La patience et l'abnégation qui caractérisent le président palestinien Mahmoud Abbas ont porté enfin leurs fruits. L'annonce, lundi dernier, d'un accord entre le président Abbas et son Premier ministre Ismaïl Haniyeh, issu du Hamas, pour la formation d'un gouvernement d'union nationale, dont le programme politique est basé sur le document d'entente nationale, élaboré par de hauts cadres des différents mouvements palestiniens, dont le Hamas, emprisonnés en Israël, a été très bien accueillie par les Palestiniens. Le document en question appelle, entre autres, à la création d'un Etat palestinien sur les territoires occupés en 1967, la reconnaissance implicite de l'Etat d'Israël, l'arrêt des attaques en territoire israélien et la concentration de la résistance dans les territoires occupés seulement. Ces conditions ont toujours été refusées par le mouvement islamiste Hamas et sa direction, dont l'actuel Premier ministre Ismaïl Haniyeh. Ce programme politique plutôt pragmatique permettra sans doute au prochain gouvernement palestinien de briser l'embargo international, de mettre fin à la crise politico-financière qui sévit actuellement dans les territoires et de restituer à la cause palestinienne la place qui lui est due sur la scène internationale. D'une question de libération et d'autodétermination, elle a été transformée en une simple question humanitaire depuis la venue au pouvoir du Hamas et la mise en place de l'actuel gouvernement en mars suite au triomphe du mouvement islamiste aux dernières législatives de janvier. Un décret présidentiel faisant Etat de la dissolution de l'actuel gouvernement paraîtra dans les prochaines 24 heures. Vraisemblablement, le président Abbas reconduira Ismaïl Haniyeh au poste de Premier ministre du gouvernement d'union nationale. « Nous annonçons à notre peuple cette bonne nouvelle : nous avons achevé la définition du programme politique du gouvernement d'union nationale, basée sur le document d'entente nationale », signé le 27 juin par les différents groupes palestiniens, a indiqué M. Abbas aux journalistes à l'issue d'une rencontre à Ghaza, la deuxième depuis dimanche soir, avec M. Haniyeh. « Dans les prochains jours, nous allons commencer à former ce nouveau gouvernement et nous appelons notre peuple à soutenir nos efforts », a ajouté le président de l'Autorité palestinienne. M. Haniyeh a confirmé être parvenu à un compromis avec M. Abbas après plusieurs semaines de tractations. « Cet accord était attendu, car il y avait une volonté réelle et honnête d'y parvenir dans l'intérêt supérieur du peuple palestinien, pour renforcer l'unité nationale et protéger les droits » palestiniens, a-t-il dit. Selon un sondage publié lundi, une majorité écrasante de Palestiniens est favorable à la mise en place d'un gouvernement d'union nationale regroupant le Hamas et le Fatah. Pas moins de 85% des personnes interrogées se sont dites favorables à un gouvernement d'union nationale, 12,5% opposées et le reste sans opinion, selon l'enquête d'opinion, réalisée par l'Opinion Polls and Survey Studies Center de l'université Al Najah en Cisjordanie occupée. 63% des personnes interrogées estiment qu'un tel gouvernement sera en mesure de mettre fin à la crise politico-financière sans précédent, aggravée par une grève observée depuis neuf jours par des dizaines de milliers de fonctionnaires réclamant leurs salaires impayés que très partiellement depuis plus de 6 mois consécutifs. Dans cette foulée de nouvelles rassurantes qui éloignent le spectre d'une guerre fratricide ayant plané durant des mois sur les territoires à cause de l'impasse politique qui sévissait, les Palestiniens redoutent une réaction israélienne visant à saboter cet accord. Soit par une intensification des opérations armées dans les territoires ou par l'assassinat de hauts responsables du Hamas, afin de faire perdurer cet Etat d'instabilité politico-sécuritaire et de prouver au reste du monde que du côté palestinien, il n'existe pas de partenaire pour la paix. Seule la communauté internationale est capable de faire échouer un tel scénario en sommant Israël de respecter les choix des Palestiniens. Le Quartette (les Etats-Unis, l'Union européenne, la Russie et l'ONU) demande au Hamas de reconnaître le droit d'Israël à l'existence et de renoncer à la violence, pour reprendre leur coopération avec le gouvernement palestinien. Le Hamas est considéré comme un mouvement terroriste par les Etats-Unis et l'Union européenne. Le Premier ministre britannique, Tony Blair, a soutenu dimanche, lors d'une rencontre avec M. Abbas à Ramallah, en Cisjordanie occupée, l'idée d'un gouvernement d'union nationale palestinien, qui respecte les principes édictés par le Quartette au Hamas. Il a estimé que la communauté internationale « devrait traiter » avec lui si un tel cabinet était formé. De son côté, et à l'issue du 6e sommet Europe-Asie, le président français Jacque Chirac a déclaré, lundi : « Je m'en réjouis. Il est essentiel pour les Palestiniens de parler d'une seule voix, sous l'Autorité du président Abou Mazen », (Mahmoud Abbas).