Dans l'entretien qu'il nous livre, le directeur général de la Seaal tente de répondre aux attentes des Algérois en matière d'eau potable et d'assainissement. La Seaal est officiellement chargée, depuis le 1er mars 2006, de la gestion déléguée des eaux à Alger. Quelle est, d'après vous, la situation du réseau AEP et celui de l'assainissement ? Depuis le 1er mars 2006, nous avons beaucoup travaillé. Nous avons complété les audits qui ont été faits précédemment à la signature du contrat. En ce qui concerne la situation de l'eau potable à Alger, je pense que nous maîtrisons assez bien la situation existante. Notre plan d'action a démarré. Il y a beaucoup de travaux à faire. Ce n'est pas du jour au lendemain que cela se fera, car c'est un travail en profondeur que nous devons faire sur les réseaux, sur les étages de distribution des réseaux compte tenu du relief d'Alger, sur la pression du réseau ainsi que sur la recherche de site. Donc, nous avons beaucoup de travail à faire pour être au rendez-vous dans trois ans et assurer l'eau H 24 dans la capitale. Mais je pense que c'est sur de bons rails. Les usines sont en train d'être modernisées. Un plan d'action par site a été défini et il faut que vos lecteurs comprennent que c'est un travail de longue haleine qui demande de la patience. Déjà, cet été, il y a eu des améliorations considérables principalement sur la chaîne côtière algéroise. Les habitants de Aïn Benian ont eu de l'eau comme jamais auparavant. A Chéraga et Dély Ibrahim, la situation s'est nettement améliorée. Par-ci par-là, ce sont tous les jours que des améliorations sont enregistrées. Et ce sont ces petites améliorations infimes au quotidien qui vont conduire au résultat global dans trois ans. Et pour l'assainissement ? En ce qui concerne l'assainissement, la situation est beaucoup plus compliquée. L'organisation du réseau d'assainissement sur le Grand Alger est complexe. Il y a beaucoup d'intervenants. Les oueds rentrent en tête du réseau d'assainissement à Alger et leur entretien est assurée par la direction de l'hydraulique de wilaya. Il faut que ces oueds soient plus nettoyés et que des bacs à sable soient installés afin d'empêcher le sable d'obstruer le réseau d'assainissement. Ensuite, il y a la direction de la voirie qui a la charge des avaloirs. Et là encore, il y a beaucoup d'avaloirs qui sont soit bouchés ou totalement effondrés, ce qui crée des points noirs. Ainsi, lorsqu'il y a des pluies, l'eau, au lieu de pénétrer en souterrain, reste en surface. Et, enfin, le fait que la ville ne soit pas dans un état de propreté fantastique n'est pas de nature à aider les opérations d'assainissement. Par conséquent, à chaque pluie, c'est un lavage de la voirie qui est fait et beaucoup d'immondices, de saleté pénètrent dans le réseau d'assainissement. Tout le monde peut comprendre que ces matériaux sont plus faciles à ramasser en surface qu'à l'intérieur des réseaux d'assainissement. Il y a beaucoup de travail à faire. Les réseaux, notamment les gros réseaux, n'ont pas été curés depuis bien longtemps. Nous sommes en train de déployer de gros moyens pour endiguer les points noirs comme par exemple la rue Tripoli à Hussein Dey qui connaît, à chaque averse, des débordements importants. Tant que nous n'avons pas réglé les points en amont de ce site, cette situation va perdurer. Par ailleurs, des investissements importants sont engagés par la direction de l'hydraulique de wilaya comme les usines d'épuration des eaux usées et les gros collecteurs. Mais il faut, en plus, s'occuper de l'organisation et de la collecte des eaux pluviales, comme je vous l'ai expliqué, à partir des oueds et des avaloirs et assurer une plus grande propreté de la ville. Quelles sont les priorités de la Seaal ? En ce qui concerne les réseaux d'assainissement, la priorité de la Seaal est de remettre en bon état de fonctionnement toutes les stations de relevage et d'assainissement. Cet été, il y a eu moins d'incidents que d'habitude dans les stations de relevage, ce qui a permis aux plages d'être moins fermées. Aujourd'hui, on est en train de mettre à niveau toutes ces stations de relevage avant d'attaquer les grands curages en faisant venir de grosses machines de Tunisie. Nous allons employer également d'énormes pompes en cas de débordement du réseau. Pensez-vous qu'il y a un chevauchement des prérogatives entre la Seaal, l'ADE et l'ONA ? La Seaal est la fille de l'ADE et de l'ONA. Il n'y a pas de chevauchement dans les prérogatives. L'ADE et l'ONA ont confié la production et la distribution de l'eau ainsi que l'assainissement à la Seaal sur le périmètre de la wilaya d'Alger. Nous sommes à la fois l'ADE et l'ONA, qui sont nos partenaires. Suez Environnement a dépêché des experts français. En quoi consiste leur rôle ? Nous avons dépêché 27 experts auxquels s'ajoutent des experts pour des missions de courte durée. La société Seaal est une société de droit algérien. Elle est mixte. Il y a des postes de responsabilité qui sont occupés par des Algériens et d'autres par des Français. Par exemple, le directeur de la production est un Algérien, le directeur administratif et financier est également Algérien tout comme le directeur du personnel, avec une équipe très solidaire. Et quel est donc le rôle des Français ? Leur rôle est d'animer les équipes. Leur façon de manager est une manière de transférer le savoir-faire. Et puis, nous venons avec nos méthodes modernes de management qui inclut la formation au quotidien. Il n'y a aucun poste en double. C'est une société qui fonctionne comme toute autre société. Tantôt c'est un Algérien, tantôt c'est un Français, et tout ceci se croise harmonieusement pour former une très belle équipe d'autant plus que nous avons trouvé des gens très compétents dans la Seaal. Le consommateur algérois a connu, ces derniers jours, une suite de désagréments dans son alimentation en eau potable. Comment expliquez-vous ces incidents ? C'est un accident. Moi, je ne fais pas le travail de la police. Les réseaux d'eau et ceux de Naftal sont anciens, plus de 30 ans chacun. Je crois qu'il y a un projet de canalisation qui est en cours de réalisation par Naftal qui devra contourner l'alimentation en eau potable. Une plainte contre X devait être déposée par le ministère de l'Environnement. L'absence de plans du réseau souterrain pose vraiment problème. Comment pensez-vous y remédier ? Il y a deux situations bien distinctes qui existent. Concernant l'eau potable, nous disposons des plans de distribution de l'eau. Là, il n'y a aucun problème. Les plans de localisation qui indiquent les rues dans lesquelles il y a un cheminement de canalisations. Ce ne sont pas des plans d'implantation des réseaux. Alors à chaque fois qu'il y a un concessionnaire ou une entreprise qui ouvre un chantier, ceux-ci doivent obligatoirement prendre attache avec nos services pour les renseigner sur la position exacte des canalisations. En assainissement, l'ONA ne nous a pas remis de plans d'assainissement. J'imagine qu'à Alger qui est une ancienne ville, il doit y avoir des anciens plans même s'il n'ont pas été mis à jour. Ce qui est certain, c'est que dès qu'on ouvre une tranchée, il faut être très prudent. Et concernant les branchements anarchiques ? La difficulté aujourd'hui du service de l'eau est l'important urbanisation d'Alger. Une urbanisation soudaine qui n'a pas été préparée au niveau des infrastructures. En quelque sorte, nous courons derrière notre ombre si je puis m'exprimer ainsi pour ramener de l'eau à l'endroit qu'il faut et où c'est nécessaire. J'ai entendu parler du projet d'un million de logements à réaliser sur cinq ans dont la plupart des habitations sont proches d'Alger. Ce sont des besoins nouveaux qu'il faut nécessairement intégrer. Nous serions probablement plus performants à l'avenir si l'on nous donnait les plans de développement et d'urbanisation du Grand Alger. Ce qui nous permettra de mieux anticiper. Est-ce que l'usager est toujours prévenu des coupures inhérentes aux travaux ? On le souhaite. On n'est pas arrivés à 100% mais c'est notre objectif. Un objectif que l'on devrait atteindre avec les 3500 salariés de Seaal. Comment comptez-vous résoudre les problèmes inhérents aux pillages illicites et aux factures impayées ? Dans notre programmation, nous allons quadriller, avec nos enquêteurs, toute la wilaya d'Alger et ce dès janvier 2007. Nous allons vérifier si l'usager dispose d'un compteur. S'il ne dispose pas de compteur, on en installera un. On vérifiera également si le compteur est juste pour que le consommateur ne paie pas le forfait mais juste la quantité d'eau consommée. Un dernier mot ? Ce que je peux dire en conclusion est qu'on est en train de faire un travail important et sérieux. Nous ne pouvons pas faire du spectaculaire en peu de temps dans le domaine de l'eau ni celui de l'assainissement. Si nos experts aussi bien de l'ADE, de l'ONA que ceux du ministère des Ressources en eau sont arrivés à la conclusion qu'il faut trois ans et demi pour arriver à alimenter Alger en eau H 24, c'est que cette durée est nécessaire pour y arriver et je pense que nous allons y arriver. Merci à tous les usagers de leur patience.