L'Algérie a connu ces dernières années un accroissement significatif des investissements publics. Sous les effets conjugués de la hausse constante des prix du baril du pétrole et l'engagement d'une politique volontariste du président Abdelaziz Bouteflika qui entend relancer la croissance par la dépense publique, l'Algérie aura à dépenser durant le quinquennat 2005-2009 quelque 4800 milliards de dinars (50 milliards de dollars). Pour l'ex-chef du gouvernement Ahmed Ouyahia, cet effort, ajouté à l'apport croissant du capital privé, viendra s'ajouter aux réalisations de la période 1999-2004 qui sont, selon lui, « incomparables avec celles obtenues en quatre décennies d'indépendance ». Qualifiée de « phase ultime de la transition économique » vers une économie ouverte et concurrentielle, celui qui a longtemps drivé l'équipe gouvernementale, a considéré que « l'Algérie vivra entre 2005 et 2009 une phase complémentaire et particulière d'opportunités pour réussir son décollage économique réel et un développement humain consolidé avec un taux de chômage se rapprochant des 10% soit un taux connu par les pays développés ». Si pour M. Ouyahia, « cet effort gigantesque de développement ainsi programmé ne se renouvellera probablement pas, en tous cas pas avec une dépense publique aussi forte et aussi volontariste », il serait alors intéressant de s'attarder sur les retombées de cette politique volontariste sur l'économie algérienne, d'autant plus qu'un premier plan de relance économique engagé entre 1999-2004 est diversement apprécié par les analystes et acteurs économiques du pays. Pour les adeptes de la politique du Président, le plan complémentaire de soutien à la croissance (PCSC) va permettre à l'Algérie de se moderniser rapidement et de réduire le chômage, qui est passé à 17%, selon les chiffres officiels. Mais si tout le monde bénit cet effort d'investissement jamais égalé, sa mise en œuvre semble laisser sceptique plus d'un. Le Fonds monétaire international (FMI) a considéré dans l'un de ses rapports sur l'économie nationale que les réformes n'avancent pas dans un contexte de volatilité des revenus provenant des hydrocarbures où la dépense publique a brusquement augmenté depuis 2001. Pour le fonds, s'il est vrai que le premier programme de soutien à la croissance a généré de l'emploi et une croissance du produit intérieur brut (PIB), le FMI, en évoquant le PCSC, considère que ses objectifs, à savoir le développement des ressources humaines, l'établissement des infrastructures ainsi que l'augmentation de l'offre de logements, pour ne citer que ceux-là, nécessite une coopération avec la Banque mondiale et ce, en entreprenant une revue des dépenses publiques. Mais la modernisation institutionnelle devant accompagner cette politique volontariste de doter le pays d'infrastructures dont il accuse un sérieux retard, ne suit pas au rythme qu'il faut. Moins « diplomatique » que certaines institutions et organismes internationaux, des experts et économistes algériens ont tout simplement douté de l'administration actuelle, qualifiée « d'incompétente » quant à sa capacité à gérer de tels budgets, se basant sur le fait que le premier plan de relance économique 2001-2004 n'a été consommé qu'à hauteur de 64%, alors que son montant était dix fois moins élevé que le second. Pis encore, ils sont nombreux encore à redouter que des sommes aussi colossales ne soient sources de gaspillage et de corruption. En effet, l'Algérie, qui est parmi les pays dont les taux d'investissements sont des plus élevés au monde, n'arrive pas encore à avoir une économie performante. Selon un rapport de la Banque mondiale, les efforts consentis en termes de volume d'investissement auraient dû, en toute logique, avoir des retombées positives sur tous les secteurs d'activités. Mais le manque de management des entreprises et la désorganisation de l'économie ont fait que bien des investissements n'arrivent pas à atteindre les objectifs qu'ils leur sont assignés. Bien entendu, la corruption a fait le reste. Selon l'un des rapports sur la corruption dans le monde, Transparency International a fait ressortir que ce sont bien les secteurs de la construction, des bâtiments et travaux publics qui sont les plus minés par la corruption, et l'Algérie figure à la 88e place sur 133 pays, par ordre croissant de corruption. Ainsi donc, et de l'avis de nombreux analystes économistes, réduire l'investissement public à une simple consommation des crédits, et sans réforme profonde des institutions, ne servira que très faiblement le développement du pays.