Ghardaïa était hier une ville morte. Pas d'affrontement, mais beaucoup d'arrestations. Des décisions du gouvernement ont également été prises. En attendant leur application, les familles enterrent leurs morts. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a promis d'imposer et d'instaurer la paix et le calme par la force. Dans un discours qu'il a prononcé hier lors de sa visite à la wilaya de Ghardaïa devant les notables de la région, Sellal a affirmé : «C'est inadmissible que des Algériens s'entretuent». Il a demandé aux notables d'assumer leurs «responsabilités» pour rétablir l'union entre les habitants de la région. Le Premier ministre a affirmé que l'Etat assumera son entière responsabilité pour imposer la paix. «Nous comptons instaurer la paix par la force», a-t-il dit. Il s'est attaqué aussi lors de son discours à ceux qui «sèment la fitna». «L'Etat ne va pas se taire et va les poursuivre dans le cadre de la loi», avertit le Premier ministre. Il a évoqué le nom du militant Kamal Fekhar qui sera, selon lui, arrêté avec ses compagnons. Les autorités sécuritaires l'accusent en effet «d'incitation à la violence et outrage aux corps constitués dans des communiqués qu'il signait de son nom». Abdelmalek Sellal a discuté avec les notables ibadites et malékites en affirmant que des dépassements ont été enregistrés des deux côtés, et c'est pour cette raison «qu'il faudra appliquer la loi dans toute sa rigueur». Les notables de Guerrera et la ville de Ghardiaia exigent une enquête pour mettre à nu les réseaux de trafic d'armes et l'utilisation d'armes sans autorisation. Le gouvernement a aussi autorisé à titre exceptionnel les différents services de sécurité chargés de gérer la crise de perquisitionner sans mandat. Et a donné plus de prérogatives aux services de sécurité, gendarmerie et armée pour faire face à la crise et aux affrontement. Sellal a annoncé aussi l'interdiction de tout rassemblement dans le territoire de la wilaya et de suspendre toutes les activités culturelles jusqu'à nouvel ordre. Les matchs de football se joueront désormais à huis clos. Dans la journée d'hier, les services de sécurité ont procédé à Guerrara, Ghardaïa et Berriane à l'arrestation de 35 personnes accusées d'avoir participé à des actes de violence. Il a été aussi procédé à une campagne de fouilles à la recherche d'armes à Guerrara. Une opération qui continuera pendant les jours à venir. En parallèle, l'armée a décidé de prendre de nouvelles décisions pour contrôler la situation à Ghardaïa. Selon une source sécuritaire, les dispositifs en question concernent d'abord l'armement des unités de la gendarmerie et de la Sûreté nationale dans les zones à risques. Ensuite, convoquer des forces militaires si nécessaire pour toute intervention. En troisième phase, elle sera appelée à porter de l'aide aux civils. Selon une enquête préliminaire, les 8000 éléments des unités d'intervention de la gendarmerie et de la Sûreté nationale, mis en place dans les zones touchées par les heurts, se sont avérés inefficaces. Car les armes dont ils disposaient n'étaient pas munies de balles réelles. Ils disposaient aussi de bombes lacrymogènes. Mais, à Guerrara, les manifestants utilisaient des balles réelles ! Décision prise : les unités d'intervention doivent être armées de balles réelles pour cerner la situation. L'ANP vient de déployer, selon une source sécuritaire, 4000 militaires dont deux unités des forces spéciales dans des casernes et des bases aériennes à Ghardaïa, Ménéa, Ouargla et Laghouat pour intervenir si la situation l'oblige. Une autre source sécuritaire affirme qu'un plan de sécurité a aussi été mis en place. Selon notre source, le commandement de l'armée a préparé deux plans d'intervention pour toute aggravation de la situation. Le premier plan, en application depuis mardi dernier, est de doter les unités spéciales d'armes pour tout affrontement. Le deuxième plan comprend le déploiement de l'armée dans les villes de Ghardaïa, Guerrara et Berriane. L'armée sera chargée d'appuyer et de soutenir les unités d'intervention chargées de faire face aux violences. Il a également été décidé de mettre en place des barrages de sécurité et de procéder à des perquisitions de maisons soupçonnées d'être des caches d'armes. Ces démarches font suite aux décisions du Conseil des ministres pour la gestion de la crise à Ghardaïa qui a chargé l'ANP de superviser la gestion et la logistique. Des prérogatives ont été données à l'armée. Elle est aussi chargée de gérer la commission d'enquête pour l'utilisation des armes à Ghardaïa. Et de découvrir les ateliers clandestins de production d'armes artisanales utilisées lors des affrontements. Le président Bouteflika avait pris, mercredi soir, une série de décisions. Le chef de l'Etat a chargé le commandant de la 4e Région militaire de «superviser l'action des services de sécurité et des autorités locales concernées pour le rétablissement et la préservation de l'ordre public à travers la wilaya de Ghardaïa. Le Président a instruit également le Premier ministre de veiller, avec le ministre de la Justice, garde des Sceaux, à ce que le parquet prenne en charge, avec diligence et sévérité, toutes les violations de la loi à travers la wilaya de Ghardaïa et notamment l'atteinte à la sécurité des personnes et des biens. A noter aussi que le parquet de Ghardaïa a procédé, hier, à l'arrestation du militant pour l'Autonomie de M'zab, Kamal Fekhar, pour le questionner sur les accusations portées contre lui, à savoir outrage à corps constitué. Selon une source judiciaire, la police a aussi arrêté pour enquête trois de ses compagnons..