Le gouvernement palestinien issu du Hamas a démissionné jeudi après moins d'un an de règne marqué par une crise politico-financière sans précédent, pour ouvrir la voie à la mise en place d'un cabinet d'union avec le parti rival du Fatah. Le Premier ministre issu du Hamas Ismaïl Haniyeh a remis la démission du gouvernement actuel au président Mahmoud Abbas, le chef du Fatah, qui l'a aussitôt chargé par décret de former un cabinet d'union. "Nous avons lancé aujourd'hui la procédure de formation du gouvernement d'union nationale. Le frère Ismaïl Haniyeh m'a présenté la démission de son gouvernement et je l'ai chargé de former un nouveau cabinet", a affirmé le président Abbas lors d'une conférence de presse à Ghaza aux côtés de M. Haniyeh. Il a espéré que la mise en place d'un cabinet d'union, après plusieurs mois d'âpres discussions et de violences partisanes meurtrières, "inaugurera une nouvelle ère palestinienne dans laquelle le peuple vivra en paix et en sécurité". M. Abbas a ensuite indiqué à la télévision palestinienne qu'il exigeait la libération du soldat israélien Gilad Shalit, capturé le 25 juin par trois groupes palestiniens, dont l'un dépendant du Hamas. "Nous devons agir pour que nos prisonniers (détenus par Israël), y compris des ministres et des députés, soient libérés. Mais, il faut relâcher le soldat israélien (...) Nous exigeons sa libération", a affirmé M. Abbas. "En tant que chef du gouvernement actuel, je vous présente ma démission afin de permettre le lancement des démarches constitutionnelles pour la formation d'un gouvernement d'union", a de son côté indiqué M. Haniyeh. M. Abbas a précisé que M. Haniyeh disposait d'un délai de cinq semaines pour former le nouveau cabinet et le lui présenter avant de le soumettre à l'approbation du Parlement. "Je vous invite aussi à respecter les résolutions arabes et internationales et les accords signés par l'Organisation de libération de la Palestine (OLP)", a poursuivi M. Abbas, conformément à l'accord de La Mecque (Arabie saoudite). M. Abbas et le numéro un du Hamas Khaled Mechaal s'étaient mis d'accord sur la mise en place d'un gouvernement d'union le 8 février lors d'une réunion de réconciliation à La Mecque, après une crise politique qui a dégénéré en combats meurtriers entre les deux groupes dans la bande de Ghaza. Par ailleurs, la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, a quitté hier Washington pour le Proche-Orient où elle présidera à un sommet israélo-palestinien dans l'espoir de relancer des négociations de paix au point mort depuis près de sept ans. Mme Rice doit rencontrer son homologue israélienne Tzipi Livni, puis s'entretenir séparément avec le président palestinien Mahmoud Abbas (dit Abou Mazen) et le Premier ministre israélien Ehud Olmert, avant de les réunir pour un sommet tripartite lundi à Jérusalem. La chef de la diplomatie américaine veut donner un "horizon politique" aux Palestiniens, axé sur la Feuille de route, le plan de paix international qui prévoit notamment de créer un Etat palestinien. Elle propose notamment de discuter des contours d'un futur Etat palestinien, un sujet qui n'a jamais été évoqué depuis que l'ancien président Bill Clinton avait réuni les deux parties à Camp David en 2000, pour des négociations qui ont finalement échoué. Mais son initiative de paix intervient à un moment délicat aussi bien pour M. Abbas, qui peine à former un gouvernement d'union nationale, que pour M. Olmert, au plus bas dans les sondages. "Le gouffre séparant Israéliens et Palestiniens n'a jamais été aussi profond et compliqué", estime Aaron Miller, un ancien diplomate qui a conseillé six secrétaires d'Etat sur les négociations de paix israélo-palestiniennes. "Olmert et Abou Mazen ne sont pas maîtres chez eux, ils sont prisonniers de leurs systèmes politiques", ajoute M. Miller, aujourd'hui analyste au Centre Woodrow Wilson de Washington.