Les riverains de la cité portant le nom de l'illustre sage édificateur de la ville d'El Bouleïda demeurent catégoriques : « Nous ne souillerons pas la mémoire de notre ancêtre pour des visées bassement calculatrices des élus de la commune de Blida ! » Des responsables de l'action culturelle auprès de la commune avaient projeté la tenue d'un maoussim avec diverses activités au niveau du hay sis à 3 km plus au sud, sur les hauteurs, mais ceux qui ont en charge le hay ont insisté pour que d'autres préoccupations de la population trouvent des solutions. Assainissement, bitume, éclairage public, gaz de ville, emploi et logements sociaux sont les urgences signalées depuis plusieurs années : « Nous multiplions les demandes d'audience aux responsables et sommes traités comme des troupeaux en retour ; aujourd'hui, nous sommes sollicités pour leur servir de faire-valoir, mais nous leur crions basta ! » C'est vrai que tout semble immuable dans ce douar de 6000 habitants (cf El Watan du 26 juillet 2006) et le décor demeure quasiment pittoresque pour les visiteurs en mal de nostalgie. Si la vie est trépidante juste plus bas, même les mouches marquent un arrêt dans ces lits d'oued asséchés par la force des hommes en quête de gain rapide ; l'arrêt est encore plus long pour toutes les maladies qui annihilent toute énergie chez ces hommes pourtant taillés aux dures réalités du quotidien. Et c'est à ces gens-là qu'on vient demander de chanter, de danser et de rire juste le temps d'une visite de notables. Il existe bien des étudiantes et des étudiants en sociologie capables de dresser le profil de ces mères, ces pères et ces jeunes vieillis par le désespoir. Sidi Kebir, tout comme Beni Ali, Beni Sbiha, Hamlleli, Mimèche, Baba Moussa, Trab Lahmar, regorge d'hommes qui en veulent à cette terre nourricière de les avoir trahis par la faute de faux citadins, eux les montagnards protecteurs du moindre espace contre le colonisateur et qui ont tout abandonné aux nouveaux envahisseurs. « A l'indépendance, les rares lettrés étaient au pouvoir et moins de deux générations après ce sont les rares illettrés qui nous dirigent », dira un autre sage de ces montagnes.