Le clan présidentiel joue-t-il l'apaisement ? Après la guerre déclarée durant le week-end dernier à l'opposition et à la presse, le pouvoir et ses soutiens donnent l'impression de vouloir reculer. Ayant visiblement constaté l'ampleur de leur maladresse, après le message lu au nom du chef de l'Etat à Ghardaïa jeudi passé, les tenants du pouvoir tentent de rectifier le tir et faire baisser la tension qui caractérise ces jours-ci la scène politique. La nouvelle attitude du pouvoir et ses représentants consiste, selon les signes montrés depuis le début de la semaine en cours, à éviter la confrontation avec l'opposition et la presse. Et la sortie médiatique du président du Forum des chefs d'entreprises (FCE), Ali Haddad, pourrait s'inscrire dans cette stratégie. Le patron de l'entreprise des travaux publics ETRHB, très proche du clan présidentiel, réagit officiellement aux rumeurs selon lesquelles «il envisagerait de fonder un parti politique qui le porterait à la présidence de la République». «Laissons la politique aux politiques», affirme-t-il, en marge de sa rencontre, hier, au siège du FCE, avec l'ambassadeur du Qatar en Algérie, Ibrahim Ben Abdelaziz Mohamed Salah Essahlaoui. Ali Haddad veut même mettre un terme à la polémique qui l'oppose au Parti des travailleurs (PT) et sa secrétaire générale, Louisa Hanoune, en appelant à la cessation «des tirs croisés». Mais est-il vrai que le principal financier des campagnes électorales du président Bouteflika (2009 et 2014) est étranger à la politique ? L'un des «oligarques» dénoncés par Louisa Hanoune est bien lui. L'entrepreneur est déjà un acteur informel dans le champ politique national. Après avoir intégré le staff de campagne du candidat Abdelaziz Bouteflika en jouant un rôle important dans la validation du quatrième mandat du chef de l'Etat, il gagne en retour des privilèges. Porté à la tête du FCE, l'homme impose même d'autres mœurs politiques au gouvernement : il oblige les ministres à venir assister à ses réunions et on convoque pour lui tous les ambassadeurs de l'Algérie à l'étranger. Des faits inédits dans les annales qui s'apparentent à «un retour sur investissement» pour celui qui a dépensé des sommes colossales pour réaliser le projet politique du clan présidentiel. En niant son intention de fonder un parti, Ali Haddad veut-il limiter sa connexion avec le monde politique pour se consacrer à celui des affaires ? Peut-être. L'autre signe concernant la volonté du pouvoir de calmer le jeu est l'étrange précision du FLN relative aux attaques de son secrétaire général, Amar Saadani, contre les partis de l'opposition. L'ex-parti unique avait publié, lundi matin, sur son site internet une sorte de mise au point dans laquelle il affirme que «le frère Amar Saadani n'a jamais attaqué des partis politiques». La mise au point a été retirée dans l'après-midi, mais la réaction du FLN intervient dans la foulée de la décision de la présidence de la République de retirer la phrase virulente consacrée à la presse dans le message du président Bouteflika, lu en son nom à Ghardaïa. Dans le même état d'esprit, le ministre de la Communication, Hamid Grine, qui s'est employé, des mois durant, à imposer «son éthique» à la presse, joue lui aussi l'apaisement. Il nie «toute volonté» d'étouffer et de réprimer des organes de presse qui ne font pas partie «du cercle vertueux» qu'il a lui-même défini.