L'oued Soummam se meurt et son fragile écosystème est en péril. Les indices de pollution sont tels qu'il ne s'agit plus de chercher aujourd'hui à préserver sa faune et sa flore, réduites du reste à leur plus simple expression, mais à éviter à la santé publique des épidémies dévastatrices. Et pour cause, la multitude de forages desquels s'alimente la population des communes riveraines est menacée de pollution car le risque de contamination des nappes phréatiques est, selon un hydraulicien, très élevé. Près d'une quinzaine de communes riveraines, d'Akbou à Béjaïa, en passant par Ouzellaguen, Sidi Aïch et El Kseur pour ne citer que les plus importantes, y rejettent leurs eaux usées, les margines de leurs huileries pendant les périodes d'olivaison ainsi que leurs ordures ménagères et industrielles. Les rejets finaux d'assainissement et les décharges d'ordures ménagères et industrielles se comptent par dizaines. « Les travaux d'aménagement d'une décharge intercommunale contrôlée à Gueldamane, dans la commune d'Akbou, dotée d'une enveloppe financière de 80 millions de dinars, et devant recevoir les détritus de cinq municipalités environnantes, ont été bloqués par des propriétaires terriens. Comme la direction des Domaines n'a pas eu d'interlocuteur pour l'acquisition du terrain, une procédure d'expropriation pour utilité publique est engagée », affirmera M. Djinni Smaïl, directeur de l'Environnement de Béjaïa. « D'autres projets de décharges contrôlées sont aussi à l'étude du côté de Tinebdar et El Kseur », ajoutera notre interlocuteur. L'extraction effrénée de sable réduit, d'autre part, de manière importante, la capacité du lit de l'oued à filtrer les eaux de ruissellement. Les responsables des bureaux communaux d'hygiène sont sur le qui-vive, notamment pendant la saison estivale, et veillent en permanence à la javellisation de l'eau destinée à la consommation afin de prévenir les maladies à transmission hydrique. Prenant naissance au lieu-dit Ichoukar dans la commune d'Akbou, confluent des oueds Sahel et Bousselam, la Soummam est l'un des plus importants oueds d'Algérie serpentant la vallée éponyme sur une longueur de 65 km et finissant sa course en mer méditerranée. Au réchauffement climatique ayant réduit ce fleuve en un ruisseau en été, s'ajoute la perte de l'apport en eau de l'un de ses plus importants affluents, l'oued Boussellam en l'occurrence, retenu par le barrage de Tichi-Haf. « Seule une vanne écologique coule en permanence. Les forages existants seront affectés toutefois à l'agriculture dès que le transfert des eaux du barrage sera effectif. Les sept réservoirs qui seront implantés dans le couloir Akbou-Béjaïa seront pleins 18 heurs sur 24 et régleront l'AEP des communes bénéficiaires », affirmera une source proche du projet.Une lueur d'espoir donc pour l'économie en général et l'agriculture en particulier de cette partie de la Vallée de la Soummam puisque l'irrigation des cultures maraîchères par les eaux de l'oued Soummam est interdite ces dernières années à cause justement de leur taux élevé de pollution. Sur les 65 unités industrielles que compte la commune d'Akbou, seule Cotitex est dotée d'une station d'épuration (STEP) opérationnelle. Plus loin, en aval, « d'autres unités industrielles d'envergure, à l'image d'Alfaditex Remila et Cevital, ont des stations d'épuration performantes. Signalons aussi la réhabilitation de celle de Béjaïa ainsi que l'affectation de 200 millions de DA dans le cadre du PSD à la réalisation d'une station de relevage du côté du tunnel de Sidi Abdelkader devant recueillir les eaux usées de la haute ville de Béjaïa », nous fera remarquer le directeur de l'Environnement. En attendant la réalisation des décharges contrôlées projetées et des STEP prévues à Tazmalt, Akbou, Sidi Aïch et El Kseur, les crues hivernales de ce cours d'eau en agonie viendront comme d'habitude à sa rescousse pour déverser toute cette pollution en mer.