Une note a été adressée aux banques pour suspendre toutes les domiciliations bancaires au profit des concessionnaires. Il s'agit d'une réelle offensive du Premier ministre contre les récalcitrants à la mise en application des exigences normatives en matière d'importation de voitures. Abdelmalek Sellal, Premier ministre, a envoyé le 23 avril dernier une note à l'adresse du ministre des Finances et du gouverneur de la Banque d'Algérie dans laquelle il s'insurge contre des concessionnaires «voulant contourner la nouvelle réglementation» qui fixe les conditions d'exercice du métier de distributeur automobile. La note du Premier ministre lève le voile sur une pratique «peu loyale» chez certains concessionnaires qui s'adonnaient, pendant cette période de «prohibition», à des importations massives «en complicité avec des banques privées». «Il a été porté à la connaissance de M. le Premier ministre que dans le cadre de la mise en œuvre du dispositif réglementaire régissant l'activité de concessionnaire de véhicules neufs, certains concessionnaires, filiales de constructeurs étrangers, avec la complicité de banques étrangères privées, ont procédé à des domiciliations bancaires d'importation durant la période allant du 23 mars au 9 avril 2015, de volumes de véhicules sans rapport avec la moyenne enregistrée pour la même période de 2014 évaluées à 613 millions d'euros», écrit le cabinet du Premier ministre à l'adresse du premier argentier du pays et au patron de la plus haute autorité monétaire du pays. Il faut rappeler que les banques étaient destinataires d'une note adressée par le ministère de l'Industrie et des mines, dans laquelle il était demandé de suspendre toutes les domiciliations bancaires au profit des concessionnaires. Cette décision a été motivée par le souci d'amener les distributeurs automobiles à se conformer au nouveau cahier des charges applicable aux concessionnaires automobiles. L'arrêté ministériel fixant le cahier des charges relatif aux conditions et modalités d'exercice de l'activité de concessionnaire de véhicules neufs a été signé par le ministre de l'Industrie et des Mines, Abdessalem Bouchouareb, le 23 mars 2015, en application des dispositions du décret exécutif n°15-58 du 8 février 2015 relatif aux conditions et modalités d'exercice de l'activité de concessionnaire de véhicules neufs. Le texte inclut une nouvelle réglementation axée sur des normes de sécurité strictes définies par un nouveau cahier des charges. L'effet surprise Les domiciliations effectuées par certains concessionnaires relèvent de «pratiques non conformes aux tendances à la baisse relevées sur le marché et visent un contournement de la nouvelle réglementation et la constitution de stocks de véhicules ne répondant pas aux nouvelles normes techniques édictées qui les placent en situation confortable par rapport à leurs concurrents», lit-on dans la note adressée par le Premier ministre au ministre des Finances et au gouverneur de la Banque d'Algérie, dont nous nous sommes procuré une copie. Laquelle note sonne telle une dernière mise en garde adressée à la fois aux banques commerciales et aux concessionnaires qui ne s'accommodent pas des exigences de la nouvelle réglementation. Profitant d'une baisse de vigilance chez les banquiers de la place, voire d'une méconnaissance du nouveau terrain de jeu défini par le cahier des charges, certains concessionnaires se sont mis à importer massivement avant que le bruit de la nouvelle réglementation ne se répande. «Il a été également relevé qu'une banque commerciale privée a procédé à l'ouverture d'une lettre de crédit à un concessionnaire qui a fermé son compte ouvert auprès d'une autre banque qui, par respect de la nouvelle réglementation, lui a refusé l'ouverture de la ligne de crédit», fait constater le Premier ministère dans sa missive n° 625, datant du 22 avril dernier. Pour une meilleure maîtrise de l'importation des véhicules neufs, le Premier ministère demande au ministre des Finances et à la banque centrale de «prendre les mesures nécessaires, dans le strict respect de la nouvelle réglementation de combattre toutes formes de manœuvres visant son contournement». Le gouvernement affiche ainsi clairement la couleur et n'hésite pas à apporter de l'eau au moulin du ministre de l'Industrie et des mines qui avait notifié aux banques les nouvelles instructions du gouvernement, avant même que le cahier des charges ne soit publié dans le Journal Officiel. Même si les concessionnaires adhèrent à la volonté du gouvernement de fixer de nouvelles exigences normatives en matière d'importation de véhicules, «l'effet surprise» qui a accompagné la suspension des domiciliations bancaires a attisé la nervosité de plus d'un. D'autant plus que cette décision a entraîné d'énormes coûts chez les distributeurs automobiles, dont certains se sont retrouvés dans l'embarras suite aux importantes commandes passées auprès des fournisseurs, voire à une marchandise en rade faute d'une homologation imposée par la nouvelle réglementation.