L'appel des factions palestiniennes nationalistes et islamistes à faire de la journée de vendredi celle de la revolte a été largement entendu par la population palestinienne, dans la ville sainte d'El Qods, la Cisjordanie ainsi que dans la bande de Ghaza. En début d'après-midi, deux jeunes sont tombés en martyr, un à El Khalil et l'autre à Ghaza. Les mêmes scènes de violences entre des groupes de jeunes lanceurs de pierres et des soldats israéliens étaient visibles dans toutes les zones de contact : El Qods, El Khalil, Naplouse Toulkarem, Bethléem et dans la bande de Ghaza. Comme à leur habitude, les soldats israéliens ont répondu aux protestations populaires par un usage excessif de la force. Ils ont usé de balles réelles et en caoutchouc, de bombes assourdissantes et lacrymogènes. Devant leur nombre croissant, les équipes médicales étaient débordées, insuffisantes pour évacuer tous les blessés vers les hôpitaux. De nombreux véhicules particuliers ont servi d'ambulances. Dans la ville d'El Khalil, au sud de la Cisjordanie occupée, près de la colonie israélienne de Kiryat Arba, des soldats ont exécuté un jeune homme qu'ils soupçonnaient d'avoir poignardé un de leurs camarades. Selon l'armée d'occupation, le jeune homme, déguisé en journaliste, a sérieusement blessé un soldat avant d'être abattu. Les soldats l'ont laissé se vider de son sang et ont interdit aux secouristes de l'approcher. La réaction envers les journalistes présents a été immédiate : ils ont été ciblés par une pluie de bombes assourdissantes et de bombes lacrymogènes. Les attaques à l'arme blanche contre des colons ou des éléments des forces de sécurité israéliennes par des jeunes Palestiniens, lassés de l'occupation de leur pays, des humiliations subies au quotidien de la part des soldats de la machine de guerre israélienne, des atteintes aux lieux saints, particulièrement à la mosquée El Aqsa, ont caractérisé le soulèvement populaire que vit la Palestine occupée depuis début octobre. Ces opérations, synonymes de mort assurée pour leurs auteurs, ont engendré la peur chez les Israéliens, qui sentent que leur sécurité n'a jamais été aussi menacée. Ne faisant plus confiance à leurs services de sécurité, ils se sont rués sur les armes à feu, même si beaucoup de ces opérations ne se sont jamais produites. Les autorités israéliennes utilisent ce prétexte pour masquer certaines exécutions sommaires de Palestiniens dans les rues. A Ghaza, les jeunes n'ont pas hésité à se diriger vers les zones frontalières, tout en sachant qu'avec leurs pierres, ils ne peuvent faire de mal aux soldats israéliens postés dans ces endroits hautement sécurisés. Des blessés ont été signalés près du terminal d'Erez au nord ; l'un d'eux, Yahia Farhat, atteint à la tête, a succombé à ses blessures. Dans les zones situées au centre et au sud de la bande de Ghaza, des dizaines d'autres jeunes ont été blessés et évacués vers les hôpitaux proches. Dans l'après-midi, après la prière du vendredi, selon un bilan du ministère palestinien de la Santé, deux jeunes ont été tués et 237 autres blessés en moins de trois heures de heurts, en Cisjordanie occupée et dans la bande de Ghaza. Toujours à Ghaza, un homme de 37 ans, Chawki Aabid, a succombe, hier, à des blessures contractées une semaine auparavant dans des incidents semblables, au nord de l'enclave palestinienne. C'est donc un vendredi lourd en événements chauds et sanglants qu'ont vécus les Palestiniens après le calme relatif de jeudi. La Palestine occupée, aujourd'hui, ressemble beaucoup à celle des Intifadhas de 1987 et 2000. La communauté internationale se doit d'agir pour arrêter le massacre Dans la ville sainte d'El Qods occupée et annexée par Israël depuis 1967, au cœur du conflit actuel, les hommes de moins de 40 ans ont été interdits d'entrer sur l'esplanade des Mosquées. Seuls 5000 fidèles ont participé à la prière du vendredi, que des milliers de citoyens ont accomplie dans les rues proches. Dès la fin de la prière, des forces d'occupation israéliennes ont chargé la foule pour la disperser. La ville d'El Qods vit un véritable siège depuis mercredi soir, avec l'établissement de 39 nouveaux barrages militaires. Tous les quartiers palestiniens de la ville sainte sont fermés par des blocs de béton. Au même moment, alors que l'occupant ne cesse de renforcer ses mesures de répression contre les citoyens palestiniens, l'Administration américaine, toujours alignée sur la politique du gouvernement israélien, silencieuse depuis le début des événements dans les territoires palestiniens, a demandé, par la voix de son secrétaire d'Etat John Kerry, au président Mahmoud Abbas de dénoncer les attaques palestiniennes contre les Israéliens «clairement et avec force». Aucune allusion aux exécutions extrajudiciaires de jeunes Palestiniens dans les rues n'a été faite par le responsable américain. Il est attendu prochainement dans la région du Proche-Orient, dans le but de réunir le président palestinien et le Premier ministre israélien dans une tentative de reprise du processus de paix. Un procédé qui a déjà échoué dans le passé et qui n'a aucune chance d'aboutir dans les circonstances actuelles. Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, qui ne reconnaît aucun des droits nationaux du peuple palestinien et qui a utilisé les négociations pendant des années pour multiplier les colonies dans les territoires palestiniens occupés, a renouvelé sa disposition à rencontrer le président Abbas, tout en continuant de l'accuser «d'inciter à la violence». Une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU, seule institution internationale capable de mettre un terme à l'occupation israélienne, a été tenue, hier, pour discuter de la situation explosive en Palestine occupée. Le président palestinien reste contre tout usage d'arme à feu par les Palestiniens malgré l'injustice et l'oppression qu'ils subissent de la part de l'occupant israélien ; il croit toujours que la communauté internationale est capable de restituer leurs droits aux Palestiniens, à condition de réunifier les rangs et de poursuivre la révolte populaire pacifique, quel que soit le prix à payer.