Les pêcheurs et les associations écologiques tirent la sonnette d'alarme chaque année et soupçonnent de pollution les unités industrielles qui rejetteraient des produits chimiques dans le cours d'eau, chose que l'administration dément. L'oued Soummam qui porte le non de la vallée de Béjaïa se meurt et le poisson avec. Chaque année, à la même saison, c'est-à-dire entre juin et septembre, des cas de mort suspecte de poisson sont signalés ici et là par des pêcheurs. L'an dernier, à Sidi Aïch, la population ainsi que des associations écologiques ont tiré la sonnette d'alarme suspectant des unités industrielles qui auraient rejeté des produits toxiques dans le cours d'eau. Cette année, le même phénomène est réapparu au niveau de la localité de Oued Ghir et le rivage de la plage de Boukhelifa où du poisson d'eau douce y a été charrié et déposé par les eaux polluées de l'oued Soummam. Qu'est ce qui tue le barbot et la carpe, ces deux espèces présentes en quantité dans l'oued ? Nadir Adouane, directeur de la pêche de la wilaya de Béjaïa, avait révélé alors que cette pollution est «d'origine chimique», sans s'étaler sur la prévenance de ces produits. Contacté par nos soins, le directeur par intérim de l'Environnement de la wilaya de Béjaïa a affirmé que «toutes les analyses que nous avons effectuées montrent qu'il n'existe aucune pollution industrielle». Ces examens, ajoute-t-il, «ont permis d'identifier la présence de matériaux lourds dans l'eau, comme le plomb et surtout une forte concentration de clore». Interrogé sur la provenance de ces produits chimiques, notre interlocuteur a indiqué que «les produits sont d'origine ménagers, issus des détergents utilisés par les ménages». Car, insiste-t-il, «il n'existe pas d'usine de fabrication de détergeant le long de l'oued mis à part de petites unités pour le conditionnement de ces produits». Le responsable précise : «nous avons commencé à constater la mort de poissons d'eau douce depuis la mise en service du barrage Tychi-Haf. Dans la basse Soummam, la présence des déchets et des eaux usées sont dominant dans le cours d'eau et le manque de précipitation et d'écoulement a diminué la capacité d'auto-épuration de l'oued». Pour le directeur par intérim de l'Environnement, le même constat est établi en cas de crue. «Lorsque l'oued est en cru, l'eau charrie toute sorte de déchets et de matière provenant des chantiers et des matières organiques. Ce qui provoque la turbidité de l'eau. La concentration de ces matières fait que l'oxygène manque et le poisson meurt par asphyxie», analyse-t-il. A la question de savoir si le poisson est menacé à long terme de disparition, le responsable répond : «Certes, il y aura une diminution de la quantité de poisson, mais il ne va pas disparaître. Car il reste encore à l'oued Soummam des affluents comme celui de Oued Amizour, et d'autres à hauteur de Seddouk». Autres polluants, les huileries dont les propriétaires n'entretiennent pas les petits bassins d'épuration. A ce propos, le directeur a noté que ses services «avaient établi des contraventions contre des propriétaires de huileries qui sont au nombre de plus de 400». Quelle solution ? Pour ralentir un tant soit peu cette «hécatombe» pour la flore et la faune, dont les poissons, et mettre un terme à la pollution de l'oued, le directeur de l'hydraulique, Sadi Amar, a estimé que la construction des stations d'épuration permettra d'éliminer les eaux usées qui se déversent en quantités importantes dans l'oued. Oued Soummam, pour rappel, est le réceptacle principal des rejets ménagers. Plus d'une vingtaine de localités y déversent leurs eaux usées. Et ce, sans compter les rejets d'origine industrielles des unités de production installées au abord de l'oued. Même si l'administration minimise la nuisance de ces entreprises, il n'en demeure pas moins qu'elles comptent parmi les pollueurs. Sur 37 forages hydrauliques qui puisent l'eau de la nappe phréatique de la basse Soummam, allant d'Akbou à Béjaïa en passant par El Kseur, quelques uns ont été «mis au repos», la qualité de l'eau étant dégradée. Car des particules polluantes ont été décelées. Les autres ne présentent aucun danger sur la santé publique, affirme le responsable. Mais à l'état où en est la situation, le risque de pollution de la nappe est réel si la principale source de pollution n'est pas totalement maîtrisée. C'est le but que s'est assigné d'ailleurs les services de l'hydraulique de la wilaya. En 2011, deux projets de stations d'épuration ont été inscrits à l'indicatif du ministère des ressources en eau, pour la région d'Akbou (13 000 m³) et Sidi Aïch (3 800m³). Mais ces structures ne couvrent qu'une partie des communes de la vallée de la Soummam. Une opération centralisée qui a accusé beaucoup de retard dans le lancement des deux projets qui enregistrent des taux d'avancement insignifiant, soit, respectivement, 21% et 5%.