Nouveau coup de tonnerre dans le ciel de la FIFA. Hier, le ministère public de la Suisse, via le bureau du procureur, a annoncé l'ouverture d'une procédure pénale contre Joseph Sepp Blatter, le président de la FIFA pour «soupçon de gestion déloyale» et subsidiairement «abus de confiance». Des charges, si elles sont prouvées, qui peuvent valoir à l'intéressé 10 ans de prison. Le baron de la FIFA est soupçonné d'avoir effectué «un paiement déloyal de 2 millions de francs suisses (1,84 million d'euros) à Michel Platini», président de l'UEFA et candidat déclaré à la succession de Joseph Sepp Blatter au poste de président de la FIFA, lors de l'élection qui aura lieu en février 2016. Le procureur suisse a qualifié ce versement «de préjudice à la FIFA». L'argent aurait servi aux travaux non précisés effectués entre janvier 1999 et juin 2002. Michel Platini auditionné, vendredi, par le juge n'a pas nié les faits reprochés à Joseph Sepp Blatter. On ne sait pas encore si cette somme importante a été versée à Michel Platini dans un cadre privé ou autre, c'est-à-dire à l'organisation qu'il préside (UEFA). Ce type d'arrangements, que d'aucuns qualifient de royalties que les pontes de la FIFA se partagent entre eux depuis le premier mandat de Joao Havelange à la tête de la FIFA (1974), a causé la perte de Blatter et de tous les éléments du système qu'il a mis en place depuis son intronisation à la tête de cette instance (juin 1998). L'accélération des événements n'est pas fortuite. Elle intervient quelques jours après la conférence de presse conjointe animée, le 14 septembre, par le procureur général suisse, Michael Lauber, et la ministre américaine de la Justice, Loretta Lynch, qui ont affirmé que les enquêtes sur les soupçons d'attribution des Coupes du monde 2018 (Russie) et 2022 (Qatar) et les accusations de corruption allaient se poursuivre à l'encontre d'autres membres de la FIFA, en plus de ceux arrêtés le 27 mai 2015. La charge retenue contre Joseph Sepp Blatter est intervenue dans le sillage de l'émission «Investigation 10 heures moins 10 minutes» diffusée il y a une semaine sur la chaîne alémanique FSR, où le journaliste a exhibé un document signé par Jérôme Valcke, ex-secrétaire général de la FIFA, relevé de ses fonctions le 17 septembre, qui annonce à Kack Warner, président de la Concacaf, que «le boss (Blatter) t'accorde le droit de négocier les droits de retransmission de la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud et 2014 au Brésil en contrepartie de 600 000 dollars et te demande de ne pas divulguer cette information, car la décision n'a pas été discutée en comité». El Watan détient une copie de ce document et a révélé ce passe-droit au début du Fifagate. C'est sur la base de cette révélation par la télévision suisse que la justice de ce pays a ouvert une enquête sur Blatter. Le ministère public de la Confédération estime que, par cet acte, Joseph Blatter a manqué à ses obligations vis-à-vis de la FIFA en paraphant un contrat avec Jack Warner, contraire aux intérêts de la FIFA. Concernant le «cadeau» fait à Michel Platini, il faut situer le contexte de l'époque, c'est-à-dire qui correspond à la lune de miel entre Blatter et Platini au lendemain du sacre du Valaisan et pour lequel le Français avait grandement contribué en convainquant les Européens que Blatter était le bon choix par rapport à Lennart Johansson (Suède). Blatter a tout de suite renvoyé l'ascenseur à celui qui l'a fait roi en 1998. Depuis, beaucoup d'eau a coulé sous les (grands et petits) ponts du football mondial. Joseph Sepp Blatter a définitivement perdu pied. Il veut entraîner Michel Platini dans sa chute. Il a les moyens de son ambition, comme l'atteste la première crasse qu'il vient de faire à son ennemi français. D'autres suivront. Le vieux chef ne périra pas seul. Dans les jours à venir, d'autres révélations sont à prévoir. Une gorge profonde affirme : «Ce déballage est rien par rapport à ce que révélera l'enquête qui est discrètement menée pour faire éclater au grand jour le scandale de la caisse noire dont personne ne parle pour l'instant.»