La situation a gravement dégénéré à Ghardaïa. Hier, les violences intercommunautaires ont fait 22 morts et de nombreux blessés. C'est un bilan de guerre qui a tout de suite fait réagir le chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika. Une réunion d'urgence a été convoquée, hier, par M. Bouteflika pour examiner la situation dans la wilaya de Ghardaïa, son évolution et les solutions ou remèdes à apporter pour mettre un terme définitif à cette violence et tension ambiantes. Selon une source proche de la présidence de la République citée par l'APS, le premier ministre, Abdelmalek Sellal, le vice-ministre de la Défense nationale, chef d'état-major de l'ANP, le général de corps d'armée, Ahmed Gaïd Salah, et le directeur de cabinet à la présidence, Ahmed Ouyahia, ont pris part à cette réunion présidée par le chef de l'Etat. Le conclave décidé par M. Bouteflika s'imposait au vu des graves développements que connait la région de Ghardaïa depuis la reprise des affrontements intercommunautaires il y a une semaine. Hier, selon le dernier bilan fourni par la wilaya, ce sont 22 personnes qui ont trouvé la mort et plusieurs autres ont été blessées dans les heurts entre groupes de jeunes rivaux. Après avoir étudié le rapport transmis par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Bedoui, qu'il avait dépêché sur les lieux, le Président a transmis ses décisions aux responsables concernés, a indiqué un communiqué de la présidence de la République. Le commandant de la 4e région militaire a été ainsi chargé de superviser l'action des services de sécurité et des autorités locales concernées pour le rétablissement et la préservation de l'ordre public à travers la wilaya de Ghardaïa. Quant au Premier ministre, il veillera avec le ministre de la Justice afin que le Parquet prenne en charge, avec diligence et sévérité, toutes les violations de la loi à travers la wilaya de Ghardaïa et notamment l'atteinte à la sécurité des personnes et des biens. Par ailleurs, le gouvernement devra diligenter la mise en œuvre des programmes déjà arrêtés en vue de la relance du développement économique et social et du retour à une vie normale à travers le territoire de la wilaya de Ghardaïa. Enfin, après avoir exprimé ses condoléances aux familles des défunts, victimes des affrontements intercommunautaires, M. Bouteflika a appelé la population locale dans sa diversité à concourir à la restauration de l'accalmie. Le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Bedoui, s'est déplacé, hier, à Ghardaïa où il a tenu une rencontre à huis clos avec des représentants de la société. M. Bedoui qui a reçu les comptes-rendus des différentes parties chargées de la gestion sécuritaire dans la région, était accompagné du Directeur général de la Sûreté nationale (Dgsn), Abdelghani Hamel, et du chef d'état-major de la Gendarmerie nationale, le général Menad Nouba. Après la réunion, le ministre est sorti visiter les différentes localités ayant connu des affrontements, à savoir Guerrara, Berriane et Ghardaïa. Là, il s'est enquis des conditions de travail et du déploiement des forces de maintien de l'ordre. M. Bedoui devait présider d'autres réunions dans la soirée avec les chargés du maintien de l'ordre dans la région pour trouver les moyens de ramener le calme et d'activer la commission de développement et de réconciliation qu'il avait mise en place jeudi dernier à Ghardaïa. La veille, c'est le commandant de la 4e région militaire, le général-major Cherif Abderezak, qui s'était rendu à Ghardaïa. Les deux responsables ont, au fait, pour même mission d'adapter le dispositif sécuritaire en place à la situation tel qu'elle se présente aujourd'hui, avec des affrontements qui causent des morts et des blessés dans différentes régions de cette wilaya du sud qui fut touristique. Le plus grand nombre de décès a été enregistré à Guerrara avec 19 victimes suite à des jets de projectiles par des inconnus. Berriane et Ghardaïa ont également eu leurs morts. Les groupes d'émeutiers et d'agitateurs se déplacent cagoulés d'un quartier à un autre, voire d'une localité à une autre, pour provoquer des affrontements, étendre la violence, fomenter des troubles et faire le plus de dégâts. Leur stratégie est simple. Ils balancent des cocktails Molotov et des projectiles contre les forces de l'ordre et d'autres groupes de jeunes, toute en vandalisant et incendiant habitations, commerces, véhicules, mobilier urbain et palmeraies. Face à cette situation, un important dispositif sécuritaire a été mobilisé pour faire cesser les heurts et ramener le calme. Les forces de l'ordre ont dû faire usage de gaz lacrymogènes pour disperser les groupes antagonistes. Mais la mobilité des groupes d'émeutiers rend la tâche des policiers et gendarmes difficile. Des mozabites ont d'ailleurs demandé l'intervention de l'armée pour neutraliser définitivement ces groupes d'agitateurs. La violence est devenue telle que la réaction défensive a dépassé les frontières de la ville et de la wilaya de Ghardaïa. Hier, des mozabites ont manifesté à Alger, à Oran et dans d'autres régions du pays en soutien aux leurs qui souffrent le martyr à Ghardaïa, où des commerçants ont d'ailleurs baissé rideaux dans différents quartiers de la vallée du M'Zab, à Berriane et Guerrara en réponse à un appel à une grève générale lancé par un collectif de commerçants mozabites. Des notables locaux de différentes composantes de la société Ghardaouie ont également appelé les habitants à la «vigilance et à la sagesse». Mais la voix du bon sens aura du mal à trouver la voie de la raison chez ces agitateurs qui cassent, brulent et tuent sciemment, autrement ils ne se déplaceraient pas cagoulés. A la violence débridée, seule la violence de l'Etat peut, et doit, être opposée. La police, la gendarmerie, et même l'armée si nécessaire, sont le bras armé du pays qui doit trancher dans le vif quand ça s'impose. Et à Ghardaïa, ça s'impose, avec 22 morts, au moins. H. G.