec le contenu de la réforme» ou proposer une alternative. Mais refuser tout en bloc, ce n'est pas une solution. Il y a un déficit de dialogue entre nous, nous comme élites, comme organismes, etc. C'est ce qui rend complexes, parfois, des questions simples, comme justement cette question du gaz de schiste. Ensuite, ce n'est pas le fait d'être un opposant qui fait qu'on soit un démocrate. Des responsables au pouvoir peuvent aussi avoir d'autres avis que leurs propres collègues, cela existe et je l'ai vu. L'Etat n'est pas l'autre, celui qui est en face : l'Etat c'est nous tous, notre construction, même si rien n'est parfait. - Lors de votre installation à la tête de l'APN, vous vous êtes engagé à revoir les statuts de l'Assemblée. Puis vous avez déclaré qu'il fallait attendre l'amendement de la Constitution pour la révision de ces textes. Ne croyez-vous pas qu'il était possible d'apporter quelques retouches aux lois régissant l'APN, concernant les questions orales, les débats… pour dynamiser l'Assemblée ? Le Conseil de la nation et l'APN doivent se consulter pour leurs activités et nous avons un troisième acteur, le ministre chargé des Relations avec le Parlement, trait d'union entre les deux Chambres et le gouvernement. Il y a ensuite deux genres d'amendement. L'un est de nature procédurière. Nous avons 462 députés, plus qu'avant, et nous sommes confrontés au problème de la composition des commissions, car une centaine de députés n'ont pu rejoindre aucune commission, selon les calculs des textes. J'ai décidé alors d'augmenter le nombre des députés par commission. L'autre est relatif aux prérogatives de l'Assemblée, liées aux statuts de l'APN, qui eux-mêmes font référence à la Constitution. Donc on ne peut pas les amender aujourd'hui, alors qu'il existe un projet de réforme de la Constitution. Même si, personnellement, je ne suis pas satisfait des statuts. - L'opposition se plaint de ne pouvoir mettre en place des commissions d'enquête parlementaires. La dernière demande en date concernait le marché publicitaire… Les partis ou leurs groupes parlementaires peuvent enquêter. Les députés du FFS sont partis à Ghardaïa, personne ne les en a empêchés. Et j'ai signé moi-même leur ordre de mission. Maintenant, il y a d'autres cas de figure. Si, par exemple, une affaire est toujours devant la justice, au nom de la séparation des pouvoirs, je ne peux pas interférer. Il y a bien un projet de loi sur la publicité qui doit être débattu, on ne peut donc pas lancer une commission d'enquête en parallèle. Je crois qu'on manque de communication et d'éclaircissements, ce qui favorise de fausses lectures. C'est pour cela que le rôle des médias est important pour expliquer le fonctionnement des institutions. Je suis convaincu que nos médias ne sont pas des ennemis, ce sont des amis. Nous n'avons pas d'autre canal de communication à part les mass-médias. Il vaut mieux qu'il y ait une coopération avec les médias. Je ne parle pas de déontologie, car je ne crois pas à ce terme, je préfère parler de commun accord sur ce qui est bénéfique pour le journaliste et pour l'institution, une sorte d'intérêt commun entre les deux partenaires. Ici, je parle de la presse nationale, je refuse de dire presse privée ou publique. Pour moi, tous les médias ont un seul but : défendre les intérêts du pays, même si les moyens de le faire sont différents, et c'est naturel. Il faut sortir de ces classifications qui poussent à l'exclusion et même à l'accusation. - Mais la commission d'enquête devait travailler sur le passif, sur l'argent public, alors que la loi va organiser le secteur dans le futur. Ensuite, on a le sentiment que l'APN accepte de prendre les coups à la place du gouvernement : pourquoi ne pas transférer cette question de la commission d'enquête au gouvernement ?
Pourquoi n'y a-t-il pas d'autre solution que de prendre les coups ?! Pour revenir à cette demande de commission d'enquête déposée par l'Alliance de l'Algérie verte (qui a déjà déposé d'autres demandes de commissions d'enquête), je ne suis pas contre car l'opposition est dans son droit. Mais une demande de commission d'enquête doit obéir à des conditions d'ordre formel, ce qui n'est pas le cas dans cette affaire. Il faut, par exemple, citer une seule question, un seul sujet d'enquête. Ces demandes passent par le bureau de l'APN, qui étudie la conformité légale du document. S'il y a des rectifications à faire, la demande est renvoyée à son auteur pour y remédier. Autre disposition : il faut informer la partie objet de l'enquête. Et nous en sommes à cette étape concernant ce sujet. - En tant que troisième personnage de l'Etat, que pensez-vous des initiatives de l'opposition sur le consensus national et sur la transition démocratique ? Cela est du ressort des partis. Je ne peux pas me prononcer, je ne peux être ni avec les uns ni avec les autres. J'ai une obligation de réserve et je suis obligé de traiter avec tout le monde ici. Je sais qu'il y a, chez ces deux parties, de bonnes intentions. - Qu'en est-il de l'absentéisme des députés qui, souvent, gêne le bon déroulement des plénières et donne une image négative de l'Assemblée ? Comment y remédier ? C'est une question à poser aux présidents des groupes parlementaires. Le député a un mandat, une obligation, c'est une question morale. J'ai par exemple remarqué, lors des séances de questions orales, que le député quitte la salle dès que le ministre lui répond, sans écouter la suite des échanges. Mais ce n'est pas un phénomène algérien : en France, lors de la grande commission mixte, il n'y avait pas cinquante députés français dans l'Assemblée nationale alors qu'ils accueillaient le Premier ministre français. - Justement, lors des questions orales, les ministres ne viennent pas ou bien le bureau de l'APN programme les séances à la dernière minute. Il y a aussi le fait que le Premier ministre et le vice-ministre de la Défense ne se présentent jamais devant les députés… Il faut prendre en considération l'architecture même de notre Etat. Nous sommes dans un système présidentiel où le Premier ministre applique le programme du président de la République, ce n'est pas lui qui décide des politiques à mener. Quand il y a un problème, c'est au ministre chargé d'un secteur de répondre. Par ailleurs, on sait qui est le ministre de la Défense, c'est lui qui signe, pas le vice-ministre. Le président de la République ne peut pas se présenter devant les députés selon le système présidentiel. Si on revient à la formule du chef de gouvernement, là c'est autre chose. - Pourquoi, selon vous, l'opinion se focalise sur la question des salaires des députés ? C'est une question qui dure depuis des années. Les salaires, ceux des députés et ceux des autres cadres de l'APN, sont fixés par le texte d'organisation de l'Assemblée. Les députés ne dépendent pas des statuts de la Fonction publique et c'est précisé dans le préambule de ce texte, signé par le président de la République. Donc on ne peut pas interférer. Notre seul souci, c'est qu'il n'y ait pas trop d'écart entre les salaires des différents niveaux. Dans le même temps, il y a des parlementaires à travers le monde dont les salaires dépassent de très loin les nôtres : en Mauritanie, certains touchent jusqu'à 8000 euros ! Ceci dit, souvent ceux qui critiquent sont ceux qui n'ont pas été élus et qui ciblent leurs camarades. Mais la véritable question, concernant n'importe quel salaire, est celle du rendement.