Le Syndicat national des médecins résidents et le Syndicat national des personnels de l'administration publique (Snapap) dénoncent «une campagne de dénigrement et de diabolisation systématique» des praticiens de santé, menée par le ministre de la santé. «Les professionnels de la santé du secteur étatique sont les boucs émissaires à qui les décideurs veulent faire endosser la responsabilité d'un système de santé qui a montré ses limites et le but qu'est la privatisation accélérée en l'absence de mécanismes juridiques garantissant les acquis dans le secteur public», dénonce le Snapap dans un communiqué diffusé hier. Selon ces représentants des médecins résidents, cette campagne que livre le ministre dans les médias à travers des prises de position «populistes» à une opinion publique «désinformée et trompée» n'est pas sans conséquence sur le bon déroulement du travail de la communauté hospitalière, qui vit actuellement un accroissement du niveau de violence physique et verbale. Les médecins résidents, à travers une lettre ouverte adressée au ministre de la Santé, Abdelmalek Boudiaf, accusent ce dernier d'avoir livré l'honneur d'une corporation entière, sans distinction aucune, «à la vindicte d'une population» légitimement excédée par les conditions désastreuses que connaissent les hôpitaux «dont vous avez la charge, préférant ainsi user de la menace, de l'invective et de l'insulte plutôt que de mettre en place les leviers performants d'une politique de santé volontariste». Les médecins résidents qui rappellent ainsi la responsabilité du département de la Santé dans la situation de déliquescence que vit le secteur. Les deux syndicats rappellent au ministère que les médecins ont été les premiers à dénoncer le manque de formation, les conditions d'exercice indignes, les dépassements de nombreux responsables médicaux et administratifs, la complicité criminelle des uns et des autres dans l'organisation des pénuries, dans la perpétuation des manques de matériels et de moyens. «Le ministre a oublié les appels de détresse lancés par ces mêmes professionnels pour dénoncer la galère des cancéreux, les conditions de travail dans les services des urgences, la pénurie de médicaments, les pannes prolongées des équipements, la rupture des vaccins pour nos enfants», lit-on dans le communiqué du Snapap. Mais, s'indignent les médecins résidents, «si nous soutenons toute mesure visant à éradiquer les dépassements, les archaïsmes et ce fléau de la médiocrité couvée à tous les niveaux, nous n'accepterons jamais que l'honneur et l'intégrité du plus grand nombre servent de ‘cache-misère' et de ‘bouc émissaire' à la défaillance et à l'échec de ceux qui ont la charge d'organiser et de gérer le système de santé». La désinformation et l'agitation médiatique «ne suffisent pas à réformer le secteur de la santé et encore moins à draper ceux qui en usent de crédibilité», soutient le même syndicat, qui plaide pour la mise en place les conditions d'une décentralisation de la gestion sanitaire et de son financement permettant aux administrateurs et aux soignants d'avoir les coudées franches afin de répondre précisément et efficacement aux besoins réels de leurs activités. Le syndicat appelle également à casser le tabou «dogmatique et démagogique» de la gratuité des soins qui ne sont financés que du bout de l'intention politique et n'est en réalité ni véritablement réalisée ni économiquement viable et assurément loin d'être médicalement efficiente. «Osez avouer le désengagement progressif de l'Etat — déjà en marche puisque bon nombre d'examens et de gestes médicaux et chirurgicaux sont réalisés dans le privé — et débattez avec sérieux et responsabilité avec tous les acteurs du secteur des nouveaux modes de financement possibles autour de la pierre angulaire que doit demeurer la sécurité sociale. Faites participer financièrement les uns, mutualisez les autres et protégez les plus démunis pour garantir un investissement financé et toujours renouvelé dans les équipements et les infrastructures publiques afin d'éviter l'effondrement du système par épuisement des ressources ou par sa marchandisation libérale», écrivent les médecins résidents. Le Snapap souligne pour sa part qu'en Algérie, il n'y a pas que la maternité du CHU de Constantine qui ne fonctionne pas, «aucun hôpital dans aucune des 48 wilayas ne fonctionne, c'est tout le système de santé qui est en panne décidée et volontaire».