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Ces partis qui veulent affirmer leur existence
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Publié dans El Watan le 16 - 04 - 2015

La question a de quoi étonner, mais 26 ans après l'instauration du multipartisme, on continue à douter de l'existence d'une opposition au régime dans un pays qui compte plus d'une soixantaine de formations politiques.
Pour Louiza Aït Hamadouche, maître de conférences à l'université d'Alger, pas de doute à avoir, «bien sûr que l'opposition existe, même si elle est aujourd'hui au stade de gestation. Mais, niée son existence est une aberration». Face à un pouvoir qui a toujours su capitaliser sur les traumatismes liés au terrorisme, l'opposition tente de sortir de la torpeur dans laquelle elle a été cantonnée durant les années 2000, les années de la décennie noire. Si aujourd'hui, elle revendique son indépendance, elle reste frappée de suspicion. Pour avoir cautionné un régime en manque de légitimité populaire, l'opposition s'est grillée les ailes et a terni son image.
Elle en paye aujourd'hui le prix, au moment où elle se dit prête à assumer les plus hautes charges de l'Etat. Pour Louiza Aït Hamadouche, le procès qui est fait aux partis de l'opposition est injuste, car comme elle le rappelle : «Plusieurs partis politiques ont été forcés de se positionner, lors des années de terrorisme. Ils ont été pris au piège et ont dû choisir leurs camps.» Ainsi que le rappelle le sociologue Nacer Djabi : «Ce système ne reconnaît pas les partis politiques.»
Pourtant, le lancement du multipartisme juste après les émeutes de 1988 a permis l'émergence d'une opposition plurielle, à travers la création d'une soixantaine de «formations à caractère politique», comme le stipule l'article 40 de la Constitution du 23 février 1989 en vertu duquel, «le droit de créer des associations à caractère politique est reconnu». Mais l'expérience a été stoppée avec l'arrêt du processus électoral.
Au nom de la sécurité, l'opposition a vu sa marge de manœuvre réduite, les activités concrètes des partis limitées et le débat politique ne se résumant plus qu'à une opposition entre «réconciliateur» et «éradicateur». «La période du terrorisme a été fatale pour le développement des partis politiques dans leur ensemble. Ces partis n'ont plus été à partir de cette période maître de leur destin. Ils sont devenus des instruments entre les mains du pouvoir, qui a très bien su capitaliser sur ses faiblesses», estime Louiza Aït Hamadouche, pour qui le discours ambiant concernant la sécurité et la réconciliation lui a été fatal.
«Le régime a su transformer sa légitimité révolutionnaire en légitimité sécuritaire», ajoute-t-elle. Mais le déficit de crédibilité de l'opposition est-il entièrement imputable au régime ? Pas si sûr. Les partis politiques ont dans leur ensemble adopté le même mode de fonctionnement que le pouvoir. Plusieurs responsables politiques qui demandent, à cor et à cri, l'alternance politique refusent de la mettre en pratique au sein de leurs partis. Les leaders politiques qui sont en place depuis de nombreuses années ont pris soin de faire le vide autour d'eux, causant le départ de très nombreux militants dégoûtés par la gestion et le culte de la personnalité érigé comme mode de fonctionnement.
Une pratique qui a rendu les formations politiques exsangues, donnant l'impression qu'elles n'ont qu'une existence végétative, seulement interrompue à intervalle régulier par une échéance électorale. «N'ayant plus de structures de base opérationnelles en dehors des élections, les partis politiques sont devenus des clubs où accourent les opportunistes de tout poil à l'occasion de chaque consultation électorale», résume un ancien cadre du FLN. «Il faut réhabiliter le politique aux yeux de la population. Cela passe par une mise à nu du fonctionnement interne des partis. C'est la seule façon de faire adhérer le plus grand nombre aux projet de l'opposition», considère Nacer Djabi.
Un processus inévitable, comme le confirme Louiza Ait Hamadouche : «Les partis de l'opposition doivent faire leur révolution pour atteindre un stade de maturité qui leur permettra à l'avenir de faire basculer le rapport de force avec le pouvoir.» C'est ce que tentent de mettre en place les formations au sein de la Commission nationale pour la transition démocratique.
Cet aréopage de partis d'obédiences différentes tente de poser les bases d'une opposition responsable, capable de représenter une crédibilité plausible aux yeux de la population. D'autant que le pouvoir, face à la chute de la rente, voit sa capacité de contrôle s'amoindrir. «La rente va encore permettre au régime de manœuvrer certains partis politiques pendant encore trois ou quatre ans. Après, il devra composer», estime Nacer Djabi. Mais pour cela, les formations de l'opposition devront au préalable se construire une identité politique, qui passe nécessairement par l'élaboration d'un programme. Condition pour devenir crédible.


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