Joseph Sepp Blatter, président de la FIFA, Michel Platini, président de l'UEFA, et Jérôme Valcke, secrétaire général de la FIFA, ont été suspendus provisoirement, hier, pour 90 jours par la commission d'éthique de la FIFA. Lourde sanction également à l'encontre du Sud-Coréen Chung Mong-joon, qui a écopé une suspension de six ans. Pour rappel, Chung Mong-joon était en course pour succéder à Blatter à la tête de la FIFA. Du coup, le verdict prononcé par la commission d'éthique risque d'avoir de terribles conséquences sur la FIFA et surtout sur la course à sa présidence. A l'issue de ces sanctions inédites, c'est Issa Hayatou, président de la CAF, qui a été désigné pour assurer l'intérim de Joseph Blatter. Ce dernier s'expliquait hier sur le versement de 2 millions d'euros à Platini — dans ce qui s'apparente à un versement d'argent injustifié — même si le Français affirme qu'il s'agit d'une rémunération pour des travaux accomplis au profit de la FIFA de son «ami» Blatter. Dans un passé pas très lointain, pour moins que cela, la commission a eu la main lourde à l'égard de Bhamgee (Gambie), Bin Hammam (Qatar) et tous ceux qui un jour ont osé défier Blatter. Le Suisse avait mis en place un système qu'il contrôlait dans toutes les étapes de la chaîne. Pour asseoir son pouvoir, il puisait dans les caisses de la FIFA, comme l'attestent les preuves étendues sur les journaux du monde entier. Cet épisode des 2 millions d'euros accordés à Platini met en lumière les pratiques mafieuses qui ont toujours eu cours à la FIFA. Des sources proches du dossier des scandales qui éclaboussent la FIFA évoquent, avec de plus en plus d'insistance, l'existence d'une caisse noire qui servait à acheter le silence des uns et des autres. Michel Platini, présenté comme un homme intègre plus blanc que neige, est montré sous son vrai visage : celui d'un homme dont l'argent est le moteur, comme la plupart de ses compagnons du comité exécutif rattrapés par les justices américaine et suisse et qui se préparent à passer le restant de leurs jours derrière les barreaux de prisons américaines. Si Michel Platini est reconnu coupable d'avoir empoché de l'argent sans qu'il l'ait mérité, cela signifiera, pour lui, la fin de sa carrière et de ses ambitions sportives. Tricheurs Beaucoup d'observateurs restent sceptiques sur l'indépendance des membres de cette instance dirigée par un compatriote de Blatter, Cornel Borbelly, et l'Allemand Hans Joachim Eckert qui n'ont pas assumé toutes leurs responsabilités dans l'affaire Garcia. Ce juge américain, chargé par la FIFA d'enquêter sur les votes des Coupe du monde 2018 et 2022, a remis un volumineux dossier, plus de 400 pages, avec des détails et des conclusions, mais que ladite commission a refusé de publier sous de fallacieux prétextes. Ce qui a obligé le juge Michael Garcia à claquer la porte en menaçant la FIFA de publier le rapport dans son intégralité. Bordbely et Eckert auraient obéi aux injonctions de Blatter qui ne voulait pas que le rapport Garcia soit porté à la connaissance de l'opinion publique. Aujourd'hui, ces deux hommes, en plus bien sûr de leurs onze collègues qui forment les chambres d'instruction et de jugement, pourront-ils prononcer des sanctions à l'encontre des deux hommes forts de la FIFA, comme ils n'ont pas hésité à le faire lorsque Blatter le leur avait suggéré dans les affaires concernant des dirigeants moins influents ? Pas sûr. De toute façon, ces affaires de corruption, blanchiment d'argent, pots-de- vin, passe-droit, combine... vont alimenter quotidiennement la gazette de la FIFA au-delà de l'élection du nouveau président, prévue le 26 février prochain, si tant cette échéance aura bien lieu. A priori, la FIFA est pourrie de la tête. Elle a peu de chance, en tant qu'instance mondiale du football, de se relever de ces scandales sans fin qui l'agitent depuis des années. Lorsque Loretta Lynch, ministre de la Justice américaine, disait : «Le match est loin d'être fini. Il vient juste de commencer», elle lançait un message fort à l'endroit de tous les tricheurs qui essaiment la FIFA depuis la nuit des temps. Elle va les faire tomber sans distinction. Blatter et Platini ont ouvert la voie et seront suivis par tous leurs camarades qui ont des affaires sur le dos du football et qui pensaient jouir et bénéficier d'une impunité sans limite. L'onde de choc est terrible. Le football mettra du temps pour se remettre.