Personne ne croit aux objectifs déclarés des changements opérés au sein de l'institution militaire l Nul ne prête également l'oreille aux assurances données par le gouvernement sur la crise économique qui frappe l'Algérie de plein fouet. Crise économique, blocage des institutions, «restructuration» au sein du Département du renseignement et de la sécurité (DRS) et changement de ses responsables couronné par le départ de son patron, le général de corps d'armée Mohamed Mediène dit Toufik… Rien n'incite à l'optimisme une classe politique poussée vers un consensus autour des risques d'instabilité qui guettent le pays. Personne, en réalité, ne croit aux objectifs déclarés des changements opérés au sein de l'institution militaire. Nul ne prête également l'oreille aux assurances données par le gouvernement sur la crise économique qui frappe l'Algérie de plein fouet. La plus optimiste, celle qui a pendant longtemps défendu le président Bouteflika et partagé ses options, la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune, n'a pas pu tenir devant la pénible situation du pays. Sur le départ du patron du DRS ? Mme Hanoune s'est exprimée une deuxième fois sur le sujet. Pour elle, le changement dont il est question a été opéré par le président Bouteflika qui «aurait dû assurer les équilibres internes du pays», dit-elle, avant d'alerter sur «le danger d'effondrement qui le menace». Pis, selon elle, «les Algériens vivent ces derniers jours une véritable psychose, ils ont perdu leur souveraineté morale, ainsi que l'intégrité du pays». Louisa Hanoune reproche au chef de l'Etat, auquel elle a apporté un soutien indéfectible, d'avoir fait un virage à 180 degrés en cautionnant la politique d'austérité du gouvernement. Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) ne s'inquiète pas moins de la situation du pays. Le parti de Mohcine Bellabas, qui pense que la crise est «d'abord politique avant qu'elle ne soit économique», considère que «le départ à la retraite ou le limogeage du désormais ex-patron des Services, Mohamed Mediène, dit Toufik, s'il peut se décliner comme la séquence “d'un naufrage pensé et programmé du DRS”, ne signifie pas pour autant la fin de la police politique dont ont pâti nombre de partis et de militants politiques». Lors de sa dernière conférence de presse, le président de Talaie El Houriat, Ali Benflis, qui a déploré lui aussi «le flou et l'opacité dans lesquels se sont déroulés les changements» au sein de l'Armée nationale populaire (ANP), notamment ceux intervenus au sein du DRS, «dans un contexte de vacance du pouvoir», ne signifient aucunement l'existence d'une volonté d'aboutir à un Etat civil et démocratique. Un pouvoir personnel ne peut être démocratique, a souligné Ali Benflis, en affirmant que «la clé du problème, c'est de sortir de la vacance du pouvoir par le retour à la souveraineté populaire et à la légitimité par les urnes». Dans un communiqué rendu public, samedi dernier, à l'issue de la réunion de son conseil national, le Front des forces socialistes (FFS) souligne que le pouvoir, qui n'a pas de vision ni de projet d'avenir, «est en train d'exploiter l'aspect économique d'une crise multidimensionnelle pour faire peur à la population et neutraliser toute aspiration politique au changement pacifique et démocratique du système». L'ancien parti de Hocine Aït Ahmed, pour qui le pouvoir est «responsable de tout ce qui pourrait provoquer l'irréparable», s'interroge sur «le sens des restructurations menées dans l'administration civile et militaire avec la désignation de nouveaux responsables dans les entreprises publiques, les wilayas, le gouvernement et l'armée». «Ne visent-elles pas à pérenniser le système ?», s'inquiète le plus vieux parti de l'opposition, qui a tenté d'amorcer, sans réussir, un consensus national qui regrouperait et le pouvoir et l'opposition. Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) de Abderrazak Makri doute, lui aussi, de la volonté de «civiliser» l'Etat après le départ à la retraite du patron du DRS. Dans un communiqué rendu public à l'issue de la réunion hebdomadaire de son bureau exécutif, le parti islamiste craint que le changement en question «ne soit qu'une des facettes des dispositions prises par le régime pour se succéder à lui-même».